La version atlantiste
L’opposition au président vénézuélien Nicolas Maduro a de nouveau manifesté samedi à Caracas, trois mois jour pour jour après le début de la vague de protestation dans laquelle 89 personnes ont péri.
Environ 3000 personnes ont convergé vers l’autoroute qui traverse la capitale pour manifester leur soutien à Luisa Ortega, la procureure générale du pays qui, d’inébranlable partisane du chavisme – du nom de Hugo Chavez, président de 1999 à son décès en 2013 – est devenue l’une des plus dures critiques du président Maduro, héritier de Chavez.
Les autorités vénézuéliennes affirment qu’au moins quatre personnes ont été tuées et huit ont été blessées lors de manifestations anti-gouvernement dans la partie centrale du pays.
Luisa Ortega Diaz a confirmé samedi que quatre personnes sont mortes vendredi dans des affrontements à Barquisimeto. Selon le maire de la ville, les milices armées qui soutiennent le gouvernement socialiste du Venezuela seraient responsables de ces morts.
Mme Ortega est privée de sortie du territoire, ses biens ont été placés sous séquestre, et elle doit comparaître mardi devant le Tribunal suprême de justice (TSJ, Cour suprême). Le TSJ, que ses détracteurs accusent de servir le gouvernement, devra décider si la procureure générale peut être traduite en justice.
« Tout le monde dans la rue pour empêcher et dénoncer cette manœuvre », a écrit sur Twitter Freddy Guevara, vice-président du Parlement, la seule institution vénézuélienne contrôlée par l’opposition.
L’action en justice contre Luisa Ortega a été lancée par le député Pedro Carreno, un partisan du président Maduro.
M. Carreno assure que la procureure a « menti » en disant qu’elle n’avait pas approuvé la nomination de 33 magistrats, désignés selon elle irrégulièrement par le précédent Parlement à majorité chaviste, en décembre 2015.
« Terrorisme d’État »
De son côté, Mme Ortega accuse M. Maduro d’avoir imposé un « terrorisme d’État », en raison des violences exercées par les forces de l’ordre contre les manifestants.
La procureure est également hostile à la convocation par M. Maduro d’une assemblée constituante chargée d’élaborer une Constitution devant remplacer celle qui a été adoptée sous la présidence de Hugo Chavez.
Mme Ortega juge inacceptables certaines des modalités du processus de désignation des membres de l’assemblée constituante prévues par le camp de M. Maduro.
« Nous devons nous organiser pour éviter l’élection de cette constituante », a déclaré au cours de la manifestation un député de l’opposition, Carlos Paparoni.
Mme Ortega a remercié les manifestants de leur soutien. « Votre confiance renforce notre lutte institutionnelle. La défense de la Constitution est la tâche de tous », a-t-elle déclaré sur Twitter.
Initialement, Mme Ortega s’était démarquée pour la première fois du pouvoir de M. Maduro en dénonçant une rupture de l’ordre constitutionnel provoquée par des décisions du TSJ réduisant les pouvoirs du Parlement.
« Cette constituante, personne ne la soutient. Ils peuvent l’approuver, mais nous, nous restons dans la rue et nous poursuivons la défense civile », a déclaré à l’AFP un manifestant, Alejandro Garcia.
Le mouvement de protestation contre M. Maduro a commencé le 1er avril et se traduit par des manifestations quasi-quotidiennes.
Le bilan des violences qui l’accompagnent est passé samedi à 89 morts. Selon le parquet, quatre personnes sont mortes vendredi lors de manifestations organisées à Barquisimeto, une ville située à 350 kilomètres à l’ouest de Caracas.
Au cours des trois derniers mois, « le plus important, c’est qu’une prise de conscience a eu lieu : nous devons tous mener bataille pour rétablir la démocratie », a déclaré à l’AFP Patricia Valenzuela, médecin de 43 ans, rencontrée dans le cortège samedi à Caracas.
Le mouvement de colère populaire survient dans un contexte d’effondrement économique du pays pétrolier, ruiné par la chute des cours du brut, ce qui se traduit par de graves pénuries et une inflation galopante.
La réalité
La droite accélère le temps, resserre chacune des variables, tente de briser la corrélation de forces, veut le coup d’État. Elle l’a annoncé : elle a les mois de juin et de juillet pour atteindre son objectif. Elle a expliqué que, sur base de l’article 350 de la Constitution, elle refusera de reconnaître le gouvernement, l’élection d’une Assemblée constituante et organisera une riposte violente pour empêcher la population d’exercer son droit au suffrage le 30 juillet.
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La droite possède une force suffisante pour imposer la terreur à des localités pendant plusieurs jours, attaquer des casernes et des commissariats, déclencher une haine politique et de classe qui a fait du lynchage de chavistes une pratique récurrente, maintenir des mobilisations presque quotidiennes avec un nombre relativement stable, générer des situations qui peuvent se transformer en destructions et pillages presque-généraux, mener des incursions à travers des bandes de délinquants dans les quartiers populaires pour y monter des barricades, attaquer avec des grenades des institutions de l’État, faire plier certains cadres du chavisme comme la Procureure Générale de la République pour la faire passer de son côté, assassiner des personnes et arriver à faire croire à une partie de la population qu’elles ont été tuées par le gouvernement [1].
Elle peut tout cela et dans les jours prochains nous verrons, ce dont elle est capable en plus de tout cela. Il lui manque cependant deux éléments nécessaires au succès d’un coup d’État : des quartiers populaires mobilisés derrière ses appels, et une fracture des forces armées. Le défi central sur lequel elle travaille avec le plus de force aujourd’hui est d’obtenir cette fracture tant dans les forces armées que dans d’autres secteurs du gouvernement. Elle en a besoin pour surmonter le match nul qu’on vit depuis des mois. C’est pour cela qu’elle augmente le niveau de violence, qu’elle focalise les attaques contre les corps de sécurité, assassine des policiers et des gardes nationaux, et use de la terreur comme méthode de contrôle social [2].
L’appui états-unien est déjà en marche à travers la pression internationale (OEA, médias..) et le financement de la droite, soit directement aux partis soit indirectement à travers des ONG qui canalisent cet argent pour soutenir les pressions violentes dans la rue et l’entraînement de cellules paramilitaires. L’intervention existe déjà, sous les cordes. Prendra-t-elle une autre forme ?
La droite accélère le tempo mais, en même temps, ne peut cacher son désespoir. Elle détruit, tue, réussit des « coups » sans atteindre l’objectif final. Elle accède a des objectifs intermédiaires tels que soumettre des localités entières a la violence, déconstruire des liens sociaux, légitimer la persécution – qu’elle a planifié dans son projet si elle redevient gouvernement – contre le chavisme à tous les niveaux. Au cours des mois le pays change, assimile de manière invisible les coups, la haine, la peur, la méfiance, éléments à la « colombienne » dont la droite a besoin pour tenter son plan de remise à zéro violente du pays.
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