Dans la série filiation naturelle et destins tragiques.
Des gens russes de ma connaissance ont conseillé à un Russe de leur entourage de me contacter si je voulais bien l’aider à rentrer en contact avec la branche française de son ascendance.
Le gars la quarantaine dans la fin des années 90 était le petit-fils d’une jeune fille russe des années 40 qui avait été esclave dans une grosse exploitation agricole allemande (volontaires ou rafles de prisonniers) où elle s’était entichée d’un jeune Français du STO (Service du Travail Obligatoire) avec grossesse à la clef.
La jeune fille et son enfant née en captivité, mère de mon Russe, furent rapatriées chez Staline lors de l’occupation de la région par les anglo-saxons.
Le jeune homme, exploitant agricole, déjà marié et père chez Pétain, retourna la joie et la mort dans l’âme dans sa province dauphinoise où il reprit sa vie normale, gardant le secret sur ces détails aventureux de son séjour et sur cette filiation.
Il tint jusqu’à sa mort au début des années 1990 une correspondance en pointillés avec la prisonnière russe qui avait sur place l’avantage de la traduction, l’ami du Français Maire de la Commune tenant lieu d’intermédiaire, d’archiviste et de Poste Restante.
Puis le Maire attendit le décès de l’épouse française pour déclarer le dossier.
J’ai averti mon Russe, le petit fils indirectement né de cette idylle, de la nature du droit français en termes de transmission de patrimoine, sa mère étant encore en vie (et quand bien même), tant pour lui éviter un coup de fusil de chasse que pour lui permettre de faire valoir d’éventuels droits.
Il s’avérait être un de ces nouveaux riches à dizaines de millions de francs et m’a déclaré ne rien souhaiter revendiquer et qu’ils étaient même prêts à formaliser l’abandon de tout droit.
Et bien l’accueil de cette famille nombreuse, par ses oncles et tantes, fils et filles du prisonnier, fut très froid et les regards très méfiants. Seule la cadette était très admirative de son nouveau neveu. Ce n’est que lorsqu’ils eurent compris qu’il n’y avait aucune prétention sur les terrains, baux et fermes déjà réparties que le contact finit par s’établir, plus chaleureux.
Il avait déjà bien à faire depuis son enfance de l’héritage de ce bizarre long nez français.