En 2013, Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, a distribué la majeure partie des crédits de la réserve ministérielle. En n’oubliant pas ses amis.
« Valls garde toujours un regard sur Évry (Essonne). Il a un lien fort avec sa terre d’élection. Dès qu’il peut, il y est. » Ancien président du conseil départemental de l’Essonne, Jérôme Guedj (PS) sait de quoi il parle. Pas étonnant dès lors que le bastion politique du Premier ministre ait été bien traité par le ministère de l’Intérieur en 2013. Cette année-là, près de 220 000 euros de crédits ministériels ont été distribués à des collectivités de l’Essonne sur instruction du cabinet de Manuel Valls.
À l’époque, l’actuel chef du gouvernement et ses collaborateurs avaient la main sur la majeure partie de la réserve ministérielle. Pendant gouvernemental de la réserve parlementaire, cette enveloppe, dont le montant peut varier d’une à plusieurs dizaines de millions d’euros par an, est budgétée sur une obscure ligne de crédits du ministère de l’Intérieur. Officiellement, l’argent est destiné à venir en aide aux communes en difficulté. Mais dans les faits, la cagnotte, gérée derrière les grilles des ministères, est surtout répartie entre des collectivités chères aux élus proches du pouvoir.
En 2013, d’après nos informations, sur les 13,4 millions d’euros de la réserve ministérielle, 10,1 millions ont été distribués par Beauvau. Et 9,1 millions d’euros ont soutenu des projets montés par des élus encartés au Parti socialiste. C’est ainsi que le sénateur PS et maire d’Alfortville Luc Carvounas, un proche des proches du Premier ministre, a décroché une subvention de 180 000 euros pour les travaux de grosse réparation d’une église dans le Pas-de-Calais. « Les élus savaient que j’étais proche de Valls. Je recevais des centaines de demandes. J’étais devenu une sorte de superpréfet », raconte-t-il.
Très chère Essonne
En Essonne, Francis Chouat, qui a succédé à Manuel Valls à la tête d’Évry et de sa communauté d’agglomération, a obtenu pour sa part 100 000 euros pour la création d’un marché forain dans son centre-ville.
« Je ne vais pas faire celui qui ne connaît pas Manuel Valls. Mais Évry fait partie des communes socialement les plus pauvres de France », se justifie Francis Chouat, qui a été réélu maire en 2014. À quelques kilomètres, Irène Maggini, autre élue PS de la communauté d’agglomération d’Évry, a elle aussi décroché une subvention pour sa ville de Villabé : 40 000 euros pour le centre communal d’action sociale. Un coup de pouce qui n’a cependant pas empêché Irène Maggini de perdre la mairie aux dernières élections municipales.
Plus étonnantes, en revanche, sont les subventions attribuées en 2013 à Thierry Mandon, alors député de l’Essonne et porte-parole du PS à l’Assemblée. L’actuel secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur a décroché deux subventions : l’une de 40 000 euros pour le remplacement des menuiseries de l’hôtel de ville de Soisy-sur-Seine, et l’autre du même montant pour « la sécurisation et la restauration des toitures de l’habitation et des écuries de la ferme de Jarcy » à Varennes-Jarcy.
Manuel Valls et Thierry Mandon, longtemps rivaux au sein de la communauté d’agglomération d’Évry, avaient-ils enterré la hache de guerre en 2013 ? « La voix de Thierry Mandon était devenue essentielle pour que la gauche puisse garder la main sur le conseil communautaire », affirme un élu de l’Essonne. Interrogé par Le Point.fr, Thierry Mandon nie avoir fait remonter des demandes de subventions auprès du gouvernement.