Les turbulences augmentent, nous voilà partis pour une étape mouvementée, c’est ce que devrait annoncer notre capitaine. Après quelques fausses turbulences fournies par le bobard médiatique éculé du coronavirus, les choses sérieuses ont commencé à pointer à l’horizon. Tous les signaux convergent vers une grande incertitude et une profonde récession ; vers un substitut de guerre, du point de vue de la finance. Les dirigeants mondiaux ne sont pas encore prêts pour partir en guerre, mais il y a une bulle financière qui demande à éclater, ce qui abaissera la température.
On peut voir cela comme un effet domino. Le virus a miné la production chinoise ; la chute de la production chinoise a fait chuter la demande de pétrole. C’était un très mauvais moment pour les Saoudiens, parce que le prince héritier MBS aborde la bataille décisive pour la couronne contre d’autres princes, en premier lieu le prince Mohammed ben Nayef, l’héritier prévu au départ, fils du frère du roi, et favori de la CIA. Le 6 mars, MBN a été arrêté. MBS pensait que la Russie allait payer pour sa bataille dynastique, et a offert à Poutine un accord pour réduire sa production de pétrole de façon drastique.
La Russie a considéré que ce n’était pas aux Russes d’interférer dans le bras de fer de Ryad, et elle a tout bonnement refusé. Le même jour, à la même heure, le vendredi 6 mars, MBS a ordonné de vendre le pétrole à un prix très bas, dans l’idée de punir la Russie et de ramener Poutine à la raison. Le rouble russe a bu la tasse, tout comme les actions russes. Le dumping du pétrole saoudien avait divisé la valeur du rouble par deux, en 2014, et auparavant, dans les années 1980 cela fut le facteur principal de l’effondrement de l’URSS. Désormais, apparemment, les Russes ont l’impression que leur pays va mieux et peut survivre à la chute des prix. Un pétrole bon marche peut sérieusement saboter la production de gaz de schiste et les États-Unis prévoient de fournir du gaz liquéfié à l’Europe. Les Saoudiens sont désormais le maillon faible ; ils ont besoin d’argent pour maintenir le standing dont leurs citoyens et leurs princes sont coutumiers ; ils ont la guerre du Yémen ; ils ont des querelles dynastiques.
Le lundi 9 mars, les marchés boursiers ont paniqué et l’activité boursière s’est arrêtée un moment, avant de repartir. Dieu sait ce qui se passera ensuite, car les turbulences augmentent. La Chine a apparemment réussi à mater le coronavirus, mais peut-être est-ce trop tard pour que les processus technologiques puissent reprendre leur cours antérieur. Et à en juger par nos médias dominants, l’appétit des Maîtres de l’Univers pour les turbulences a juste connu quelques éclaboussures. Ils en veulent encore plus, et en général ils obtiennent ce qu’ils veulent.
La Syrie après la rencontre
Le pic de turbulence précédent, c’est l’offensive turque en Syrie qui l’a fourni, et c’est la rencontre des deux présidents au Kremlin qui a calmé le jeu en partie. « Les Russes et les Syriens se mettraient probablement d’accord pour une autre trêve si les deux autoroutes M4 et M5 étaient sécurisées par les forces de Damas. C’est le compromis le plus probable qui sera envisagé par Erdoğan et Poutine quand ils se rencontreront », écrivais-je il y a quelques jours. C’est exactement ce qui s’est passé. Après six heures de discussion, Poutine et Erdoğan sont arrivés à un compromis. La M5 reste sous contrôle syrien complet ; la M4 est sous contrôle conjointement de la Turquie et de la Syrie, et toutes les villes reprises par l’armée syrienne durant son offensive récente sont restées entre les mains de Bachar el-Assad.
