Parce que la dissidence épuise, les adeptes de la pensée alternative ont parfois besoin de repos. Un moment pour s’adonner à des occupations légères et prendre congé du tumulte informationnel qu’ils fréquentent au quotidien. Et parce qu’E&R se fait un devoir d’offrir à ses fidèles disciples la planche de salut qui leur fait défaut dans un océan de combats, quoi de plus utile qu’un sujet apaisant, invitant au voyage et au rêve. Aujourd’hui, les demeures de luxe.
Et pourquoi ne pas traverser la Manche pour commencer ? Il existe chez nos voisins anglais des beautés architecturales telles qu’elles feraient oublier les raisons, pourtant nombreuses et légitimes, de mépriser les cerveaux malades qui les ont conçues. Même des coins d’apparence modestes, à l’image de Rochdale dans le Grand Manchester, peuvent convaincre le bourlingueur incrédule d’y trouver pour un temps un charmant pied-à-terre. Dans cette bourgade du Lancashire où paresse la rivière Roch, vous pourrez aspirer à une quiétude que peu de mots savent décrire avec justice ; particulièrement si vous souhaitez y deviser en silence en vous remémorant les moments doux de l’existence.
C’est le choix enviable qu’a fait Mohammed Ghani [1]. Leader des grooming gangs de la ville, le pédophile a jeté son dévolu sur une maison à 870 000 dollars pour songer, ému et nostalgique, aux viols en série commis sur des écolières isolées de l’assistance publique. Dotée d’un étage, d’un jardin et d’une dépendance, sa maison est à un jet de kefta à peine de l’école locale. Un atout de poids pour cette demeure sobre et chaleureuse, que Mohammed devrait pouvoir retrouver d’ici quatorze belles années, sauf libération anticipée.
Quittons le royaume de Charles III et revenons sur le Vieux Continent, si vous le voulez bien. Après tout, l’homme s’égare souvent à chercher loin de ses terres tout ce dont la vie l’a depuis longtemps fait légataire. L’Europe est une vieille dame certes, mais ses trésors sont suffisamment fabuleux pour en faire la destination favorite des esthètes ; Italie en tête. Et pour qui convoite une vie sereine et calme, la Toscane est une escale incontournable. Réputée pour la richesse de sa culture, de ses vins et de ses paysages, la région fut le berceau de la Renaissance. L’endroit paraît tout donc tout indiqué pour se régénérer et laisser derrière soi les sempiternelles tracasseries qui parasitent le corps et l’esprit.
C’est en tout cas l’avis du président préféré de l’oligarchie mondialiste, Volodymyr Zelensky. Par héliotropisme ou simple sens de l’anticipation, le chef d’État avait acquis, avant le conflit en Russie, une villa de quinze pièces à 4 millions de dollars, au cœur de la station balnéaire Forte dei Marmi [2]. Le bâtiment est paraît-il si propice à la déconnexion que son propriétaire l’avait omis de sa déclaration de patrimoine lors de la course à l’élection. Peut-être lui fera-t-il aussi oublier le nom de ses cinq cent mille concitoyens tombés depuis que la guerre a commencé, qui sait ?
La prochaine étape nous emmène de l’autre côté de l’Atlantique, à Los Angeles. Là-bas, les bâtisseurs ont su tirer le meilleur d’un climat propice aux bains de soleil pour livrer quelques-unes des plus belles demeures qu’il ait été vu de mémoire d’homme. Des bâtiments hauts, aux boiseries nobles et des palmiers sans âge qui tanguent avec le vent, ombrageant alternativement les gazons parfaitement entretenus et les piscines qu’ils encadrent.
C’est ici que Patrisse Cullors, cofondatrice de l’indispensable mouvement Black Lives Matter, a posé ses bagages [3]. Elle plus que quiconque sait qu’il est bon d’avoir un véritable chez-soi, surtout quand l’ombre du racisme systémique vous empêche de bronzer correctement. Dans une maison à 6 millions de dollars nichée au cœur de Studio City (quartier hélas rempli de Blancs), Patrisse peut enfin respirer. Fière d’un mouvement ayant causé deux milliards de dollars de dégâts en la mémoire d’un criminel mort d’overdose, elle gère depuis son 600 m² les donations faites à sa fondation ; en attestent ses derniers investissements dans la pierre à Toronto (6 millions de dollars) et aux Bahamas (1,5 millions de dollars). Des achats nécessaires pour continuer la lutte, loin des critiques pour qui BLM rime aujourd’hui avec « Buy Large Mansions » (« Acheter de grands manoirs »).
Le soleil vous plaît ? Direction les Bahamas justement, cet archipel paradisiaque qui mouille ses terres de corail dans les courants chauds de l’Atlantique. Si comme le poète le clame, la misère est moins pénible au soleil, l’opulence n’y est pas malheureuse non plus. Les demeures luxueuses y sont légion et chacune rivalise de ses atouts somptuaires pour ravir le curieux spectateur à ses ancrages prolétaires. Le beau architectural prend une dimension tout autre quand la toile qu’il complète est une embrassade exaltée entre terre et mer.
Parfaitement au fait de ces considérations esthétiques, Sam Bankman-Fried s’est choisi la marina d’Albany comme port d’attache [4]. Petit génie de la start-up version US, sosie capillaire de Michel Berger, caution morale d’Arnaud Mimran, les qualificatifs ne manquent plus pour dépeindre ce héros des monnaies crypto. Mais plus que tout, il aimerait qu’on le retienne pour ce qu’il est vraiment : un amoureux de la belle ouvrage. Traqué pour une fraude de huit milliards dans le scandale FTX, Sam a su choisir avant la disgrâce le foyer chaleureux dont tout homme rêve après une dure journée de labeur. Une propriété coquette de 1 000 m² évaluée à 35 millions de dollars, qu’on lui souhaite de vite retrouver une fois ses démêlés judiciaires dissipés.
Si aucune de ces destinations ne trouve grâce à vos yeux, il reste toujours une autre possibilité. Plus spartiate et moins tape-à-l’œil, quoique fortement remarquable dans la campagne écossaise, la prison HM d’Édimbourg se propose de vous accueillir pour une durée à définir. Riche d’une expérience centenaire, elle saura offrir tous les accommodements nécessaires à votre bien-être. L’admission est certes conditionnée, mais la tenue de propos alternatifs sur une période de l’histoire non susceptible de révision devrait vous ouvrir les portes de l’établissement. Avec sa capacité monumentale de 872 lits, ce dernier justifie d’un savoir-faire incomparable dans la réception de groupes nombreux et la gestion de leurs éléments les plus agités.
Bien qu’isolé à l’ouest de la capitale écossaise, HMP Edinburg revendique tout le confort des pénitenciers modernes. La prison mettra notamment à votre disposition sa bibliothèque privée, dont le personnel a reçu en 2010 un prix pour sa lutte contre l’illettrisme au sein des populations carcérales. Avec un peu de chance, vous pourrez même tomber sur un compagnon de cellule qui a plein de choses passionnantes à vous raconter et de lectures à vous conseiller [5].
Ça laisse rêveur.