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En Cisjordanie, comme chaque année, les colons perturbent la récolte des olives

Les cultivateurs palestiniens, découragés par les violences des colons et l’obligation d’obtenir d’Israël un permis pour accéder à leurs propres oliveraies, finissent par abandonner une partie des oliviers

Oliveraies incendiées, Palestiniens chassés de leurs champs par des colons israéliens armés : la récolte des olives en Cisjordanie a commencé dans un climat empoisonné. Vendredi 15 octobre au matin, Paule Maréchal participait à la cueillette dans le village d’Azmout, près de Naplouse (au nord de la Cisjordanie), quand des colons israéliens de l’implantation voisine d’Elon Moreh ont fait irruption.

« Ils sont arrivés avec des fusils-mitrailleurs et ont commencé à tirer en l’air en s’approchant de nous. Ils criaient : “Dehors ! Dehors !” On a ramassé ce qu’on a pu et on est parti », témoigne cette Française de 57 ans, volontaire de l’association palestinienne Darna.

Chaque année, les collines plantées d’oliviers de Cisjordanie sont le théâtre d’incidents liés à la présence des colons israéliens. « Ils volent les sacs d’olives déjà ramassées, les échelles ou les théières. Parfois, ils coupent ou brûlent les arbres la nuit », ajoute Paule Maréchal.

Devant un cordon de militaires israéliens déployés après l’incident à la sortie du village, la colère monte : « Tous les ans c’est le même cirque, s’indigne Hamdala Afani, un paysan d’Azmout. Les colons descendent sur nos terres. Ils nous frappent et au lieu de les arrêter, l’armée israélienne nous empêche d’aller aux champs. »

Oliviers en cendres

Contacté par téléphone, un porte-parole de l’armée assure qu’un « citoyen israélien a été frappé au visage par des Palestiniens, obligeant les soldats à s’interposer », sans expliquer pourquoi ces résidents d’Elon Moreh se trouvaient à la lisière du village palestinien, à plusieurs kilomètres de leur implantation.

Quelques heures plus tard, un autre incident est signalé : des oliviers appartenant à des Palestiniens ont été incendiés près de l’avant-poste de Havat Gilad, une implantation considérée comme illégale par les autorités israéliennes. Sur place, une épaisse fumée noire s’élève au-dessus du champ. Là encore, un cordon de militaires israéliens barre l’accès, empêchant les pompiers palestiniens d’intervenir. Ceux-ci regardent impuissants. Des Palestiniens tentent d’éteindre les flammes en les frappant avec des branches.

Derrière les militaires, trois colons devisent avec les soldats. Shaher Tawil, le propriétaire d’un champ voisin, assure reconnaître l’un des incendiaires. Ses terres jouxtent l’implantation. « La semaine dernière, quand je suis allé aux olives, les fruits avaient déjà été ramassés. » Pour porter plainte, le paysan palestinien devrait aller au commissariat de police situé… dans une colonie voisine.

Une escorte pendant la récolte

« Les plaintes des Palestiniens sont rarement instruites, ou sont rejetées pour insuffisance de preuve, malgré les photos ou vidéos parfois fournies. Ce sentiment d’impunité est un vrai problème », remarque Catherine Weibel, porte-parole de l’ONG internationale Oxfam, à Jérusalem.

Dans ces zones exposées, à proximité des colonies, l’armée israélienne propose depuis quelques années une escorte aux fermiers palestiniens pendant la récolte. Mais le nombre de soldats israéliens disponibles est trop réduit pour satisfaire la demande.

Ces incidents répétés pèsent sur l’économie du secteur oléicole, pilier de l’agriculture palestinienne et qui rapporte près de 72 millions d’euros par an à 100 000 familles, selon un rapport publié par Oxfam. « La peur des colons et le système de permis obligatoires, imposé par Israël pour les Palestiniens qui veulent accéder à leurs champs d’oliviers, font que beaucoup de cultivateurs abandonnent, las de ces tracasseries, une partie de leurs oliviers », poursuit Catherine Weibel.

Après une heure et demie d’attente, les pompiers palestiniens sont finalement autorisés à éteindre l’incendie. Les colons de Havat Gilad ont imputé l’incendie aux Palestiniens. La police israélienne assure de son côté qu’une enquête est en cours. Mais aucune arrestation n’est intervenue.