Rien ne va plus dans le département du Nord. Les finances sont à sec, et la pluie de l’État se raréfie. L’effet ciseaux négatif est le suivant : en 2016, la dotation du département a fondu de près de 40 millions d’euros, pendant que le nombre de bénéficiaires du RSA continue d’augmenter, pour atteindre 150 000 personnes, deux fois plus que la moyenne nationale (14 contre 7%).
En deux ans, le coût du RSA a grimpé de 100 millions ! L’État, à travers Manuel Valls, laisse la gestion du « social » aux intéressés. La seule variable d’ajustement qui reste, eh ben ce sont les pauvres. Du coup, les élus (de droite) ont été farfouiller dans les dossiers des allocataires et, en croisant les données avec la CAF et le Pôle Emploi, oh, mazette, on a trouvé 45 000 petits coquins. Qui touchent donc la manne céleste mais qui ne cherchent pas de travail, pourtant le contrat de principe entre le pauvre et le département. Le Monde du jour détaille les trois niveaux de sanction :
« Le niveau 1, c’est une réduction de 100 euros du montant du RSA, le niveau 2 une suspension de quatre mois, et le niveau 3 une radiation. »
Côté coquins, si l’on peut dire, du côté d’AC ! (Agir contre le chômage), on argue que de toute façon y a pas d’emploi, et que donc tout ça est une vaste foutaise, une hypocrisie. Chercher quand y a rien… Dans ce cas, posons la question : faut-il chercher ailleurs ? Se déraciner en caravane, à l’américaine ? Le débat sur l’assistanat n’est pas prêt de s’arrêter avec la raréfaction quasi-programmée des emplois « primaires ». Au fond, et tout le monde le sait, dans les sphères, à gauche comme à droite, les Français sont mal-formés. Pas physiquement, mais beaucoup n’ont pas la possibilité de passer d’un emploi à l’autre à cause d’une formation scolaire médiocre et d’une formation professionnelle inadaptée. Des emplois disparaissent, et les mono-employés disparaissent avec eux des radars sociaux.
Un qui aura toujours du boulot, malgré ses déconvenues avec la justice et ses arnaques, c’est Patrick, l’inamovible vicomte de Levallois. Balkany a été officiellement investi par son parti, Les Républicains, pour les législatives 2017.
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La France est un pays merveilleux : tu peux avoir un régiment de juges sur le dos, un fatras d’affaires douteuses, du fric planqué à droite à droite, rien ne peut t’empêcher de faire de la politique. On ne va pas tomber dans l’antibalkanysme primaire, mais il faut comprendre une chose : le type qui, malgré toutes ses casseroles, passe à travers les mailles de la justice, c’est qu’il a quelque chose ou qu’il est quelque chose de plus que les autres. Ce n’est pas la simple écharpe de maire de la riche ville du 92 qui permet à Pat d’échapper à la taule, mais sa fonction réelle, ou sa fine connaissance du monde politique, des affaires, et des casseroles des autres.
Dans le monde politique, les casseroles sont toutes solidaires les unes des autres, enchaînant les hommes politiques qui les traînent dans une solidarité non pas humaniste, mais calculée. Balkany ne peut pas tomber, les journalistes de Mediapart auront beau balancer tout ce que Hollande leur refile sur le gugusse, sa fonction réelle lui permet de rester un homme libre. Realpolitik, realpolitik. Que les pleunicheuses se fassent une raison, la politique est le monde des rapports de forces, basé sur une circulation de l’information, des probabilités de chute, et cette fameuse solidarité du réseau entier, qu’on a renommé système médiatico-politique. À ce titre, c’est sociologiquement intéressant. Pour le Français moyen, ça l’est peut-être moins.
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Un qui essaye de sortir de cette nasse qui sent le poisson pourri, c’est le jeune Macron, dynamique et souriant, positif et compétent (dixit « la presse »). Il casse les lignes, les codes et les habitudes. On sent qu’il veut gouverner la France autrement, comme tout le monde. Car à la fin, c’est toujours la même saucisse : on gère le navire, mais ce sont les forces supranationales qui commandent. Le capitaine gère les petites variations autour de la tendance, imposée par des forces supérieures. Toute route nationale est interdite. Sauf quand ça arrange l’oligarchie.
Macron a rencontré Houellebecq, rédacteur en chef d’un jour du magazine de Pigasse, Les Inrocks. Pigasse-Macron, la logique du rapprochement Lazard-Rothschild, banque de gauche et banque de droite, ni droite ni gauche, ha ha ha ! Mais ne brisons pas le rêve. Le dialogue entre le numéro un des romanciers français et le tourbillon rothschildien nous emmène dans les hautes sphères de l’intellect, comme le rapporte Le Point :
À un Houellebecq qui juge « déprimant pour l’homme contemporain d’être réduit à un homo economicus », Macron répond qu’en effet « aujourd’hui la vraie lutte se joue entre le capitalisme et les religions ». En chantre de la réussite individuelle, il reconnaît que « la promesse républicaine est bousculée par le capitalisme mondialisé et les promesses de certains monothéismes. Elle doit (donc) leur donner leur juste place dans le cadre de son projet : l’autonomie des individus ». Houellebecq lui souhaite bien du courage, estimant que « la relation entre religion et république est conflictuelle dans son principe même ».
Traduction, pour les 45 000 allocataires coquins du Nord, parce qu’à un moment donné faut toujours un peu atterrir sur le tarmac du Réel : vous allez devoir oublier un peu le Paradis et l’État providence, les gars, et vous bouger le cul. C’est ça que Manu entend par « autonomie ». Un euphémisme pour lâchage. Oubliez papa État et maman Religion, et débrouillez-vous, les gars !