Hollande-Thatcher même combat
Le bras de fer entamé entre la centrale syndical numéro un – la CGT – et le gouvernement, rappelle le conflit qui a opposé les mineurs britanniques à la gouvernante Thatcher dans les années 80.
À l’époque, le libéralisme, qui n’a pas encore fait les dégats que l’on sait, est à la mode. Reagan aux États-Unis, qui a remplacé le dérangeant Carter pour l’État profond, joue la carte du renouveau américain tous azimuts : en économie, en géopolitique, et en matière financière. Il s’agit d’abattre l’Union soviétique, d’inonder le monde de dollars (et de dette US), et de briser les barrières morales qui limitent le profit. Les groupes s’entredévorent, la Bourse américaine explose, les fortunes croissent à un rythme hallucinant, la gueule de bois est pour bientôt mais Reagan s’en fout, il a arrosé les gagnants. L’Amérique perdante n’a pas voix au chapitre.
De l’autre côté de l’Atlantique, chez la vieille Angleterre, la grève des mineurs durera un an, de mars 1984 à mars 1985. Les gueules noires luttaient contre la fermeture des mines déclarées non rentables. La première grande attaque du libéralisme. Derrière le combat de la dominance contre les mineurs, se profilait le combat à mort contre les syndicats, qui étaient très puissants outre-Manche. Les grévistes se heurteront aux forces de l’ordre, et seront criminalisés. Des centaines seront envoyés en taule, deux mourront dans les heurts. Après un an de résistance, de privations et de coups, les mineurs retourneront dans les dernières mines, vaincus. Ce sera la fin du mouvement ouvrier anglais. On peut dire que la gauche « industrielle » a perdu, ce jour-là. Chez nous, le basculement libéral aura lieu sans trop de violence, en 1983, par un coup de Jarnac « socialiste », sous la houlette de Jacques Delors, qui fera plier Pierre Mauroy, le dernier Premier ministre de gauche.
On dirait que c’est maintenant (après le mouvement social de 1995) que la France prend vraiment conscience des dégâts du libéralisme, et qu’elle tente de réagir. Mais la camisole européiste et le corset mondialiste ne lui laissent plus trop de liberté(s).
Ah bon ? Les HP c’est pas 5 étoiles ?
Un autre secteur qui souffre, en silence, du libéralisme, ou de la rentabilité, ou qui pâtit de n’être pas rentable, c’est la psychiatrie. Dans un rapport qui vient de tomber, et qui n’étonnera que les naïfs, « le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (un truc bien français, ça, qui sent le zéro pouvoir à plein nez), dénonce les abus de pratiques de maltraitance dans certains établissements de santé mentale ». Son job est de veiller à ce que les droits de l’homme soient appliqués dans les HP. La grosse rigolade.
Le monsieur découvre que « les pratiques de contention et d’isolement sont banalisées ». Quelle découverte. A-t-on besoin d’un « CGLPL » pour ça ? Les fonctionnaires qui travaillent dans ces établissements ont vu leurs effectifs tellement fondre sous la férule libérale, que parfois, une infirmière se retrouve avec 20 ou 30 patients, la nuit. Si ces derniers ne sont pas tous dangereux (pour ça il y a les UMD, unités pour malades difficiles, c’est-à-dire dangereux, ces HP pour HP), parfois ils peuvent péter un boulon.
Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite, dans ce secteur d’activité, a fait très mal. Les HP, en France, on n’en parle que quand une infirmière se fait agresser, sinon, on les planque sous le tapis. C’est l’affaire des familles. Mais aussi de tout le monde, parce qu’aujourd’hui, ceux qu’on appelle les fous, se retrouvent de plus en plus dans la rue. Normal, plus assez de places, de lits, de budget. Allez hop, dehors mon gars, et débrouille-toi. Si ça va pas, tu prends tes médocs, t’oublies surtout pas, et tu vas voir le psy dans le CMP (centre médico-psychiatrique, pardon, psychologique) de ton quartier, mais tu nous fais pas chier, OK ? C’est pour cela que quand vous prenez le métro, ou le TER, parfois, y a un mec qui délire, un schizo qui part en sucette, et qui terrorise tout un wagon de bourgeois. C’est ça, le libéralisme. C’est très concret, n’est-ce pas.
Le libéralisme est comme un boomerang : tu crois balancer le problème (la pauvreté, la folie) très loin, mais il te revient deux fois plus fort dans la gueule.
Appelez-moi à nouveau France
Heureusement, y a pas que des mauvaises nouvelles. Aujourd’hui, Macron sort son cor de chasse et souffle un immense cocorico qui fait trois fois le tour de la terre. Les chantiers navals de Saint-Nazaire (ceux du Havre étant bloqués par les soviets), qui viennent de mettre à l’eau le plus grand paquebot du monde, le Harmony of the Seas, ont touché trois monstrueuses commandes. On aurait préféré l’appeler Harmonie des Mers – mais on ne fera pas la fine bouche, pour une fois, fierté nationale oblige –, un bijou destiné à l’international, pour les Américains de la Royal Carribean Cruises.
362 mètres de long, 66 de large, dans les 3 000 passagers, une ville-monde. Des pistoches, des restaus en veux-tu en voilà, des robes longues et des smokings. Et aussi, comme dans toute entreprise navigante qui se respecte, un gros paquet de Philippins sous-payés. Mais ne gâchons pas la fête avec de basses considérations sociales : le bourgeois a le droit de jouer à l’aristocrate, une fois dans sa vie, car ça fait briller les yeux de Madame, et ensuite, elle est très reconnaissante, dans la cabine. Enfin, c’est ce que les croisiéristes vendent. Du romantisme, du dépaysement, du luxe abordable parce que les coûts sont réduits à cette immense échelle.
L’étoile de la France resplendit à nouveau sur tous les océans du globe. Parce que attention, on possède le second domaine maritime du monde, et demain, ça risque de compter. Pas demain vendredi 27 mai, mais demain, « dans le futur ». Eh oui, malgré tous les déclinistes (« la France est foutue », « on est nuls », « on est antisémites », « on est racistes », « bouhouhou Vichy »), la France est un beau pays, gâché provisoirement par une bande de vandales incultes, certes, mais ces chacals passeront, la France leur passera dessus. Il faut être patient.
En espérant que le Harmonie of the Mers ne shootera pas dans un glaçon comme ce crétin de Titanic, à cause d’un commandant qui se prenait pour le Roi des Mers. On a même vu des naufrages à cause de fiestas dans la cabine de pilotage, avec des femmes de petite vertu et un capitaine qui lance des défis du genre « on va frôler la côte » (Costa Concordia).
C’est un peu ce que Hollande fait avec sa bande de truffes, soit dit en passant.