On va commencer par du sérieux, et finir par du léger. C’est ainsi que sont conçus les JT, le plan est toujours le même.
D’abord on choque le Français, on le scotche avec une bonne grosse rafale d’infos explosives sur roulement de tambour – en rapport avec le tonnerre qui annonce un orage de montagne terrible – et puis au fur et à mesure que le JT déroule, ça se détend, ça sourit et ça finit avec une interview d’Agnès Jaoui et un reportage à la con sur les Français qui se baignent le 28 mars 2017 dans la Méditerranée et qui trouvent « ça bieng » avec une nana à gros seins au second plan, histoire de ne pas perdre l’attention du téléspectateur. Les femmes regardent aussi les femmes, c’est de bonne guerre. Ensuite on envoie la pub, quand le cerveau est bien dilaté par la petite manip angoisse-détente.
Gross patronat
Donc première info de ce mardi ensoleillé, c’est la rencontre entre Pierre Gattaz, le patron des patrons, président du MEDEF, et la candidate du FN. C’est une première, le grand patronat, CAC40 et compagnie, n’étant pas vraiment en odeur de sainteté dans un FN plus porté vers les petits patrons, commerçants et artisans. Et inversement : le grand patronat, sans même parler de la Banque, a toujours misé sur le Parti de l’Alternance, qu’on appelle aussi UMPS, LRPS ou arc républicain (les gentils).
D’ailleurs, « les marchés » viennent d’annoncer que si Marine Le Pen passait, la note de la France, du moins sa crédibilité en matière financière, serait dégradée. On a vu ça avec le Brexit… En réalité, les marchés s’adaptent à tout, du moment qu’on les laisse faire : démocratie, social-démocratie, économie mixte, dirigée, dictature, ils s’en battent les grelots, l’essentiel est de gagner du flouze sur les prêts et la dette. Exactement comme les Rothschild dans le très instable XIXe siècle en France. La grande famille bancaire n’a pas détalé en courant au moment des révolutions, elle s’est adaptée à tous les régimes, et les a retournés habilement. Même les plus anti-bourgeois.
La candidate du FN parlait « baisse des charges », une petite musique très agréable aux oreilles des patrons, jusqu’à ce qu’elle précise au bénéfice « des PME et TPE », ce qui a fait mal aux oreilles de Pierre. Gattaz et ses frères préfèrent Macron, qui vient de la Maison, et qui ignore jusqu’à l’existence des petits patrons, des auto-entrepreneurs, et de tous ceux qui se tapent cette merde de RSI : ils passent tous sous les radars de mister Banque.
Les galères économiques, les Français savent ce que c’est. Tout le monde ne bosse pas dans les grands groupes ou dans le service public, où les salaires ou les jobs sont plutôt confortables. Dans le privé, c’est la jungle : il faut faire son beurre chaque jour, et le lait se raréfie. Du coup, les Français doivent choisir quel poste de dépenses sacrifier. On mange moins de viande (rouge), moins de fromage, on part moins souvent et moins loin en vacances, et surtout, on se soigne moins bien. Résultat, un Français sur quatre renonce à ses soins.
- L’importance d’avoir de bonnes dents
Une mutuelle pour les sans-dents
Ce sont les femmes, les personnes seules et les familles monoparentales qui sont les plus concernées. Elles ignorent souvent la complémentaire santé (ACS), cette mutuelle « pour tous » instaurée par le PS, une espèce d’Hollando-care à la française. Mais la crise des soins gagne tous les Français, qui calculent avant de consulter un spécialiste, pas forcément bien remboursé. Il est fini le temps où l’on tapait dans la Sécu comme dans un robinet à soins continus. Les mutuelles se serrent la ceinture, ou plutôt la ceinture de leurs clients : moins d’ophtalmo et de dentiste.
Le glissement vers les mutuelles généralisées, synonyme de fin de la Sécu, est en réalité un cadeau fait aux grosses sociétés qui tiennent le soin privé en France. Axa, par exemple. Dont on a vu le numéro un, Castries, fricoter avec Fillon, qui était bien emmerdé sur son programme « social ». On va être clair : les montres et les costards à 10 patates, Penelope et ses piges de reine d’Angleterre, on s’en fout. En revanche, la politique sociale inféodée aux dinosaures du CAC40, c’est dangereux. La démolition de la Sécu entraîne une baisse de qualité de vie des Français, et la santé, c’est la base de tout. Avec une bonne santé, on peut aller au combat contre la pauvreté, l’injustice, l’oligarchie. C’est pour ça qu’il faut bien manger ABS, faire du sport, lire plein d’articles intelligents sur E&R et de livres sur Kontre Kulture, après, on est armé pour affronter le monde. On déconne évidemment un peu, mais pas tant que ça.
- On peut dire ce qu’on veut, mais les dieux, ils savaient vivre
Quittons le monde de la plèbe souffrante pour celui des Dieux, l’Olympe des Élus, des oligarques souriants aux dents éclatantes, dégustant les mets les plus savoureux au milieu des nymphes les plus infrarouges, infarouches, pas farouches quoi. C’est le cas de Jacques Attali, expert comptable de l’Olympe, l’homme aux mille livres et aux cent mille idées, qui vient de sortir un roman qui renferme forcément la clé de l’Univers.
On redescend sur terre là : ça sent le polar de série B, celui-là il a pas dû le pomper. Un roman bien antifrançais pour foutre la trouille à la plèbe tremblante, rien de nouveau sous le soleil attaliste. Une France avec des attentats partout et une commissaire musulmane qui sauve le pays. On dirait un tuto du service public audiovisuel destiné à farcir la tête des enfants. Plus terroristo-immigrationniste, on ne voit que BHL.
Te casse pas à romancer, Jacques, les attentats, on sait d’où ils viennent.