L’Afghanistan, combien ça coûte ? Et pour faire quoi ?
Il était question récemment que Paddy Ashdown, ex-chef du parti Libéral démocrate britannique et Haut représentant de l’Onu (c’est-à-dire proconsul occidental) en Bosnie-Herzégovine de 2002 à 2005, soit nommé à Kaboul comme représentant des Nations Unies, de l’Union européenne et de l’Otan, un poste que Bernard Estrade sur geopolitique.com qualifie de poste de « vice-roi » pour encadrer le président afghan Hamid Karzaï. Celui-ci s’est opposé à cette nomination au dernier sommet de Davos. Les relations entre Karzai et ses parrains occidentaux ne sont pas au beau fixe en ce moment et les accrochages sont fréquents (http://www.geopolitique.com )
Il est vrai que, sur le terrain, la guerre afghane ne tourne pas à l’avantage des « forces de la coalition ». La coordination des armées laisse à désirer : les troupes commando contrarient parfois directement les efforts de pacification des forces sous mandat international qui ne sont pas toujours informées de leurs mouvements, les militaires britanniques se plaignent de la brutalité des opérations des Américains qui, à leur tour, reprochaient aux premiers de fournir des armes à la population locale sous prétexte de créer une milice.
Excédé, Stephen Harper, le premier ministre du Canada, vient d’annoncer que, à moins que l’Otan n’envoie des renforts en hommes et en matériels, il retirerait de la région de Kandahar, les 2500 soldats canadiens qui y sont déployés (http://www.news.com.au).
Selon une enquête du Congressional Research Service de 2006 la guerre d’Afghanistan avait coûté aux Etats-Unis 97 milliards de dollars depuis 2001 (contre, il est vrai 379 pour la guerre d’Irak) - http://www.boston.com .
On comprend d’ailleurs avec cela pourquoi le budget militaire états-unien explose une nouvelle fois cette année – 515,4 milliards de dollars (http://blog.wired.com) Des chiffres à rapprocher de la remarque de Wim de Ceukelaire et Bert de Belder dans l’Atlas alternatif : Sauver 8 millions de personnes dans le monde (dont 6 millions d’enfants) de maladies aisément évitables et guérissables ne coûterait pas plus de 35 milliards de dollars.
Il n’est guère possible de connaître le coût de l’occupation pour les pays européens. Un journaliste italien citait le chiffre de 300 millions d’euros par an pour son pays en 2006 http://agircontrelaguerre.free.fr .
Le secrétaire à la défense états-unien Robert Gates a écrit il y a peu au gouvernement allemand pour l’inciter à envoyer des soldats dans les zones de combat en Afghanistan. Mais celui-ci n’est guère enthousiaste. Comme c’est souvent le cas en Europe de nos jours, outre-rhin le principal avocat de l’envoi des soldats allemands au casse-pipe est un élu du centre-gauche, Hans-Ulrich Klose, Vice Président de la commission des Affaires Etrangères au Bundestag (Reuters 5 février 2008 http://wiredispatch.com/news/?id=33838 ), un homme qui pourtant sur d’autres théâtres d’opération, face à la Russie notamment, sait se montrer plus modéré (http://contreinfo.info/article.php3... ).
Le président français Sarkozy, qui avait pourtant déclaré pendant la campagne présidentielle (le 26 avril 2007) que « la présence à long terme des troupes françaises » ne lui semblait « pas décisive » s’est rendu à Kaboul en décembre dernier avec André Glucksmann et Rama Yade et a annoncé un « renforcement » de la présence française, sans s’engager sur un nombre d’hommes précis (ils étaient à cette date 1 900, contre 7 700 Britanniques, 3 200 Allemands et 14 000 Américains) - http://www.liberation.fr .
Mme Condolezza Rice en visite à Kaboul avec son homologue britannique cette semaine a éprouvé le besoin de démentir l’existence d’une crise dans la coalition, ce qui en soi confirme la persistance pour le moins d’un "problème afghan" dans le camp occidental.
Le nombre de civils morts dans cette guerre n’est pas connu. Les USA ont perdu jusqu’ici plus de 260 soldats (http://cryptome.org/mil-dead-iqw.htm ), la France 14. La guerilla talibane est de plus en plus en position de force dans le sud du pays, tandis que le gouvernement afghan, pour lesquels les Occidentaux sont censés se battre, demeure, lui, aussi éloigné que possible des critères "démocratiques" qui ont servi de justification officielle à cette guerre. Une anecdote illustre ce fait. Un étudiant en journalisme de 23 ans, Sayed Pervez Kambaksh, a été condamné à la peine de mort pour insulte à l’Islam pour avoir téléchargé un rapport sur les droits de la femme sur un ordinateur de l’université de Balkh. Le sénat afghan a validé cette condamnation à mort, et il a fallu une forte mobilisation internationale, dont une lettre de la haut commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Louise Arbour, pour que le gouvernement de Kaboul, le 5 février dernier, annonce qu’il n’y aura pas d’exécution (http://www.independent.co.uk). Le niveau de protection des libertés individuelles en Afghanistan reste aussi bas, voire plus faible qu’en Iran, pays dans le collimateur des Occidentaux en ce moment.