Le gouvernement de Damas aimerait avoir toute la province d’Idlib, mais il devra attendra pour cela, et en attendant, les Syriens se satisferont de ce qu’ils ont regagné dans deux dures batailles, et de ce qu’ils ont réussi à garder face à la contre-offensive turque. Les Turcs ont combattu de façon très efficace. Les Russes qui ont accompagné les troupes syriennes disent que les Syriens ont été accablés par l’usage talentueux des drones par les Turcs. Les drones ne sont pas visibles, pour les soldats ; ils ne coûtent pas cher, et ils sont mortels. En quelques jours les Syriens ont appris comment parer à cette menace. La force aérienne russe a participé aux batailles en fournissant aux Syriens une couverture aérienne. Pour des raisons tenant à leur image dans la guerre par procuration, les Russes et les Syriens ont préféré minimiser l’engagement russe, et les Turcs y ont consenti.
La bataille était à peu près finie la veille de la rencontre entre les deux présidents, lorsque la police militaire russe s’est positionnée à Saraqi, une ville située à la jonction des autoroutes M4 et M5. Les Turcs ont été immédiatement informés (ou peut-être même au préalable, selon des observateurs locaux) de la nouvelle position russe. Avec Saraqib et les deux autoroutes entre les mains de Damas, les deux objectifs d’Assad se trouvaient atteints, tandis que les frappes turques étaient assez douloureuses pour que les Syriens soient contents du cessez-le feu.
Il s’avère que les rebelles vont devoir évacuer toute la zone qui est au sud de la M4. La pire nouvelle pour eux, c’est l’accord entre Erdoğan et Poutine pour proscrire les islamistes durs. Ce sont les meilleurs combattants, entêtés, fanatiques et déterminés ; et lorsqu’ils sont sous leur feu, les rebelles modérés sont plus qu’enclins à rechercher la paix. Les Américains étaient déçus, et ont bloqué l’approbation par le Conseil de sécurité de l’ONU de l’accord Poutine-Erdoğan. Puis la crise des réfugiés est venue se substituer au confit russo-turc.
L’invasion des réfugiés
Des dizaines (voire des centaines) de réfugiés sont massés sur les frontières européennes de la Turquie, face à la Grèce et à la Bulgarie. Ils tentent de marcher vers le nord, vers les terres promises des Germains et des Scandinaves, en passant par les frontières européennes hors contrôle. Même si le récit politiquement correct officiel les décrit comme des Syriens fuyant le tyran Assad assoiffé de sang, à en juger par ceux qui ont été arrêtés en franchissant une frontière, c’est un mélange de personnes déplacées rêvant d’atteindre l’Europe : Afghans, Somaliens, Iraniens, et même Turcs.
Les Grecs se sont battus courageusement pour défendre les frontières européennes ; l’armée turque a aidé les migrants à forcer les postes-frontières. C’est le bon moment pour revoir entièrement la notion de réfugiés. Peut-être faudrait-il s’en débarrasser complètement, ou du moins la suspendre jusqu’à des jours meilleurs. Si ces gens veulent s’installer en Europe, qu’ils le fassent par les moyens normaux. Qu’ils aillent demander des visas aux ambassades. Après tout, les réfugiés sont des gens qui ne respectent pas la file d’attente, et il n’y a aucune raison d’encourager les resquilleurs.
La Charte des droits de l’homme et les déclarations de l’ONU sur les réfugiés avaient été conçues à une époque bien différente, quand la mobilité humaine était encore faible, comparée à ce que nous connaissons maintenant. On ne pouvait pas s’attendre à voir des dizaines de milliers d’Afghans et de Somaliens marcher sur l’Europe, ou des dizaines de milliers de Latino-américains marcher sur les États-Unis. Ce ne sont pas des réfugiés, ce sont des gens pauvres qui cherchent à améliorer leur sort. Ils constituent une surcharge pour les facilités qu’offre le Nord, et peuvent parfaitement provoquer l’effondrement de celles-ci. L’une des raisons pour lesquelles les think tanks approuvent les migrations, c’est qu’ils estiment à juste tire que c’est le meilleur outil pour en finir avec l’État-providence, cette grande réalisation de la social-démocratie qu’ils détestent.
