Parce que lorsque l’actuel chef du régime [Zelensky], c’est ainsi qu’on peut l’appeler aujourd’hui, a signé le décret, il était un président relativement légitime. Et maintenant, il ne peut pas l’annuler parce qu’il est illégitime. C’est là l’astuce. C’est le piège.
A écouter ! Vladimir Poutine revient sur les négociations de 2022 et fixe les conditions de celles à venir :
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L’analyse de Karine Bechet-Golovko – Règlement du conflit en Ukraine : Poutine met Trump face à ses limites objectives
Hier, le président russe s’est pour la première fois clairement exprimé au sujet des potentiels pourparlers de paix. À ce jour, à part les déclarations médiatiques de Trump, passant de la menace à l’engagement, aucune démarche officielle n’a été effectuée du côté américain. Et comme le rappelle Poutine, la Russie n’a pas d’interlocuteur légitime en Ukraine pour établir un document établissant juridiquement un règlement du conflit. Mais les États-Unis peuvent-ils réellement se permettre un règlement juridique équitable avec la Russie ? Le doute s’installe de plus en plus fortement au fur et à mesure que le temps passe.
La Russie est sans illusion, quant à la volonté – et la possibilité – réelle des atlantistes de négocier de manière équitable une sortie de crise. La tromperie a déjà eu lieu à plusieurs reprises, comme le rappelle le président russe, et c’est une variable dont désormais les Russes tiennent compte. Donc, pour dire les choses clairement, se pose déjà un problème de confiance, qu’il va être difficile de surmonter.
Mais même si la Russie se dit prête à discuter, la question se pose de savoir avec qui. À ce jour, Trump n’a fait que des déclarations politico-médiatiques, aucun contact officiel n’a été établi pour une conversation, par téléphone ou physique, avec Poutine. Et il y a peu de chances que les États-Unis de Trump aient le moindre intérêt à monter à ce point le poids de la Russie sur la scène internationale. Ils veulent plutôt lancer une rencontre Poutine/Zelensky, pour réduire le conflit à un niveau bilatéral et faire oublier l’implication des pays de l’OTAN et le rôle moteur des États-Unis.
Or, Poutine rappelle ici les difficultés juridiques d’une telle approche. Zelensky n’est plus, selon la constitution ukrainienne, légitime. Même si sa légitimité était putative avant cela, même formellement, il est désormais en infraction à la légalité ukrainienne, puisque aucune élection présidentielle n’a été organisée au terme de son mandat. Il est à ce sujet surprenant que les atlantistes n’aient pas mis en place au moins un simulacre d’élection, ils savent parfaitement le faire quand nécessaire. De quoi ont-ils eu peur ?
Ainsi le président russe de préciser que si Zelensky, malgré son décret interdisant toute négociation, veut quand même discuter, Poutine pourra déléguer quelqu’un pour aller lui parler. Bref, aucune discussion bilatérale n’est envisageable, car ce n’est pas le processus qui intéresse la Russie, mais le résultat. Et le président russe de justifier : il n’est pas compétent pour signer un quelconque acte juridique. Donc, cela ne présente aucun intérêt, car le processus de paix serait entaché d’irrégularité.
Autrement dit, la Russie ne se contentera pas de quelques promesses orales, elle veut une reconnaissance juridique. Ce qui implique l’intervention d’une personne compétente pour cela.
Et c’est bien l’impasse des atlantistes :
1) Trump ne peut se permettre un grand sommet comme à Yalta, les atlantistes ne peuvent donner ce poids à la Russie sans que les États-Unis perdent du leur. Or, Zelensky est incompétent pour tout règlement juridique de la situation.
2) La Russie, s’il y a des pourparlers de paix, veut qu’un document juridique établisse les conditions de cette paix. Une reconnaissance de fait, qui sera violée dans les 24 h, ne l’intéresse pas. Or, les atlantistes ne peuvent reconnaître juridiquement les nouvelles frontières de la Russie, car le monde global ne peut que s’agrandir, il ne peut pas reculer sauf à s’effondrer.
Poutine met Trump face à ses limites objectives : s’il veut réellement la paix, il lui faudra sortir du paradigme atlantiste. Nous arrivons au moment de vérité et à la fin de l’hypocrisie américaine. En attendant, que Trump continue à combattre la dimension wokiste de la globalisation, cela servira tout le monde et affaiblira ce système. Mais ici aussi, il est confronté à des résistances juridiques très fortes, à l’intérieur même du système américain. La réalité rattrape la communication.