L’horizon des présidentielles se précise. Vu l’état désespéré de la gauche, le robinet à fric se rapproche de la droite. La horde des prédateurs qui bossent pour le libéralisme transfrontalier commence à baver, et s’en met plein la chemise. Oui mais voilà, la droite dégueule de candidats. Et comme le sens du collectif n’est pas sa qualité première, c’est chacun pour sa gueule, et chacun dans la gueule de l’autre. Leurs programmes ? Il n’y en a qu’un : tout faire pour les entreprises du CAC40 ; le reste, on s’en tape. La majorité des Français est prévenue, elle qui a bouffé de l’herbe pendant le quinquennat Sarkozy. Prochaine étape : les racines.
« Il est temps de porter moi-même mes propres convictions. Je ne suis ni un gourou, ni un larbin ! Et je ne confonds pas Sarkozy avec le général de Gaulle, Napoléon ou Colbert. Eux, j’aurais été prêt à les suivre. »
C’est Henri Guaino, l’ex-conseiller de Nicolas Sarkozy, candidat aux primaires de la droite, donc contre son ancien patron, qui a eu les honneurs du micro décoratif de Jean-Jacques Bourdin ce matin :
Dans l’article du Monde daté du 5 septembre (mais sorti la veille), on apprenait de la bouche d’un informateur de droite (en général il s’agit de Brice Hortefeux, le même qui refilait les petites infos sur le conseil des ministres sous Sarko pour la mare au Canard enchaîné, la page 2, la plus lue) que Sarkozy aurait répliqué, à propos de la candidature de Guaino :
« Il se voit déjà revenir à l’Élysée mais pour lui, ce sera Sainte-Anne ! »
Tout le monde, Morano, Lefebvre, Didier, les frondeurs de la Sarkozie, en prendra pour son grade. Avant, c’était la paire de hyènes Dati/Charon (avant de s’entre-déchiqueter) qui distribuait les phrases assassines aux journalistes dans tout-Paris, mais cette politique-là, à l’heure du plein-chômage et des attentats en rafale, tout le monde s’en fout. Il n’y en a pas un qui s’élève au-dessus des autres et la figure du Général, à laquelle beaucoup se réfèrent, semble bien loin. De toute façon, le président de la République ne se cache même plus d’être un super VRP des multinationales, qui font, qui sont la politique économique du pays. Hollande signe ce jour un contrat pour 10 Airbus au Viêt Nam.
Il n’y a plus de vision, il n’y a que des biffetons.
Zemmour, le héros de La Guerre des mondes
Un qui a encore une vision, mais une vision dramatique, c’est le petit Zemmour. Après avoir établi un constat meurtrier de notre pays, avec son Suicide français qui l’a rendu riche, le journaliste de hard droite propose un bouquin moins historique mais plus politique, avec Un quinquennat pour rien. Sous-titré, pacifiquement, Chroniques de la guerre de civilisations. Là, c’est clair : il reprend la célèbre formule des neocons américains, avec son principal sous-entendu, le changement d’ennemi : on passe du communiste à l’islamiste. Le grand péril, c’est l’islam, et la guerre larvée qu’il livre à la civilisation – comprendre, occidentale. Un péril vert grandissant au moment où la France n’a plus d’État, ou de moins en moins, et encore moins de président, renommé « le roi-caoutchouc ».
On envoie le pâté choc, dans son intégralité, emprunté au Figaro, qui a diffusé les bonnes feuilles :
« Invasion, colonisation, conflagration. Ces trois pôles du triangle islamique parfois s’opposent et s’affrontent dans un conflit violent. Les Frères musulmans regrettent les attaques sanglantes de l’État islamique. Ils les trouvent prématurées. Ils estiment qu’elles provoquent un raidissement inutilement dangereux des kouffars amollis par la culpabilité et le pacifisme, et dévirilisés par l’influence délétère des femmes et des homosexuels. Les attentats risquent de perturber leur programme d’islamisation de la France établi sur les vingt prochaines années. Les Frères musulmans s’emploient depuis le début des années 80 à acquérir divers territoires pour inscrire, dans la durée, le récit islamiste comme élément du récit national de chaque pays d’Europe. Cette opération s’appelle le « Tawtine ». Elle est exécutée par la construction de mosquées-cathédrales, d’acquisitions immobilières diverses, de constructions d’établissements scolaires, comme nous le révèle Mohamed Louizi, ancien président des Étudiants musulmans de France, dans son livre Pourquoi j’ai quitté les Frères musulmans (Michalon, 2016). »
Hormis cette charge anti-invation islamiste, qui représente une montée dans la dramaturgie par rapport à son ouvrage précédent, Zemmour balance quelques pruneaux sur ses cibles favorites, à savoir Hollande, la gauche, l’union homosexuelle, l’Union européenne, et Taubira :
« Christiane Taubira quitte la place Vendôme et c’est Rimbaud qu’on assassine. Un Rimbaud de CM1 qui confond talent et emphase, fulgurance et grandiloquence. Elle écrivait à propos d’Aylan, cet enfant kurde retrouvé mort sur une plage turque : “Son prénom avait des ailes, son petit cœur a dû battre si fort que les étoiles de mer l’ont emporté sur les rivages de nos consciences.” »
Un Zemmour lucide diront les uns, sioniste rétorqueront les autres.
En attendant que les candidats de droite s’éliminent tranquillement entre eux, selon la bonne vieille loi darwinienne de l’Évolution – il ne restera qu’un crocodile, dans le marigot – Marseille est en train de battre son record de meurtres. Si les victimes n’appartenaient pas au petit ou au moyen banditisme, on pourrait penser, vu le modus operandi, à des attentats hebdomadaires. Cela reste dans la rubrique « faits divers ». Quand deux mecs à moto fument un troisième type, généralement dans le cadre du business de came, ce n’est pas un « civil » qui déguste. Le grand public ne se sent pas concerné, tout juste spectateur, de ce polar centenaire qui fait de Marseille une cité pas comme les autres. On dira donc que les morts ne provoquent pas la même émotion, dans le public, selon que ce dernier se sent concerné ou pas. Si tous les Marseillais ne sont pas passifs, il faudra beaucoup plus que des affiches pour arrêter les vendettas.
Entre 2 et 300 djihadistes français sont morts sous les balles en Irak et en Syrie. Ceux dont la vie n’a pas de valeur, pensent fatalement que la vie n’a pas de valeur, que ce soit la leur ou celle des autres.