Au lieu d’accuser les réfugiés et de les traiter de tous les noms, nous pouvons dire : ce sont des gens merveilleux, mais tout est plein au Nord. S’ils voulaient forcer l’accès au concert de Billie Eilish, tout le monde comprendrait la logique : d’accord, ils veulent entrer comme tout le monde, mais il n’y a plus de place, mon frère. C’est bondé ! C’est le cas avec les gens méritants qui veulent vivre dans un pays différent, mieux organisé et plus généreux. Certains voudraient accepter plus de ces « réfugiés » ; il y a eu de grandes manifestations en Allemagne, appelant à leur ouvrir les frontières. Que ces braves gens aillent donc dans les pays d’où ces réfugiés sont originaires et les aident à reconstruire leurs pays. Ce qu’il faut c’est un droit au retour universel. Que tous ces réfugiés de ces dernières années retournent dans leurs patries désertées, qu’ils y ramènent leurs nouvelles capacités, et qu’ils les mettent en œuvre pour le bien de leurs pays. S’il y a une guerre civile, qu’ils rejoignent le camp de leur choix, et règlent leurs différends. Ce n’est pas en fuyant qu’on peut bâtir un avenir meilleur.
L’Europe et les États-Unis peuvent suspendre à titre provisoire toutes les modalités de l’asile. Brandir le signal « plus de place ». C’est plein, passez votre chemin svp. Ce serait la meilleure solution ; peut-être pas tout-à-fait honnête, mais la vie n’est pas juste, nous le savons bien.
L’Occident peut apprendre de la Russie. Ce grand pays plutôt prospère a quelques douzaines de réfugiés en tout et pour tout, pour une raison toute simple ; on ne peut pas être un réfugié d’un pays qui a des relations diplomatiques avec la Russie. La reconnaissance mutuelle signifie que le pays reconnu est un État ordonné avec son propre système légal pour gérer ses propres problèmes. La Russie n’offre pas de services sociaux pour ses réfugiés de toute façon, pas même des pensions. Il y a quelques millions de travailleurs temporaires, mais ils remplissent leur contrat et rentrent chez eux quand ils ont fini. Le système russe est probablement trop strict, mais il fonctionne. On peut en dire autant des pays arabes riches. Personne ne peut trouver refuge en Arabie saoudite ou dans les Émirats, même s’il y a énormément de travailleurs temporaires. Les problèmes juifs dans les années 1930 avaient pour origine la migration non souhaitée des juifs en Europe occidentale. Il y avait assez de juifs en Allemagne, en Autriche et en France ; ils s’en sortaient bien, et ils étaient traités décemment. Mais les juifs de l’Est décidèrent alors de les rejoindre, et cet excédent était excessif pour les autochtones ; ils se rebellèrent, et nous savons que le résultat fut bien triste.
Maintenant l’Europe convient tout à fait aux migrants, mais avec ce nouvel afflux le seau risque de se renverser. Que les Somaliens repartent en Somalie et les Afghans en Afghanistan. Que les Palestiniens retournent en Palestine, car la communauté mondiale devrait forcer les juifs israéliens à faire une place aux Palestiniens chassés et victimes d’un nettoyage ethnique. Les réfugiés syriens devraient également retourner chez eux en Syrie. Le président Bachar el-Assad leur a offert une amnistie, il devraient donc repartir sans crainte.
L’Occident devrait cesser de soutenir les gangs terroristes et permettre aux gouvernements légitimes de reconstruire leur pays. Sans les milliards de dollars américains et européens gaspillés pour détruire, l’Afghanistan, l’Irak et la Syrie ne seraient pas en ruines. Sans les efforts américains pour déstabiliser le Venezuela, ce serait un pays prospère.
Halte aux invitations et invasions, chacun chez soi [et tout ira mieux... peut-être].