Lecteurs et écrivains de la francophonie, réjouissez-vous car le Salon du Livre 2008 a ouvert ses portes, avec comme grand événement la venue de l´éminentissime écrivain et critique littéraire du tout Paris, le dénommé Shimon Peres, l´homme qui sait jongler entre un bon bouquin de Jabotinsky et un raid aérien sur Gaza...


On avait des doutes, on peut désormais en être sûr, l’année 2008 sera placée sous le signe de David.

Après le souvenir mortifère de la Shoah imposé au gamins de CM2, le diner du CRIF présidentiel, le coming-out kabbaliste des bracelets rouges à la télévision, voici que la littérature reprend tout son sens politique au travers d´un Salon du Livre placé sous le signe de l´intifada. Seul hic au tableau, cette année, la politique sera exclusivement sioniste et à sept branches.

Non pas que les descendants de Salomon soient, ou furent, de piètres écrivains, bien au contraire, ce qui pourrait en soi justifier un tel parrainage, mais l´ennui réside surtout dans le fait que la quasi-totalité des écrivains se déclarant héritiers de la tradition littéraire judaïque, ou désignés comme tels, sont tous de fervents sionistes engagés, ou a défaut, de fabuleux pisse-tordu dès qu’il agit d´avoir un avis objectif sur la question palestinienne.


Ainsi, plus qu’un traditionnel Salon du Livre déjà bien entâché depuis de nombreuses années par la politique totalitaire et ultralibérale de l´Édition, qui a progressivement remplacé tous les libres penseurs par des embryons d’écrivains adeptes du prêt-à-penser et du psy-cul (imposant ainsi le roman-photo sans les images au détriment de tout travail littéraire), on a affaire cette année à un véritable plébiscite intellectuel en faveur des intellectuels collabora-sionistes, fervents soutiens -ou plus simplement caution- d´une politique israélienne qui continue, à l´heure où j´écris ces mots, à procéder à une véritable extermination ethnique sans distinctions dans la bande de Gaza.

Qui aurait été assez fou en 39 pour organiser un salon de la culture allemande à Paris, quand les troupes allemandes étaient justement en train d´ envahir la Pologne ? Un désir mimétique de la communauté sioniste proche du syndrome de Stockholm envers leur ancien bourreau, qui confère presque à une intégration conceptuelle de l’escroquerie intellectuelle inhérente à tout régime totalitaire. On bombarde en Palestine tout en faisant figure de tolérance à Paris, les médias font le reste et tout le monde est content... L’occasion rêvée pour les rentiers de la non-idéologie française d´exproprier un peu plus le pays de la liberté d’expression de ses dernières valeurs républicaines... BHL en salive déjà.

Si le boycott des écrivains issus des pays en opposition à Israël na à aucun moment été évité, ce qui s’inscrit par ailleurs tout naturellement dans la ligne actuelle de montée des communautarismes con-sciemment provoquée, on peut tout de même regretter l’absence de prises de position engagées de la part des autres écrivains français qui ne sont pas directement concernés par un quelconque héritage culturel judéo-littéraire.


Ainsi ce Salon du Livre réussit un double tour de force :


 En cristallisant les idées politiques des écrivains autour des trois différents clans ainsi crées, "pro-sioniste", "pro-Palestine" et "écrivains dociles qui ne s engagent pas", on assiste à une véritable "balkanisation" de la littérature, dont on voit dès lors à qui va profiter les divisions internes (on le savait déjà, mais là, pour la première fois, c´est assumé).

On pourrait ainsi souhaiter un Salon du Livre 2009 sous le signe du monde arabe, avec dans un rôle inversé, Ahmadinejad venant inaugurer ce nouvel opus au nom de la tolérance et de la compréhension entre les peuples. Les même qui sont présents cette année et dénoncent le boycott se feraient alors les chantres de la dissidence, se rangeant comme à leurs habitudes derrière les sacro-saints principes droits-de-l-hommistes qui motivent, c’est bien connu, la moindre de leurs décisions.


 Le retour en force du « Politique » au sein même de la littérature, même si ce côté politique n’est que de façade, puisque l´on sait bien que c’est le monde de l´édition qui contrôle en sous-main la place des écrivains sur le marché français. On arrive donc ainsi non pas à une politisation encouragée des écrits, mais à une révélation forcée des engagements politiques personnels de la part des écrivains, une sorte d´Étoile Jaune littéraire symbolique que tout écrivain désirant devenir « bankable“ se devrait ainsi de porter.


On ne peut plus se cacher, si l’on veut être présent à ce salon, il faut de près ou de loin cautionner ce fourvoiement intellectuel, bref cette édition 2008 laisse imaginer un formidable test de PH pour écrivains engagés : les Neutres qui ne se prononceront pas (les moins courageux, donc une grosse majorité), les Basiques (pro-sioniste, la base de la littérature post-45 étant essentiellement pro-Israël, ou du moins coopté comme tel), et les Acides (antisionistes, que le système, lui aussi pro-sioniste, pourra désormais identifier plus facilement comme des hérétiques et les éliminer de la scène littéraire).

Néanmoins, le public présent cette année sur le Salon sera comme toujours le seul juge d’une discrimination négative de la littérature qui pourrait bien faire flop, à condition bien sûr que la majeure partie des visiteurs ne soit pas tous simplement issue des renseignements généraux, à la vue des inquiétudes que ce non-évènement suscite déjà.

B.C. pour Égalité & Réconciliation