J’ai découvert incidemment en commentaire (merci encore d’enrichir autant cet espace de discussion d’ailleurs), une très intéressante étude de l’Ifop (Institut français d’opinion publique).
Je ne savais pas que cet institut de sondage était le plus ancien du pays, et surtout qu’il avait été créé en 1938 – et donc qu’il avait réalisé des sondages forts intéressants dans la période 1938-1945 dont, hélas, beaucoup ont été détruits par son fondateur Jean Stoetzel lors de l’occupation.
On apprend ainsi deux choses intéressantes.
Les accords de Munich :
À la suite de la signature des accords de Munich le 29 septembre 1938 par la France, la Grande- Bretagne, l’Italie et l’Allemagne, Jean Stoetzel réalise le tout premier sondage politique : 57 % des personnes interrogées déclarent approuver ces accords tandis que 37 % les jugent néfastes. [...]
Les autres questions posées dans cette enquête apportent des éléments de compréhension sur l’état d’esprit d’un peuple pris entre deux tensions qui s’avèreront contradictoires. D’un côté, figure la crainte d’un nouvel embrasement mondial, vingt ans seulement après la fin de la Grande Guerre, qui explique cette recherche du compromis avec l’Allemagne nazie et pour finir le « lâche soulagement » après Munich. Pour 73 % des personnes interrogées, une nouvelle guerre mondiale entraînerait la destruction de la civilisation.
De l’autre côté, le sondage de l’Ifop montre que le renoncement de Munich s’accompagne désormais de fortes résolutions pour l’avenir. À la question « pensez-vous que la France et l’Angleterre doivent désormais résister à toute nouvelle exigence de Hitler, 70 % des Français répondent oui, 17 % manifestent leur opposition. Cette adhésion à l’idée que Munich doit être une sorte de « der des der » face à la politique d’expansion du Führer est majoritaire dans tous les segments de la population, à l’exception des professions libérales ainsi que des commerçants et des industriels interrogés rejetant à plus des deux tiers l’idée qu’il faut résister à toute nouvelle exigence allemande. [...]
Pour autant, même après l’invasion allemande de la Bohème-Moravie, les Français, tout en prenant la mesure des menaces extérieures, refusent dans leur majorité de croire à la guerre. Seuls 37 % des personnes interrogées par l’Ifop en mai 1939 estiment que le pays sera inévitablement entraîné dans une guerre en 1939 ou en 1940 (63 % ne le pensent pas ou se disent sans opinion). Ce n’est qu’en juillet 1939 soit moins de 40 jours avant l’invasion de la Pologne par l’armée allemande et la déclaration de guerre de la France et de la Grande-Bretagne à l’Allemagne que l’on assiste à un basculement relatif de l’opinion : 45 % des interviewés (contre 34 %) pronostiquent une guerre dès 1939.
76 % considèrent que « si l’Allemagne tente de s’emparer de la ville libre de Dantzig par la force, nous devrons l’en empêcher au besoin par la force ». L’opinion était désormais prête à mourir pour Dantzig.