On parle beaucoup de la gauche en ce moment, de la refonte de la gauche, ou de son écroulement, tout dépend de quel côté on se place. Sur les 11 candidats – carrément une équipe de foot (mais qui se tirerait dans les pattes) – il y a 5 candidats de gauche, avec un doute sur le cinquième. Par ordre de gauchisme : Arthaud, Poutou, Hamon, Mélenchon et Macron.
Deux femmes sur onze, bonjour la parité. Les gauchistes nous bassinent avec la parité depuis des années, il serait temps qu’ils élisent une femme à la présidence de la République, tiens, pourquoi pas la blonde, la deuxième en partant de la gauche, en bas. L’autre avec les lunettes on la connaît pas trop, mais elle a l’air gentille. Un peu sévère, tout de même. Le genre à nous engueuler au bureau de Poste.
Trêve de plaisanteries, tout le monde a remarqué, lors du Grand débat opposant les 11 candidats, que le candidat du NPA (Nouveau parti anticapitaliste) n’avait pas vraiment obéi au dress code de la soirée. Ah oui, pardon : un dress code c’est le truc que tout le monde doit mettre, par exemple un costard lors d’un machin officiel, une robe pour les dames, vous voyez le genre.
« Suggérer que j’étais mal habillé, ça relève du mépris social »
Poutou, en bon révolutionnaire, a mis une espèce de polo du quotidien, mais blanc. Peut-être un choix un peu raciste ? Non car le NPA de Besancenot est résolument contre tout racisme. Un polo noir avec une inscription Free Théo ou Justice pour Théo aurait été du meilleur effet, et plus efficace, vu ce que le Philou a balancé ce soir-là. Que de l’invective contre Le Pen et Fillon, à croire que ce sont ces deux résidus de la haute bourgeoisie (n’hésitant pas à tirer sur les ouvriers) qui se retrouveront en finale le 7 mai... Un sorte d’aveu avant l’heure ?
Bon, le Poutou s’est fait allumer par les uns, encenser par les autres. À droite c’était « comment peut-on blasphémer à ce point dans un débat officiel pour la présidence de la République, quel déshonneur, quel manque de respect », et à gauche c’était « ouais ptain vive Poutou trop fort le keum, il assure grave contre ces putain de bourges coincés par leurs cravates de merde ». On résume, n’est-ce pas.
Pour notre part, sans entrer dans la polémique – un coup à se prendre des coups gratuitement – disons qu’en faisant cela, Poutou savait très bien ce qu’il faisait. Il fallait incarner la France d’en bas, la France ouvrière. Oui mais voilà, les ouvriers aiment aussi bien s’habiller après le boulot, et pas passer pour des SDF. Tous les ouvriers ne sont pas débraillés, y a qu’à voir comment s’habillent les jeunes qui sortent de l’usine pour entrer en boîte, par exemple, ou le tuning qu’ils font sur leurs bagnoles...
Donc Philou, la prochaine fois, mets une cravate sur ton polo. En vérité, il y a longtemps que les ouvriers ne votent plus NPA, qui est juste un parti non pas anticapitaliste mais antiraciste. C’est le résidu de SOS Racisme et ils ne pêchent des voix que dans ce vivier.
La preuve, le clip de Besancenot. On sait tous que le petit facteur aime le rap, qu’il apprécie NTM et compagnie, car le rap, voyez-vous, porte des paroles de révolte. C’est vrai, mais c’est aussi beaucoup de flan. Le flan, ce gâteau jaune en forme de tarte.
On se marre quand on voit la revendication du rappeur du clip, très éloignée des « valeurs » du NPA :
« Si on traficote c’est pour faire le plein d’blé
Mener la grande vie squatter dans les soirées huppées
À l’instar des flambeurs sur la Côte d’Azur »
Attention tout de même à bien respecter le nombre de pieds dans chaque vers. La poésie, ça a des règles, bordel.
Visiblement, la gauche de la gauche a encore du mal à trouver sa cohérence. En l’absence d’ouvriers, prendre des racailles comme base électorale c’est assez risqué, aléatoire. Heureusement, il y a la vraie gauche socialiste, qui est là pour apporter un peu de solidité à cet ensemble hétéroclite d’antiracisme et d’antibourgeoisie. Benoît Hamon, c’est le dernier socialiste. Malheureusement, il se fait allumer par Finkielkraut, qui a beaucoup changé depuis les années 80 : le nouveau philosophe est devenu un néoconservateur.
Rappelez-vous, il y a 30 ans, Finky était à fond pour l’antiracisme, il n’avait pas de mots assez durs pour les méchants nationalistes français qui disaient « attention à l’immigration, ça peut faire mal à terme ». Aujourd’hui, Finky est devenu son ennemi d’hier, et il cartonne ceux qui en sont restés à l’antiracisme à l’ancienne.
Finkielkraut : "Benoît Hamon c'est l'antiracisme à son stade sénile" #Causeur https://t.co/elKda1Q8x9 pic.twitter.com/YeS8tsPvYh
— Causeur (@Causeur) 5 avril 2017
C’est que, entretemps, le mot d’ordre oligarchique a changé : il ne s’agit plus de dire « Touche pas à mon pote », mais « Allez-y les gars, vous pouvez désormais taper sur les musulmans, et on va vous y aider vous allez voir comment ». Oui, la gauche a bien changé, elle est passée de l’antiracisme absolu à l’antiracisme sélectif (c’est-à-dire juste l’anti-antisémitisme).