C’est une enquête de Mediapart, bien à charge, comme il se doit. Bolloré n’est plus visé à travers Hanouna puisque celui-ci quitte le groupe Canal+ et la chaîne C8, censurée par l’Arcom (donc Macron), pour le groupe M6, plus précisément la chaîne W9 et la station Fun Radio. L’article étant payant, nous allons le résumer.
« On n’a rien compris à Cyril Hanouna si on ne saisit pas que c’est un homme de pouvoir. Un mec de pouvoir animé par le pouvoir. »
Philippe Moreau Chevrolet, auteur d’un livre sur le phénomène
L’émission phare d’Hanouna, TPMP !, a été attaquée de partout, comme toutes les émissions qui marchent à la télé. C’est l’éternel débat du populisme, de la qualité, de l’éducation et tout le tintouin. La critique, bonne et mauvaise, est la rançon du succès. Marlène Schiappa a un jour défendu Hanouna, alors dans la tourmente, en invoquant un « mépris de classe ».
Avant lui, Dechavanne, Delarue, Ardisson, Fogiel sont passés à la moulinette médiatico-politique, ce qui n’a pas empêché les politiques de s’y presser, histoire de faire de l’audience. Même si c’est l’émission, son animateur et son principe qui font l’audience, pas les hommes po.
« Cyril pèse dans le débat politique et tous les politiques veulent venir. »
Lionel Stan, directeur général de H2O Productions
Tous les lecteurs de R&R sont au courant des méthodes parfois musclées de Cyril, qui intimide ses chroniqueurs, authentiques larbins tenus par le fric, et parfois des invités récalcitrants, ou bien trop caustiques. On pense à Juan Branco ou Julien Cazarre, ce dernier ayant été menacé par téléphone.
Plusieurs enquêtes ont raconté en détail la violence du système Hanouna, obsédé par lui-même, ses audiences et l’idéologie de Vincent Bolloré. Plusieurs personnalités – Alain Chabat, Julien Cazarre, Nikos Aliagas, Michel Cymes, Yann Barthès, Arthur… – ont été menacées ou insultées sans que Cyril Hanouna soit jamais inquiété. Confronté, l’ancien de France 4 passé sur C8 a toujours assumé et tout minimisé. Et hier comme aujourd’hui, ses anciens chroniqueurs, ses cibles ou ses détracteurs, restent terrorisés à l’idée de parler.
« Vous ne savez pas qui est Cyril Hanouna, qui sont ses amis, de quoi ils sont capables, à quel point il fait peur à tout un tas de gens », prévenait l’un d’entre eux en 2021 lorsque Le Monde enquêtait sur lui. « Je préfère vraiment rester éloigné de Cyril et de sa bande, ne me citez jamais », implore à Mediapart l’un de ses anciens chroniqueurs. « Lui ne me fait pas peur ; après, tout son groupe, toute son organisation, je sais qu’ils sont capables de coups fourrés », confessait même le rappeur Booba, interrogé par Complément d’enquête en 2023. (Mediapart)

Complément d’enquête, Le Monde ont enquêté sur la bête. En général, on retient des méthodes d’intimidation en interne et en externe. Tout ce qui pourrait nuire à l’image de Cyril, pourtant pas merveilleuse, est écrasé dans l’œuf. Ceux qui ont quitté l’émission, de gré ou de force, ne parlent pas. Dans le monde de la télé, on signe des documents de non-divulgation (la fameuse clause de confidentialité), même après coup, surtout pour l’après coup. L’argent achète tout, dont le silence.
Seuls ceux qui n’ont pas participé à TPMP ! peuvent parler, mais pour cela, ils doivent avoir accès à des témoins qui se ferment comme des coquillages à l’approche d’un prédateur.
- La meute soumise
Depuis que Cyril a des ambitions présidentielles, il a durci son jeu. Pas question qu’un chroniqueur malheureux vienne faire foirer la campagne. Mediapart a déniché deux insoumis, Mathieu Delormeau, l’homo de l’émission, et le manager de Malik Benthala, qui s’est fait tabasser dans les loges de l’émission. On dirait presque la résurgence du conflit israélo-palestinien dans les coulisses...
Ozap a évoqué le règlement de comptes, qui date de 2019. L’affaire a été classée en 2021.
Hanouna, lui, après quelques saisines et amendes, poursuit sa progression. Sa boîte de prod H2O – montée avec Yannick, le fils Bolloré – pèse 43 millions de CA par an, et fait toujours partie du groupe Banijay de Stéphane Courbit, le grand manitou de la télé. En 2015, alors que sa carrière patine, Cyril reçoit un chèque de 250 millions de Bolloré pour cinq ans d’émissions, avec quotidiennes et rediffusions. Le Monde écrit :
C’est à cette période, d’après plusieurs de nos interlocuteurs, que l’animateur « devient un autre homme et pète les plombs », selon l’expression d’un haut responsable d’une chaîne de télévision concurrente. « Il était sympa, généreux, et là, il est devenu par moments cassant, très colérique surtout. » À Europe 1, qu’il quitte en juin 2016 au bout de trois années de présentation des « Pieds dans le plat », il ne laisse pas que de très bons souvenirs : « Quand on est dans son équipe, on est sous son emprise, se souvient un de ses anciens collaborateurs. C’est Versailles sous l’Ancien Régime, la contestation n’y a pas sa place. »
Après, selon son expression préférée, il part en sucette. C’est à partir de là qu’il commence à menacer ceux qui n’obéissent pas ou qui ne veulent pas venir dans son émission.
