A y est ! À Paris, les centaines de clandestins qui nichaient rue de Flandre (19ème) ont été non pas expulsés, mais déplacés. Selon les associations pro-migrants les plus virulentes, il s’agit d’une rafle, autant dire de déportation. Ce qui est complètement faux : nos invités sorrossiens ne sont pas bourrés dans des wagons à bestiaux mais assis dans des cars, avec baskets neuves et portables à forfaits, CB chargée et nourriture abondante et gratuite, et sont encore moins envoyés en Pologne. Ces heureux élus atterrissent dans des centres d’accueil charmants, ce qui permet de cacher la poussière sous le tapis. Métaphore malheureuse, mais pertinente.
#Stralingrad Après 7h d'évacuation, mon LT @franceinfo s'achève ici. Voici ce qu'il reste du campement avenue de Flandre, en accéléré. pic.twitter.com/nXT8rodjTI
— Yann Thompson (@yannthompson) 4 novembre 2016
Les migrants, c’est comme la poussière : on balaye, on balaye, et dès que le tas devient trop gênant, il faut bien mettre la poussière quelque part. En fait, la poussière ne disparaît jamais vraiment, elle disparaît juste de notre vue. Le ménage est un confort mental, un trompe-l’oeil. Tout est une question de concentration, de dosage. Le problème a été déplacé dans le sud, mais la région PACA ne veut pas jouer au tapis pour la poussière. Ce conseil régional présente une particularité : présidé par le motard Estrosi, il n’est composé que d’élus FN, et LR. Les deux tendances ont voté ensemble la motion anti-migrants. Marion Maréchal-Le Pen accuse le président de plagiat, ce qui ne change rien au résultat.
En 2015, face à Elkabbach et ses journalistes, Marion Maréchal-Le Pen parlait « migrants » (de 6’50 à 12’) :
Pourtant, la droite locale prend soin de distinguer les bons des mauvais migrants, la bonne de la mauvaise poussière (calmez-vous, les droits-de-l’hommistes, c’est un symbole biblique), ceux qui méritent le droit d’asile, et ceux qui viennent en profiter. Au final, toute cette cuisine ne servira à rien, puisque l’État impose sa décision à la région. Le préfet enverra les chars, s’il le faut.
Un qui aurait eu besoin d’un char, c’est ce Rémy Buisine, journaliste sur Periscope, qui s’est pris des coups de poing par trois migrants (peut-être afghans) sous le métro Stalingrad, une station migratoire qui a aussi vécu quelques évacuations. La gauche dit que la droite exagère l’insécurité, la droite que la gauche prend ses rêves humanistes pour la réalité. En attendant, Rémy s’est fait taper la tête et malgré cela, il poursuit son sacrifice pour l’Information. C’est un peu le Vincent Lapierre de Periscope, sauf que Vincent semble moins naïf. Plus au fait de certaines réalités sociales, n’est-ce pas.
L’échange qui suit, publié sur Twitter, montre le face à face entre le réel et l’idéologie. C’est très instructif : on vous laisser déguster cette réaction de gauch(ist)e :
Et voilà. Quand une idéologie est fausse, elle se prend des coups par le réel. C’est une forme de répression naturelle d’une mauvaise carte mentale. Imaginez que vous disposiez d’un faux plan, et qu’une fois perdu, vous accusiez la nature de ne pas correspondre au plan. Certains semblent ignorer que la nature prime le plan. Le réel prime l’idéologie. Voilà pourquoi cette gauche-là veut à ce point changer le réel, à son image. Ça donne l’école d’aujourd’hui, un désastre ; ça donne l’assistanat au détriment du travail ; ça donne la dictature des minorités sur la majorité. Pour sauver ses fesses, l’idéologie dominante finit logiquement par glorifier l’ignorance et diaboliser la connaissance.
On en arrive à des absurdités du type « la langue française est un discriminant social », titre d’un article du Figaro. Heureusement, le journaliste Julien Barret nous rassure tout de suite :
Le français n’est pas menacé en réalité. Une langue est menacée quand la syntaxe est menacée. Le vocabulaire qui change aujourd’hui ne constitue pas la structure de la langue.
Cependant, trois lignes plus loin, il nous rassure moins :
Ce n’est pas grave si on est mauvais en orthographe. La langue doit nous servir à exprimer notre pensée, pas à savoir qu’il y a un « ph » à philosophie
Car les gens sérieux savent que la pensée est liée à la maîtrise de l’écrit, à travers sa correction et sa richesse.
Beaucoup de gens critiquent l’invasion des sabirs américain et des banlieues. Moi, je trouve ça ridicule. Une langue évolue et se nourrit d’apports. Le français a intégré 8000 mots d’italien à la Renaissance. Est-ce que c’est scandaleux, si l’on se replace à l’époque, que l’on ait emprunté autant de termes étrangers ? Est-ce que c’est scandaleux sous Guillaume le Conquérant que l’on ait donné 40% de notre vocabulaire aux Anglais qui nous l’ont rendu sous une autre forme ? La réponse est non. C’est le processus normal de vie d’une langue.
Écoutez et admirez la langue vivante de PNL, le nouveau groupe de rap qui déchire sa race :
On est d’accord : les puristes ne font pas la langue. Mais ils la défendent, ou en défendent une haute idée. On ne pourra pas interdire de parler « banlieue » ou franglais. Cependant, si nous ne devons pas craindre un nouveau vocabulaire, ce dernier entraîne l’écrit, qui entraîne la pensée. Par ces mots, une double idéologie, pas du tout innocente, ensemence le français : celle du lumpenprolétariat de banlieue, et celle de la dominance américaine. Les deux se rejoignant en pince ultralibérale. Ode à la consommation, à l’individualisation et au sadisme social, on n’est plus dans la syntaxe, là, on est dans le politique.
Syntaxe et politique, ça nous envoie tout droit sur la blonde Lancelin, devenue dissidente malgré elle. Elle était très confortablement assise au Nouvel Obs, cette maison bourgeoise aux revenus grassouillets, lorsqu’elle se fit éjecter. La lordonienne badiouiste ne correspondait plus à la ligne libérale du journal. Elle commit alors un livre, Le Monde libre, qui mit le bouillant Jean Daniel en éruption, mais qui rafla (hier) le Renaudot Essai, avec Besson et Giesbert à la manip. L’affaire Lancelin, qui ne passionne pas les foules – rassurez-vous, on va être rapide – résume le petit drame psychanalytique de la gauche d’aujourd’hui.
Mélenchon, qui s’était fait démonter en 2012 lors de sa campagne pour la présidentielle par le canard de Claude Perdriel et Jean Daniel, cité par arrêtsurimages.net, a lu et adopté le livre de Lancelin :
C’était donc plus vrai que vrai ! Ces gens-là ne sont pas les fossoyeurs de la gauche par erreur d’analyse, par préjugé inconscient ou juste à cause de leur âge canonique pour certains. Ils ne sont pas ces donneurs de leçon, coupeurs de tête, maîtres des arrosages au canon à merde et des ostracisations systématiques par égarement. Non. Ils le sont consciemment, délibérément, méthodiquement, organiquement.
La gauche en phase terminale s’entre-déchire. Perdue, par la grâce d’une carte qui ne correspond plus au réel. Elle erre, divague, se raccroche à ce qu’elle peut, incapable de prendre en compte la nouvelle pensée d’en bas, véritablement de gauche, elle, qui a surgi sans autorisation. Une pensée venue du réel, portée par des intellectuels qui vont très vite, qui font le débat, mais qui ne sont pas invités au simulacre de débat politico-culturel, auquel nous assistons dans les médias dominants. Cela viendra.