On ne peut pas vraiment parler d’oies blanches. Kim Glow, d’autres influenceuses, plus ou moins talentueuses, chacune dans son domaine, et Juliette Binoche même, se sont livrées récemment à quelques déclarations remarquées au sujet du Coronavirus. Bien entendu, certains militants autoproclamés « anticomplotisme » en font des gorges chaudes.
Mais prenons tout d’abord connaissance des propos tenus sur Instagram par la bimbo Kim Glow. On en parle après.
On nous prend tous bien pour des cons avec le Coronavirus, en fait c’est une guerre bactérienne. Faut savoir qu’on est trop sur terre. Il faut être réaliste, la planète est surpeuplée. Donc en fait ils ont créé ce virus pour tuer les plus faibles, pour qu’ils meurent, pour que la planète s’allège, en fait. Mais c’est carrément une guerre bactérienne.
On peut pas faire des vraies guerres comme à l’époque, parce qu’il y a les bombes nucléaires aujourd’hui. Aujourd’hui tu peux pas t’amuser à faire des guerres, avec la bombe nucléaire tout le mond… toute la planète elle crève d’un coup. Donc ils ont créé ce virus pour que les plus faibles ils crèvent. C’est une sorte de... comme le truc qu’on étudie à l’école, là… le... Comment ça s’appelle ? − Les camps de concentration ! − Ben voilà, en gros, là, c’est une guerre pour les plus faibles. C’est horrible mais c’est vrai.
Non… Mais j’ai un moment de lucidité, là, quand j’y pense. Mais c’est une évidence en fait ! La planète est surpeuplée, ça va mal. Là, avec les personnes âgées qui meurent, ça va alléger les caisses de retraite pour l’État. Ah, mais c’est trop une évidence en fait ! Ah non mais là d’un coup j’me prends… Comme si d’un coup, là, j’avais une illumination. Mais c’est une é-vi-dence en fait. Réfléchissez !
Courent il est vrai des rumeurs plus ou moins fondées, plus ou moins crédibles, au demeurant contradictoires, de virus artificiel lancé pour exterminer les Asiatiques ou les trois-quarts de l’humanité, de fausse pandémie destinée à tous nous encager et quoi qu’il en soit de mesures prises pour nous implanter par dépistage ou par vaccination des puces high-tech, merveilles d’ingéniosité nanotechnologique.
Mais faut-il vraiment s’étonner de ces rumeurs ? Faut-il s’en moquer ? J’irai même jusqu’à me demander s’il faut les déplorer. Car après tout, l’humanité européenne a bien été capable de faire du juif une notion juridique, avec sa définition, et de lui attribuer un régime juridique spécifique. Ensuite de quoi les autorités allemandes et françaises ont opéré la qualification juridique des individus, allant jusqu’à leur apposer sur la poitrine une étoile jaune. Ainsi marqués, étiquetés, est-ce que l’humanité n’a pas été capable de leur faire croire qu’il fallait sortir de chez eux et d’abord se rassembler dans des camps de transit, pour ensuite monter dans des trains qui les conduiraient « à l’Est » ? Pour y vivre. Ne leur a-t-on pas dit, ensuite, à leur arrivée sur la rampe d’Auschwitz, qu’ils étaient « sélectionnés », pour leur bien ? Qu’ils devaient malgré le froid et le crachin polonais ôter tous leurs vêtements, parce que ceux-ci allaient être épouillés au Zyklon B ? Et de même ne leur a-t-on pas rasé tous les poils du corps et les cheveux pour lutter contre les parasites véhicules du Typhus synonyme de mort ? Et n’est-ce pas toujours au nom de la sacro-sainte hygiène sanitaire qu’on les a fait entrer dans des « salles de douche » ? Ô triste ironie, c’est au nom de leur survie qu’ils sont allés à la mort. Car en fait de salle de douche il s’agissait de chambres à gaz. Ensuite desquelles ils allaient directement aux fours crématoires.
Alors je pose la question. Était-il complotiste celui qui disait que les nazis étaient un groupe d’initiés et qu’ils entretenaient le secret le plus rigoureux sur leur entreprise génocidaire ? La solution est non. Aurait-il été considéré comme délirant celui qui en 1942 aurait dit à ses coreligionnaires que les nazis employaient un code langagier, que « à l’Est » signifiait « à la mort », que « sélection » signifiait « faire le tri entre ceux à tuer immédiatement et ceux à tuer au travail » et que « opération spéciale » voulait dire « extermination par le gaz » ? La réponse est oui, malheureusement. Toutes choses que l’on enseigne aujourd’hui à des fournées et des fournées d’écoliers, de collégiens, de lycéens, d’étudiants, et au grand public cultivé. Alors je dis certes, qu’il y ait de l’imagination et du délire dans une population jeune, souvent droguée et alcoolisée, abrutie par les fictions, les propagandes idéologiques et les fake news, je veux bien le reconnaître. Je dis que le contraire serait étonnant. Que cela puisse même se manifester par des actes parfois graves, je peux le croire aussi. Et je n’ose pas me représenter comment le « complotisme » et une terreur bien légitime se manifestent chez de jeunes juifs. Ou chez de moins jeunes.
Mais n’oublions jamais le contexte. Car finalement, ce monde n’est-il pas véritablement effrayant ? Les Européens n’ont-ils pas déjà exterminés les Indiens d’Amérique, et essentiellement par les virus ? Est-ce que l’Africain n’a pas toutes les raisons de se méfier lorsque l’on pense au sort de ces milliers d’êtres humains vendus aux Amériques pour y travailler comme des bêtes ? Le sort de l’ouvrier européen est-il plus enviable ? La jeunesse européenne qui en 1914 s’est ruée à « la der des ders » n’aurait-elle pas été mieux inspirée de plus de complotisme ? Le Japonais d’Hiroshima ou l’Allemand de Dresde ou de Hambourg auraient pu se documenter un peu sur la recherche nucléaire et sur les délires de Churchill. Et le Palestinien ? N’aurait-il pas été bien inspiré, lui aussi, de s’imaginer en 1942 qu’un complot (même si c’était faux) était dirigé contre lui ?
Aussi est-ce sans doute à raison que l’on en appelle constamment à la désobéissance civile, à la résistance à l’oppression, à la rébellion contre toutes les formes d’autorité et que l’on protège les lanceurs d’alerte. Parce que « plus jamais ça ». « Parce que six millions » (F. Hollande) !
Pour ma part je trouve très grave que des gens comme Rudy Reichstadt, Clément Viktorovitch ou Tristan Mendès France cherchent à dénigrer et rabaisser toute opposition politique sérieuse en faisant l’amalgame entre la critique fondée des mensonges gouvernementaux et certaines rumeurs (infondées, je l’espère, mais dont certaines sont vraisemblablement relancées par des services étatiques, si elles ne sont mêmes plantées par eux).
Ils ont beau jeu de se moquer de Kim Glow, cette jeune femme qui fait le rapprochement avec les « camps de concentration ». Dans ma culture il y a une tradition de respect pour la parole de l’idiotas. Celui qui est diminué, ou qui joue peut-être le diminué. Car c’est souvent par sa bouche que le Dieu s’adresse à nous, et par des illuminations.
Formez-vous sur tous les sujets
avec Damien Viguier et Kontre Kulture !