Les créations d’emploi servent d’argument ultime aux promoteurs des grands projets jugés « inutiles et imposés » par leurs détracteurs. Le nouvel aéroport de Notre-Dame-des-Landes, la ligne à grande vitesse Lyon-Turin, les centres commerciaux géants en Île-de-France, ou encore le Center Parcs de Roybon en Isère, seraient un moyen de lutter contre le chômage. Focalisé sur la quantité d’emplois créés, le débat occulte certaines questions incontournables, comme le devenir des terres agricoles, la qualité et la durabilité des emplois de demain, mais aussi et surtout la pertinence d’un modèle économique à bout de souffle.
Dans un contexte de chômage de masse, le nombre d’emplois créés est souvent le premier argument dans les plaidoiries des promoteurs de grands projets contestés, qualifiés d’« inutiles et imposés » par leurs opposants. C’est le cas à Notre-Dame-des-Landes, où l’État et son prestataire, le géant du BTP Vinci, tiennent, plus que jamais, à installer un nouvel aéroport. Également en Isère, où Pierre & Vacances projette la construction d’un Center Parcs en pleine zone humide. Ou encore à Gonesse, en région parisienne, cible d’un projet immobilier pharaonique du groupe Auchan. Et en Savoie pour la future ligne à grande vitesse (LGV) entre Lyon et Turin. Face aux critiques et aux coûts exorbitants de ces projets, le nombre d’emplois qu’ils sont censés générer sert souvent d’argument ultime à leurs défenseurs.
La taille hors norme de ces infrastructures destinées au transport, au commerce ou aux loisirs de masse facilite il est vrai les effets d’annonce, quitte à revoir les chiffres à la baisse sous le feu des critiques déployées par leurs adversaires, au fur et à mesure que ces derniers s’approprient les dossiers et constituent leur propre expertise. Données artificiellement gonflées, emplois précaires et sous-rémunérés, destruction d’emplois chez les concurrents du même secteur..., de Notre-Dame-des-Landes à Roybon, les subterfuges dénoncés sont nombreux. Et mettent à mal la vision de grandes infrastructures nécessairement favorables au développement économique et à l’emploi. Travail illégal ou emploi de travailleurs détachés très bon marché sont monnaie courante sur ces grands chantiers, comme l’a déjà illustré ce qui s’est produit pour la construction du réacteur nucléaire EPR à Flamanville (lire notre reportage « EPR : un chantier aux conditions de travail déplorables », ainsi que nos articles plus récents ici et là).