Se défendant d’avoir menti sur sa connaissance des écoutes Sarkozy, Christiane Taubira ne convainc pas la presse qui pointe jeudi la "faute" de la garde des Sceaux et ses conséquences dévastatrices pour le gouvernement.
Après avoir braqué ces derniers jours toute leur attention sur la droite empêtrée dans les affaires Copé, Buisson et Sarkozy, les éditorialistes tirent à boulets rouges sur la ministre de la Justice. Titrant sur "le mensonge d’Etat", Le Figaro est le seul à demander son départ, joignant sa voix à la droite. Le directeur des rédactions du quotidien conservateur, Alexis Brézet, écrit que "dans une France qui serait à la hauteur des exigences que les Français placent en elle, la démission de la garde des Sceaux et celle du ministre de l’Intérieur auraient déjà été remises au président de la République - et acceptées".
Pieds dans le mensonge
Pour Le Monde, à tout le moins, "la ministre de la justice est disqualifiée". Et, ajoute Fabrice Rousselot dans Libération, "la faute politique de Christiane Taubira est évidemment du pain bénit pour l’UMP". Ciblant lui aussi la "faute" de la ministre, le quotidien communiste L’Humanité, sous la plume de Maurice Ulrich, tacle néanmoins l’UMP qui trouve là l’occasion "de se présenter de nouveau en robe de lin blanc, candide et innocente. C’est trop facile". "L’équipe Ayrault n’a pas su exploiter cette mine pour discréditer l’opposant. Pis, il s’est pris tout seul les pieds dans le mensonge", commente Cécile Cornudet dans Les Echos.
Conséquence, relevée par Hervé Cannet dans la Nouvelle République du Centre-Ouest : "De manière spectaculaire, les affaires ont donc changé de sens". Pour Jacques Camus (La Montagne/Centre-France), "jamais ne fut aussi criante l’absence de pilotage de l’exécutif sur un dossier sensible". Dans un tel contexte, l’avenir de Mme Taubira à la Chancellerie paraît compromis. "Christiane Taubira n’est pas la secrétaire d’État en charge de notre divertissement. Elle est la ministre régalienne de la Justice. Elle doit avoir le sens des mots et la maîtrise de ses arguments", assène Jean-Pierre Tenoux dans l’Est républicain.
"Nous ne sommes pas aux États-Unis où le mensonge a jadis poussé un président vers la sortie. Mais, si Christiane Taubira a résisté à plusieurs manif pour tous, cette manip pour tous pourrait bien sceller son sort Place Vendôme", estime Bruno Dive de Sud Ouest. "En politique, les demi-mensonges ne font pas de demi-dégâts (...) Dans ces conditions, difficile de sauver le soldat Taubira", juge Patrice Chabanet dans le Journal de la Haute-Marne.
Voir aussi, sur E&R : « Écoutes de Sarkozy : Taubira a menti »