Jean-Marc Morandini conduira à la rentrée l’émission quotidienne d’information sur la chaîne « C News », le nouveau nom d’i>Télé, pour le groupe Canal+. En année électorale à risques, tout un symbole.
Les médias dominants, dits aussi le Média unique, nous ont terrorisés pendant trois décennies avec la lepénisation des esprits. En réalité, pendant cette fausse peur, s’opérait la lente mais sûre morandinisation des esprits : ce mélange de vacuité, de superficialité et d’inutilité qui fait le parfum de la fausse information. Oui, on peut désormais parler de vraie et de fausse info. Et la différence, c’est quoi ? Eh bien on va vous le dire : la vraie, elle change sa façon de voir les choses, elle structure la vision du monde, elle construit. La fausse, elle s’empile, efface la précédente, et disparaît à son tour. Un tour de magie, qui permet de capter l’attention du public, pendant que les choses sérieuses ont lieu dans son dos. Morandini ne fait évidemment pas exprès de faire de la fausse info, lui qui n’a jamais ouvert un livre de (géo)politique.
Attendez, quel rapport entre Jean-Marc qui fait du potin télé et, mettons, la guerre en Syrie ? Le rapport ? Mais tout est lié. Tu ne peux pas comprendre le petit si tu n’as pas le plan d’ensemble, et réciproquement : tu ne peux pas avoir le plan d’ensemble si tu n’as pas assemblé les petites choses. Une vision des choses se construit, dans la cohérence. Et quand on est cohérent, on se rend compte qu’on s’éloigne mécaniquement de la ligne officielle. Avec un peu de confiance, ce problème de marginalisation est réglé. Morandini, ce symbole magnifique de la duperie des masses, continuera donc à produire son mille-feuilles biodégradable, à oubli rapide, pour un coût financier et humain de plus en plus lourd. La vérité n’a pas besoin de gros moyens, c’est sa force.
La vérité, voilà un concept simple et complexe à la fois. Quelle est la vérité de Fabienne Kabou, qui a laissé sa fille se noyer, un jour, sur la plage de Berck ? La cour d’assises de Saint-Omer vient de lui coller 20 ans ferme. Était-elle folle, ou pas ? Au moment des faits, et, éventuellement, avant ? Un procès suffit-il pour entrer dans la tête de quelqu’un, qui plus est, dérangé ? Où se situe la vérité, une vérité admissible par tous (un consensus), dans le cerveau d’une personne qui ne se connaît même pas ? Qui subit l’ascendance de « tantes » sorcières, qui consulte des marabouts en cachette de son mari ? Son mari ? 30 ans de plus qu’elle, elle, une jolie femme noire, cultivée, mais froide.
« Je suis horrifiée par ce que je vais faire et je vis mal cet instant qui est déjà fatidique. [...] J’ai été horrifiée par la facilité, l’aisance avec laquelle ce voyage se déroule. C’est un peu comme si j’avais les mains liées. [...] J’essaie de faire front à une machine lancée. [...] Je suis en train de faire quelque chose d’extrêmement grave mais, depuis que j’ai franchi le seuil de l’atelier, je suis embarquée dans une entreprise extrêmement tragique, immonde. Je suis pratiquement anesthésiée. » (Le Parisien)
Un jour, « poussée par une force que je ne peux pas nommer », elle a fait le voyage pour Berck, posé sa fille de 13 mois sur le sable, à marée montante, et elle est partie. Il faut être très remué à l’intérieur pour faire ça sans ciller. Mais l’avocat général n’a pas retenu la folie, et s’est appuyé sur le début de l’article 122-1 du Code pénal : « La personne qui [est] atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ». Les experts qui se sont succédé à la barre parlent pourtant de « psychose délirante paranoïaque », la cour retient « l’altération du discernement » au moment des faits. Malgré cela, la mère infanticide prendra cher.
L’enquête montrera que cette Sénégalaise, mariée à un Français plus âgé, n’aura jamais déclaré son enfant à l’état civil. Conclusion ? La folie peut tout à fait côtoyer l’intelligence, et la cruauté. Mais élevons notre regard : on connaît tous des personnes célèbres, des personnalités, qui sont à la fois intelligentes, cruelles et folles. Un ministre des Affaires étrangères qui arme et soutient publiquement une faction terroriste qui se livre à des actes barbares dans un pays étranger, ça s’appelle comment ?
Et la pudeur, bordel ?
Quittons le domaine de l’illogique ou de l’injustice pour celui de l’émotionnel. Ce soir, France 2 va nous dévoiler une part inconnue, la part sombre, du comédien François Berléand, dans une nouvelle émission, Retour aux sources. François découvre, quasiment sous nos yeux, à l’OFPRA – Office français de protection des réfugiés et apatrides, gros clin d’œil balourd avec la situation actuelle – le portrait de son grand-père, Moïse Berliand, et l’émotion est trop forte. Surtout quand on apprend qu’il a disparu à Auschwitz en 1944.
Mettons-nous à sa place deux minutes : comment supporter une caméra dans un moment qui exige silence, recueillement, solitude ? Il est des souffrances qu’on doit se manger seul. Les émotions filmées d’un comédien sont-elles crédibles ? Quelle est sa vérité ?
François Berléand est parti sur les traces de son grand-père pour la série doc #RetourAuxSources ➡ ce soir à 22.55https://t.co/UnuVqNjTKG
— France 2 (@France2tv) 28 juin 2016