Et pour corroborer les propos de Kuzmanovic (la branche nationale et sociale de LFI coupée par Mélenchon) qui suivent, on est sûrs que les antiracistes ne lèveront ni la voix ni le petit doigt pour cette jeune femme qui a été assassinée cette nuit par des racailles à Lyon.
« Trois hommes suspectés d’avoir pris la fuite à bord d’une voiture après avoir percuté mortellement à Lyon une jeune femme de 23 ans dans la nuit de samedi à dimanche ont été placés en garde à vue, a appris l’AFP auprès du parquet.
Selon le site d’informations du mensuel lyonnais, le chauffeur présumé, qui se trouve parmi les trois en garde à vue, aurait renversé la jeune femme dimanche vers 3h45 alors qu’elle promenait son chien dans le 5e arrondissement de Lyon.
Une altercation entre la victime et les suspects, qui venaient de percuter l’animal alors qu’ils roulaient à grande vitesse, serait à l’origine du drame, précise Lyon Mag.
La voiture aurait ensuite fauché la jeune femme avant de la traîner sur plusieurs centaines de mètres et de prendre la fuite. Alertés, les pompiers n’ont pu que constater son décès. » (Sputniknews)
La mort d’un chauffeur de bus, Philippe Monguillot, a provoqué l’indignation en France. Pour Georges Kuzmanovic, fondateur de République souveraine, ce meurtre fait écho à l’impunité qui sévit en haut comme en bas de la société. Entretien.
Comment réagissez-vous au décès de Philippe Monguillot, chauffeur de bus violemment agressé à Bayonne le 5 juillet ? Au-delà de la consternation, cette affaire revêt-elle, selon vous, une dimension politique ou s’agit-il d’un simple fait divers ?
On pourrait dire qu’il s’agit d’un fait divers tragique, condamner et puis oublier sans en tirer les conséquences. Ce serait, je crois, une erreur grave. Ce meurtre fait suite à de nombreuses exactions et crimes du même ordre. Voyez le cas du jeune Marin qui s’était interposé à Lyon pour protéger un couple qui se faisait agresser pour un simple baiser dans la rue : il a été roué de coups, plongé dans le coma et souffre encore de lésions cérébrales. Après seulement trois ans et demi de prison, on parle de libération de son agresseur.
Il en va de même pour le courageux barman de l’Assemblée nationale, Jean-Michel Gaudin, qui avait porté secours à une femme violentée ; les agresseurs l’ont tellement battu qu’il restera gravement infirme à vie et eux n’ont écopé que de condamnations allant de cinq ans (un des agresseurs était mineur au moment des faits) à sept ans, lesquelles ont toutes les chances d’être réduites dans les années à venir.
Cela crée nécessairement un sentiment d’impunité pour ce type d’individus qui ne sont rien d’autre que des prédateurs sociaux, de véritables bombes humaines saturées de haine, prêts à frapper quand bon leur semble. Ainsi hier, une énième fois, un pompier était attaqué dans l’Essonne et blessé par balle à la jambe. On pourrait se demander dans quel esprit malade vient l’idée de tirer sur ceux qui viennent vous sauver, mais ce serait psychologiser ce qui est devenu une dérive globale : les pompiers n’en peuvent plus d’être attaqués sans cesse dans l’exercice de leurs fonctions au service de leurs concitoyens.
L’impunité de ce nouveau « lumpenprolétariat » fait d’ailleurs écho à l’impunité des plus puissants de notre société qui se délite par ses deux bouts. Il y a dans notre République des zones de non-droit et il faudra un jour prendre le taureau par les cornes avant que cela ne dégénère totalement – par le bas et par le haut. Pour moi, le meurtre de Philippe Monguillot s’inscrit dans la continuité d’une hausse de ce type de violences, mais également d’une hausse substantielle des incivilités et d’un effondrement des simples pratiques de politesse. Cela dit quelque chose de l’état de notre société, de la nation.
À droite, de nombreuses personnalités ont réagi en réclamant la fin du laxisme et la sévérité pour les agresseurs. La justice est-elle trop clémente dans ce type d’affaires ?