Fort du soutien du milliardaire breton, Cyril Hanouna se croit-il devenu intouchable ? Toujours en 2016, le journaliste indépendant Arnaud Ramsay retweete un article de France Football dans lequel l’humoriste Julien Cazarre explique avoir refusé la proposition d’Hanouna de travailler avec lui. Assommé de SMS de l’animateur et de messages vocaux menaçants, Cazarre dépose une main courante. Ramsay, qui intervient alors régulièrement dans « 20 h foot », sur i-Télé (devenue CNews), se fait aussi insulter au téléphone. « Je vais venir te défoncer, tu ne sais pas qui je suis. Viens qu’on s’explique. T’es fini ! », lui assène Cyril Hanouna. (Le Monde)
Le Monde avait déjà tout dit, en 2021. L’article de Mediapart, qui cherche toujours la petite bête immonde, l’a finalement trouvée avec la voyoucratie.
« Bosser pour Cyril, c’est bosser dans un univers extrêmement violent », pointe un ancien chroniqueur. Au fur et à mesure des années, l’animateur s’est d’ailleurs transformé. « Cyril a quelque chose de l’ordre de la fascination pour la voyoucratie, décrypte une ancienne de H2O. Il se comporte comme un voyou, s’habille comme un voyou, car il fantasme dessus depuis qu’il est jeune. »
L’ancien humoriste confidentiel de la chaîne Comédie est désormais un millionnaire puissant et violent. Il menace et insulte à l’antenne mais ne fait plus un pas sans toute une armada de gardes du corps. Peu à peu, il a aussi troqué ses chemises colorées, ses cravates et son côté clownesque pour un tout autre style. Celui « d’un voyou », qu’il revendique lui-même être dans plusieurs messages consultés par Mediapart.
« Je le nique ! Il faut pas qu’il joue les chauds avec moi il fait le malin mais c’est un bouffon. G un mot à dire et demain on le retrouve dans un coffre ! Il sait pas qu’on joue pas dans la même cour maintenant. Je le baise », écrit-il par exemple en 2018 dans un SMS visant une personnalité avec qui il était en litige. « Si un tel message devait exister (ce qui est contesté), il ne pourrait être divulgué sans contrevenir aux dispositions qui imposent le secret des correspondances privées », conteste son conseil Stéphane Hasbanian. (Mediapart)
Le boss d’H2O est devenu un boss, un capo. Il domine son sujet et ses sujets en plateau. Tout le monde tremble, de peur de perdre sa pige qui oscille entre 500 et 1 500 euros l’émission. Ça vaut bien une soumission ! Mais parfois, ça va trop loin, surtout si c’est le boss qui fixe les limites.
« On est dans la rue tous les deux comme ça, je te mets en sang. Je te le dis. »
Cyril Hanouna à Matthieu Delormeau, hors antenne, le 13 février 2023
Heureusement, certains ne prennent pas ces insultes au sérieux, comme Thomas Guénolé.
« Quand j’y vais, je connais la mécanique. Si Cyril n’est pas d’accord avec moi, il peut me rentrer dedans. »
Ça nous rappelle le dicton du Pr Choron : le lâche, quand on lui chie dans les bottes, il dit que ça lui fait chaud aux pieds.
Voilà, c’est la énième charge anti-Hanouna, qui avance dans le PAF comme un bulldozer. Gageons qu’il évitera les pièges de ses ancêtres, les Ardisson, les Delarue, les Dechavanne, qui étaient les rois du pétrole un jour et plus rien le lendemain.
Les politiques les courtisaient, tout le monde leur baisait la main, la bague, et puis un jour, paf, le pétage de plombs, le poisson dans l’avion. Aujourd’hui, Ardisson est à la retraite, de temps en temps Salamé le ressort de son tombeau pour faire un peu d’audience, car le vieillard balance ; Dechavanne, lui, est devenu chroniqueur, chez Salamé justement, mais, pour des raisons assez nébuleuses, il a rendu son tablier. On a une petite idée, mais on ne la dira pas.
@CDechavanne annonce officiellement son retrait de l’émission, après deux saisons aux côtés de @LeaSalame et de toute l’équipe de #QuelleEpoque.
Merci Christophe pour ces deux années à nos côtés. pic.twitter.com/X2eji5ZE8y
— Quelle Époque ! (@QuelleEpoqueOff) March 1, 2025
Raison officielle bidon, évidemment. On rappelle que c’est Dechavanne, alors défendu par Me Ennochi et produit par Courbit, qui a refilé Ennochi à Delarue, un avocat qui est aujourd’hui à la défense de Brigitte. On dit ça, on dit rien. Y a comme un axe, mais du bien, heureusement.
Tout ça pour dire que les capos, comme dans le film The Irishman, finissent souvent dans le caniveau. Tous les protagonistes de cette histoire vraie, fictionnée par le grand Scorsese, ont fini criblés de balles.
Pour aller plus loin que @Mediapart afin de savoir de quoi est fait Cyril HANOUNA - ce chaînon manquant entre Marco MOULY et Alain MINC.
N°517 + N°518
Retrouvez le Portrait de Cyril HANOUNA en 2 parties sur https://t.co/v5uHuNIjIu pic.twitter.com/AK26NxgJiH— Faits & Documents (@faitsetdocs) March 18, 2025