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A quoi ressemblerait le premier jour après la sortie de l’euro pour le Premier ministre grec ?

Les dirigeants européens négocient toujours pour trouver une issue à la crise de la Grèce. Dans le magazine britannique Prospect Magazine, Wolfgang Munchau présente les différents scenarii d’une sortie de la Grèce de l’euro.

Plusieurs causes pourraient être à l’origine d’une rupture. D’abord, la Grèce ne parviendrait pas à satisfaire les conditions qui lui sont imposées par ses partenaires européens ou les mesures d’austérités réclamées par la troïka. Elle pourrait aussi échouer à trouver un accord avec les banques. Enfin, un évènement inattendu pourrait se produire, tel que le meurtre d’un diplomate ou même une guerre, civile ou non. Toutes ces causes pourraient la motiver à sortir de l’euro.

Mais légalement, il n’est pas possible de sortir de l’euro : de même que l’Ecosse ne peut sortir de la livre, les pays membres de l’euro ne peuvent en sortir. De ce point de vue, la sortie de l’euro passerait par une sortie de l’UE. Si cette sortie se fait de façon négociée avec les autres pays membres, il est probable qu’une solution pourrait être trouvée pour maintenir la Grèce dans l’UE malgré tout.

Dans le pire des scénarii, le gouvernement grec décide d’en finir avec les contraintes européennes, et de prendre secrètement un train de mesures pour organiser la sortie de l’euro.

- Il devrait probablement attendre un vendredi pour faire passer un décret sans passer par le vote au parlement pour ordonner le départ de l’euro, et la réintroduction d’une monnaie grecque. Il lui faudra probablement agir de manière dictatoriale, et commettre un certains nombres de délits pour faire passer plusieurs lois en force. Il devrait prdonner la fermeture des frontières, fermer les banques pendant plusieurs jours, stopper leurs transactions, et les couper des communications internationales. Peut-être même l’armée et la police seraient envoyées à la rescousse pour contrôler que cette suspension des transactions est bien effective.

Ensuite, il expliquerait à la télévision sa décision. Entretemps, il y aura déjà eu des conséquences définitives à ce départ, et notamment l’effondrement du système bancaire, ce qui coupera l’herbe sous le pied de l’opposition. Ainsi, la sortie de l’euro obligerait probablement à suspendre la démocratie.

Immédiatement, tous les comptes seront convertis dans la nouvelle monnaie nationale, probablement au cours de 1 euro pour une unité de monnaie nationale. En effet, dans l’urgence, il n’aura pas été possible de faire préparer de nouveaux billets et pièces. Il faudrait donc que les banques tamponnent les billets en euro pour les marquer et leur donner leur nouvelle dénomination. Bien évidemment, à l’annonce de la nouvelle, de nombreuses personnes chercheront à transférer leurs fortunes en euros liquides hors de Grèce pour sauver leurs économies, et il faudra maintenir les contrôles aux frontières pour les empêcher de quitter le pays.

Le ministre des Finances grec annoncerait un défaut sur toutes les dettes étrangères de la Grèce, et à partir de ce moment, la Grèce ne recevrait plus aucun financement de l’extérieur. Pour se financer, elle devra prélever des impôts plus importants. Mais comme le pays est en déficit primaire (il est encore en déficit, même si l’on ne prend pas en compte les intérêts qu’il a à payer sur sa dette dans le calcul de celui-ci), il devra également réduire drastiquement les dépenses de l’Etat, à un niveau encore jamais vu jusqu’alors. Cette réduction induira probablement une contraction sur le PIB plus importante que l’effet positif de la dévaluation de la monnaie qui suivra inévitablement. Les banques s’effondreraient probablement, et la banque centrale devrait se porter à leur secours. Le gouvernement devrait probablement surveiller l’évolution des salaires et des prix pour empêcher une flambée de l’inflation. Même si le tourisme devait être stimulé par la dévaluation de la monnaie, ses recettes ne pourraient compenser la chute de la production.

Dans un scenario moins dramatique, la Grèce pourrait négocier les conditions de sa sortie. La zone euro accepterait probablement de continuer à financer le système bancaire grec qui pourrait à son tour maintenir le financement du pays, et permettre une réduction en douceur du déficit primaire. Une sortie consensuelle serait bien préférable à une sortie violente, mais elle sera difficile à obtenir si la Grèce décide d’imposer un défaut. En même temps, sortir de l’euro, sans pouvoir faire défaut, cela n’a pas vraiment de sens.

« Une sortie d’un ou plusieurs pays pourrait être inévitable », conclut Munchau. « Mais elle serait incroyablement désorganisée et au mieux, limite sur le plan légal. Elle créerait une instabilité financière dans le pays et ailleurs. Et elle pourrait déclencher d’autres sorties. Faites-donc bien attention à ce que vous souhaitez ».