Souvent, à droite, ce type d’événements tragiques suscite, certes, des condamnations immédiates et fermes – ce qui est une bonne chose – mais sans que jamais cela n’entraîne une réflexion sur les causes profondes du développement de ce type de criminalité. La droite réclame plus de sévérité et fustige la clémence de la justice… tout en oubliant sa responsabilité dans l’insuffisant financement de la police et de la justice qui manquent tant de moyens que de personnels. C’est bien sous la présidence de Nicolas Sarkozy que les effectifs de police ont été gravement réduits, c’est sous sa présidence qu’a été abandonnée la police de proximité et qu’a été instaurée une politique du chiffre qui ne résout rien, bien au contraire.
La droite a, durant les quarante dernières années, défendu avec passion les politiques néolibérales et les exigences de l’Union européenne quant à la réduction du financement des services publics ; elle s’est souvent vautrée dans l’atlantisme le plus complaisant en oubliant que ce qui accompagne le néolibéralisme économique et le communautarisme étasunien, c’est cet individualisme forcené qui n’a que faire de l’autre et de la société et qui est aussi le terreau sur lequel fleurit cette criminalité barbare.
Je note que lorsque le pouvoir en ressent le besoin, la police opère avec dureté et la justice est inflexible. Je pense tout particulièrement à la répression policière et judiciaire du mouvement des Gilets Jaunes : 12 000 arrestations, 3 000 condamnations dont 1 000 à de la prison ferme, sans parler des énucléés, de ceux qui ont perdu un membre ou des centaines de blessés graves… pour des citoyens pour la plupart sans casier judiciaire et qui ne demandaient qu’un peu plus de justice fiscale et sociale. Quand on veut, on peut. Emmanuel Macron a choisi ses ennemis, nous n’aurions pas choisi les mêmes.
Le problème global n’est pas le laxisme de la justice, mais les moyens dont elle dispose ainsi que la volonté politique d’agir. Il est indispensable de repenser les sanctions envers les mineurs : on ne peut ni les renvoyer chez eux, et donc laisser s’enraciner un sentiment d’impunité, ni risquer de les radicaliser plus encore en les enfermant dans des prisons déjà surpeuplées, remplies de condamnés de droit commun majeurs. Il faut adopter une punition réelle et forte, mais adaptée. De manière globale, on manque d’une République et d’un État fort, mais aussi de travail – en raison des délocalisations, qui sont la résultante des traités de libre-échange et des traités européens. Trop souvent également, le système éducatif ne répond plus aux attentes d’insertion dans la société, les services publics font défaut, tout comme le sens du devoir envers la communauté nationale et la responsabilité envers les autres. À République souveraine, nous considérons que la suppression du service national – décidée par la droite, rappelons-le – a été une faute grave, tant du point de vue politique que de celui de la cohésion sociale.
À gauche, l’affaire a suscité moins de réactions. Comment l’expliquez-vous ?
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Sur ce sujet, je pourrais paraphraser George Orwell, authentique « socialiste démocratique » dont je me sens proche et qui, désabusé par « la gauche », déclarait : « Ce qui me dégoûte le plus chez les gens de gauche, particulièrement chez les intellectuels, c’est leur ignorance crasse de la façon dont les choses se passent dans la réalité. » On en est toujours là : le refus de voir la réalité et donc d’agir dessus. Une partie de la gauche semble avoir oublié le concept de « lumpenprolétariat » développé par Karl Marx et qui caractérise bien ces criminels qui s’en prennent d’abord aux travailleurs. Le « lumpenprolétariat » décrit cette frange du prolétariat qui a quitté les classes populaires par le bas et où on retrouve les voyous, les petits criminels – tous ces gens qui n’ont plus de conscience de classe, qui sont immoraux, mal éduqués et individualistes. Ce sont des alliés objectifs de l’oligarchie capitaliste car ils copient, à leur échelle, son ethos : la prédation violente, pour soi et contre les autres. C’est aussi s’occuper des catégories populaires, tâche normalement dévolue à la gauche, que de la débarrasser de ce lumpenprolétariat. La gauche actuelle semble incapable même de penser le sujet.
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