Publié le 08/02/2008 sur le blog atlasalternatif.over-blog.com
Source : http://www.michelcollon.info
Il était question récemment que Paddy Ashdown, ex-chef du parti Libéral démocrate britannique et Haut représentant de l’Onu (c’est-à-dire proconsul occidental) en Bosnie-Herzégovine de 2002 à 2005, soit nommé à Kaboul comme représentant des Nations Unies, de l’Union européenne et de l’Otan, un poste que Bernard Estrade sur geopolitique.com qualifie de poste de « vice-roi » pour encadrer le président afghan Hamid Karzaï. Celui-ci s’est opposé à cette nomination au dernier sommet de Davos. Les relations entre Karzai et ses parrains occidentaux ne sont pas au beau fixe en ce moment et les accrochages sont fréquents (http://www.geopolitique.com )
Il est vrai que, sur le terrain, la guerre afghane ne tourne pas à l’avantage des « forces de la coalition ». La coordination des armées laisse à désirer : les troupes commando contrarient parfois directement les efforts de pacification des forces sous mandat international qui ne sont pas toujours informées de leurs mouvements, les militaires britanniques se plaignent de la brutalité des opérations des Américains qui, à leur tour, reprochaient aux premiers de fournir des armes à la population locale sous prétexte de créer une milice.
Excédé, Stephen Harper, le premier ministre du Canada, vient d’annoncer que, à moins que l’Otan n’envoie des renforts en hommes et en matériels, il retirerait de la région de Kandahar, les 2500 soldats canadiens qui y sont déployés (http://www.news.com.au).
Selon une enquête du Congressional Research Service de 2006 la guerre d’Afghanistan avait coûté aux Etats-Unis 97 milliards de dollars depuis 2001 (contre, il est vrai 379 pour la guerre d’Irak) - http://www.boston.com .
On comprend d’ailleurs avec cela pourquoi le budget militaire états-unien explose une nouvelle fois cette année – 515,4 milliards de dollars (http://blog.wired.com) Des chiffres à rapprocher de la remarque de Wim de Ceukelaire et Bert de Belder dans l’Atlas alternatif : Sauver 8 millions de personnes dans le monde (dont 6 millions d’enfants) de maladies aisément évitables et guérissables ne coûterait pas plus de 35 milliards de dollars.
Il n’est guère possible de connaître le coût de l’occupation pour les pays européens. Un journaliste italien citait le chiffre de 300 millions d’euros par an pour son pays en 2006 http://agircontrelaguerre.free.fr .
Le secrétaire à la défense états-unien Robert Gates a écrit il y a peu au gouvernement allemand pour l’inciter à envoyer des soldats dans les zones de combat en Afghanistan. Mais celui-ci n’est guère enthousiaste. Comme c’est souvent le cas en Europe de nos jours, outre-rhin le principal avocat de l’envoi des soldats allemands au casse-pipe est un élu du centre-gauche, Hans-Ulrich Klose, Vice Président de la commission des Affaires Etrangères au Bundestag (Reuters 5 février 2008 http://wiredispatch.com/news/?id=33838 ), un homme qui pourtant sur d’autres théâtres d’opération, face à la Russie notamment, sait se montrer plus modéré (http://contreinfo.info/article.php3... ).
Le président français Sarkozy, qui avait pourtant déclaré pendant la campagne présidentielle (le 26 avril 2007) que « la présence à long terme des troupes françaises » ne lui semblait « pas décisive » s’est rendu à Kaboul en décembre dernier avec André Glucksmann et Rama Yade et a annoncé un « renforcement » de la présence française, sans s’engager sur un nombre d’hommes précis (ils étaient à cette date 1 900, contre 7 700 Britanniques, 3 200 Allemands et 14 000 Américains) - http://www.liberation.fr .
Mme Condolezza Rice en visite à Kaboul avec son homologue britannique cette semaine a éprouvé le besoin de démentir l’existence d’une crise dans la coalition, ce qui en soi confirme la persistance pour le moins d’un "problème afghan" dans le camp occidental.
Le nombre de civils morts dans cette guerre n’est pas connu. Les USA ont perdu jusqu’ici plus de 260 soldats (http://cryptome.org/mil-dead-iqw.htm ), la France 14. La guerilla talibane est de plus en plus en position de force dans le sud du pays, tandis que le gouvernement afghan, pour lesquels les Occidentaux sont censés se battre, demeure, lui, aussi éloigné que possible des critères "démocratiques" qui ont servi de justification officielle à cette guerre. Une anecdote illustre ce fait. Un étudiant en journalisme de 23 ans, Sayed Pervez Kambaksh, a été condamné à la peine de mort pour insulte à l’Islam pour avoir téléchargé un rapport sur les droits de la femme sur un ordinateur de l’université de Balkh. Le sénat afghan a validé cette condamnation à mort, et il a fallu une forte mobilisation internationale, dont une lettre de la haut commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Louise Arbour, pour que le gouvernement de Kaboul, le 5 février dernier, annonce qu’il n’y aura pas d’exécution (http://www.independent.co.uk). Le niveau de protection des libertés individuelles en Afghanistan reste aussi bas, voire plus faible qu’en Iran, pays dans le collimateur des Occidentaux en ce moment.
Publié le 08/02/2008 sur le blog atlasalternatif.over-blog.com
Source : http://www.michelcollon.info