Le premier tour des élections législatives s’est caractérisé par une très faible participation. Le taux d’abstention dépasse les 51%. À titre de comparaison il convient de rappeler que l’abstention avait été de 36% en 2002, de près de 40% en 2007 et de 43% en 2012.
Nous sommes devant un (triste) record historique. Ceci indique que les électeurs sont largement insatisfaits par l’offre politique qui leur était présentée. Et peut-être, plus profondément, qu’ils ont voulu protester contre le hold-up auquel s’est livré notre Président, Emmanuel Macron, avec la connivence d’une partie de la presse, au détriment de la démocratie. Dans le même temps, ces élections ont été marquées par ce que les commentateurs qualifient eux-mêmes de « vague » au profit du parti du Président, un parti qui devrait largement remporter la majorité absolue au parlement lors du 2ème tour.
Alors que le taux d’abstention avait été bas pour l’élection présidentielle, plus d’un électeur sur deux se sont mis en position d’objection de conscience, tant par rapport à la force politique dominante, c’est-à-dire le parti du Président, que par rapport aux institutions. Ce fait décrédibilise un peu plus ces dernières, et fragilise la légitimité du Président et de son gouvernement. Cette « vague » pourrait bien s’avérer être un trompe-l’œil.
Un succès paradoxal ?
Ainsi, ce premier tour semble annoncer une large majorité pour le Président et à son parti, La République en marche. Il faudra néanmoins, attendre le second tour pour mesurer l’ampleur de ce phénomène, mais les projections faites sur la base des résultats du 1er tour annoncent une majorité de 390 à 450 sièges, sur les 577 que compte l’Assemblée. Ainsi, avec 32% des voix, La République en marche pourrait obtenir entre 70% et 75% des sièges. C’est un succès majeur, mais un succès que vient immédiatement mettre en doute la très faible participation.
Si ce résultat se confirme, Emmanuel Macron pourra donc mettre en œuvre sa politique, et en particulier les réformes sociales qu’il a annoncées. Diverses fuites concernant ces réformes sociales qui pourraient donc être décidées dès cet été commencent à soulever une légitime émotion [1]. Le gouvernement s’en est ému, qui veut attaquer en justice les auteurs de ces « fuites » [2], alors qu’il avait commencé par affirmer que ces documents ne représentaient pas la position du gouvernement. Comprenne donc qui pourra…
Outre la méthode utilisée – les ordonnances – c’est bien le contenu de ces réformes qui pose aujourd’hui problème. Mais, ces réformes en réalité sont cohérentes avec les choix européens, et mêmes européistes, du Président. En fait, elles reprennent nombre des recommandations de l’Union européennes. On voit que ce qu’il y a en surplomb au-dessus de ces réformes, c’est bien la question de l’Union européenne et celle de l’Euro. Les adversaires du président Macron et de son parti seront confrontés rapidement à de réelles questions de cohérence. [...]
Rarement un gouvernement ne s’est apprêté à mettre en œuvre une telle politique de classe. Or, cela n’est aujourd’hui dénoncé que par les deux partis que la presse, pour une fois largement rassemblée dans son soutien à Emmanuel Macron, présente comme « extrémiste » : la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, et le Front national. Mais ces deux partis sont dans une position de faiblesse dans ces élections.
Le Front national paye la détestable image que Marine le Pen a donnée d’elle-même dans la dernière semaine de campagne de l’élection présidentielle. Si elle a reconnue son échec lors du débat face à Emmanuel Macron, rien n’a été dit sur les ambiguïtés qui ont précédé ce même débat, et qui ont cassé la dynamique qui se faisait jour immédiatement après le 1er tour de l’élection présidentielle. Cela explique le relativement mauvais score, avec seulement 14% des voix, bien loin de celui obtenu au 1er tour de l’élection présidentielle. Quant à la France insoumise, elle est pilonnée par une large partie de la presse, transformé pour l‘occasion en simple organe de propagande. La haine envers Jean-Luc Mélenchon qui se révèle au travers des articles est un cas d’école de comment on cherche à influencer l’électeur en jouant non pas sur son raisonnement mais sur la carte des peurs les plus primitives. Cela explique certainement que la France insoumise soit, elle aussi, avec 11% des suffrages, loin de retrouver le score de Jean-Luc Mélenchon au soir du 1er tour de l’élection présidentielle.
Et pourtant, le nombre d’électeurs qui s’étaient portés au 1er tour sur ces deux candidats était de très loin supérieur à celui qu’avait réuni sur son nom Emmanuel Macron. C’est cette réalité qui, en fait, inspire aux soutiens de notre Président cette haine ardente contre ceux qui pourraient s’opposer à lui, mais aussi – et ceci est autrement plus efficace que la haine – cette politique visant à peindre ces oppositions sous les traits de l’extrémisme. Il est aujourd’hui patent que cette politique a relativement fonctionné, car ce qui fait la force d’Emmanuel Macron n’est pas le mouvement qui le porte, mouvement somme toute fort réduit, mais bien la division des forces qui s’opposent à lui et à sa néfaste politique.
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