Les résultats du 1er tour des élections législatives posent à nouveau le problème du mode de scrutin. Doit-on conserver le système « traditionnel » en France (dit scrutin uninominal d’arrondissement à deux tours) ou doit-on passer à la proportionnelle. Mais, cette question qui est engendrée par le décalage entre le faible pourcentage des voies qui se sont portées vers les candidats issus ou soutenus par le parti du Président (LREM et MODEM) pourrait bien être l’arbre qui cache la forêt. Si le « triomphe » promis à Emmanuel Macron relève bien de l’apparence, il convient néanmoins de s’interroger que les ressorts de cette apparence.
Le facteur institutionnel
Avec plus de 5 1% d’abstentions, ce 1er tour des élections législatives marque un véritable tournant pour les institutions de la Vème République, ou plus précisément pour ce qu’il en reste. Car, en décidant de ramener la mandature du Président de 7 à 5 ans, Jacques Chirac a porté un coup, sans doute fatal, à la Vème République. Dans les faits, ce changement a institué le Président comme « chef de la majorité », ce qui n’était pas l’intention des concepteurs de notre Constitution. Il en découle le rabaissement du Premier ministre, réduit à un rôle d’exécutant. Pourtant, si on lie le texte, on s’apercevra qu’il est dit que le Premier ministre « dirige l’action du Gouvernement » et que ce gouvernement « détermine et conduit la politique de la nation ».
Tableau 1
Source : Constitution, titre III
Il est clair que nous avons eu, dans l’importance de l’abstention, l’écho de cette modification constitutionnelle introduite par Jacques Chirac. Nombre de Français ont considéré que la séquence politique s’était jouée lors de l’élection présidentielle, et se sont désintéressés des élections législatives. C’est certainement l’une des causes, mais non la seule, de l’importance de l’abstention.
La proportionnelle est-elle une solution ?
Le problème de la représentation des députés de LREM et du MODEM n’est pas tant leur nombre. Un système électoral doit concilier deux objectifs, une représentation plus ou moins juste du pays et des opinions qui s’y affrontent ET la constitution d’une majorité. De ce point de vue, que le Parlement ne soit pas à l’image exacte des opinions n’est pas en soi un problème. De nombreux systèmes de règles de scrutins proportionnels admettent une « prime majoritaire » pour le parti arrivé en tête. Rappelons que la proportionnelle intégrale, appliquée par exemple en Israël jusqu’aux années 1990, n’était pas exempte de problèmes.
Le fait est aujourd’hui que la majorité qui a soutenu le Président fait le score le plus faible depuis 1981. Pourtant, elle peut espérer avoir entre 410 et 450 députés, sur 577.