Entre les États-Unis et les Frères musulmans, rien ne va plus. L’Administration américaine va revoir la nature de ses relations avec les islamistes arrivés au pouvoir à la faveur du « printemps arabe ». Des sources diplomatiques laissent même entendre qu’une des premières tâches de Barack Obama serait de combattre ce mouvement.
Les Américains semblent découvrir le double jeu des Frères musulmans et assimilés. Un diplomate arabe, qui a requis l’anonymat, a déclaré que les rapports des centres de recherches, qui déterminent les tendances de la politique étrangère américaine, ont révélé que les Frères musulmans louvoient et veulent profiter du soutien américain jusqu’à ce que leur pouvoir se stabilise pour se retourner ensuite contre Washington.
Comment peuvent-ils user du mensonge et de la tromperie et ne pas tenir leurs promesses, s’interrogent les Américains à leur propos, alors que ces pratiques sont incompatibles avec les préceptes des religions ? Selon le diplomate arabe, l’Administration américaine est en colère contre les islamistes au pouvoir en Égypte et en Tunisie, et même en Turquie, à cause de leur attitude conciliante vis-à-vis des groupes extrémistes salafistes. D’autant plus que les Frères musulmans se sont engagés, lors de réunions tenues précédemment avec des responsables américains, à lutter contre les extrémistes et à les empêcher de soulever la population contre les Américains, « mais ils ont fait exactement le contraire », notent les auteurs du rapport américain.
Des observateurs rappellent que les Frères musulmans ont tout fait pour innocenter les salafistes après les attaques contre les ambassades américaines dans les pays du « printemps arabe », en essayant d’accuser d’autres groupes. Pis encore, les Américains pensent que les Frères musulmans laissent les extrémistes porter des armes et se former dans des camps d’entraînement.
Les observateurs ont noté un changement dans le discours américain envers les islamistes depuis l’assassinat de l’ambassadeur des États-Unis en Libye. L’Administration américaine ne croit plus en l’existence de différences entre les Frères musulmans et les salafistes. Ils soulignent un paradoxe dans les positions des Frères musulmans « qui acceptent les conditions des États-Unis dans des réunions secrètes, mais sont réticents à mettre en œuvre publiquement ce qui a été convenu ».
En fait, les Frères musulmans veulent donner aux États-Unis l’illusion de travailler pour l’agenda de Washington dans la région. Leur but : obtenir l’aide américaine, faciliter les flux d’investissements de l’Ouest et accéder aux prêts des banques internationales. Inversement, les Frères musulmans essaient d’induire en erreur leur base en lui faisant croire qu’ils sont les ennemis stratégiques des États-Unis, en tant que pays anti-islam.
Le New York Times a révélé, il y a quelques semaines, que les États-Unis ont décidé d’ouvrir des canaux de communication avec les salafistes, directement, dans le but d’attiser leur rivalité avec les Frères musulmans. Le journal a indiqué que les salafistes sont devenus des visiteurs habituels de l’ambassade américaine au Caire. « Il est préférable d’avoir ces salafistes à l’intérieur de la tente plutôt qu’à l’extérieur », pensent-ils. Selon eux, cela permet à ces extrémistes de visiter les États-Unis et de voir leur système démocratique.
Karim Bouali