Par dizaines, des candidats de tous horizons politiques dénoncent les refus systématiques des candidats de La République en marche de débattre, certains allant jusqu’à évoquer une consigne donnée par le parti présidentiel.
Les législatives se prêtent moins aux débats que l’élection présidentielle. Néanmoins, dans de nombreuses circonscriptions, candidats et électeurs tiennent à cette tradition, qu’il s’agisse de simples rencontres devant les électeurs ou de discussions sur un plateau télévisé. Pourtant, depuis plusieurs jours, les plaintes se multiplient de candidats qui dénoncent le refus systématique de leurs adversaires de La République en marche (LREM) de débattre.
« Faire un débat sur les différentes idées n’apporte rien »
« J’ai donné mon accord hier pour débattre devant la presse avec le candidat En Marche [Hubert Julien Ferrière], l’occasion pour moi de parler une nouvelle fois de mes priorités », explique dans un communiqué sur sa page Facebook le maire du premier arrondissement de Lyon, Nathalie Perrin-Gilbert, dont la candidature est soutenue par le Parti communiste et plusieurs dissidents du Parti socialiste. « Et bien ça ne sera pas possible : tous les candidats En Marche ont pour consigne de refuser tous les débats d’entre deux tours ! », affirme-t-elle, déplorant que son adversaire se refuse à discuter avec elle.
Dans certains départements, comme le Val-de-Marne, les cas de refus de la part des candidats LREM se multiplient. Guy Geoffroy, le député sortant LR de la 9e circonscription du département, a ainsi essuyé le refus de son adversaire LREM, Michèle Peyron. Sur sa page Facebook, il dénonce une « machination » et « un manque de courage ». Michèle Peyron, quant à elle, se défend d’obéir à une règle dictée par la direction de son parti. « C’est une ligne de conduite que j’ai adoptée depuis le départ », justifie-t-elle.
Dans la 11e circonscription du même département, le député sortant socialiste Olivier Faure avait proposé un débat à son adversaire LREM pour le second tour, Amandine Rubinelli. Celle-ci a également décliné, refusant que le député socialiste lui « dicte ses conditions ». « Cette campagne, c’est une mascarade, du marketing ! Ces candidats n’ont rien à dire ! », s’agace Olivier Faure, interrogé par La République de Seine-et-Marne.
Toujours dans le Val-de-Marne, le candidat LR dans la 7e circonscription, Vincent Jeanbrun, rapporte avoir lui aussi essuyé une fin de non recevoir de la part de son concurrent, le député sortant Jean-Jacques Bridey (ex-PS, désormais LREM). « Le temps de la polémique est terminé. C’est le temps du rassemblement derrière le président », argumente ce dernier. Selon lui, le second tour n’est plus propice à la discussion, puisqu’« il y avait un premier tour, pour poser tous les arguments », déclare-t-il au Parisien.
Dans la 4e circonscription, dès avant le premier tour, la candidate du MoDem soutenue par LREM, Maud Petit, avait également refusé un débat proposé par son adversaire socialiste Zakaria Zaidane, auquel avait pourtant favorablement répondu d’autres candidats, dont Marie-Carole Ciuntu (LR), qui s’est qualifiée pour le second tour. « Faire un débat sur les différentes idées n’apporte rien d’une manière générale », estime Maud Petit dans les colonnes du Parisien, pour expliquer sa décision – qui reste donc valable pour l’entre-deux-tours.
Des refus inhabituellement nombreux
Dans la première circonscription de l’Aube, le député sortant Nicolas Dhuicq (LR) s’indigne également du refus que lui aurait opposé son adversaire LREM, Grégory Besson-Moreau.
Candidate dans la 2e circonscription de la Somme, Barbara Pompili (ex-Europe Écologie-Les Verts passée au parti écologiste en 2016 avant de rejoindre LREM en 2017) a également refusé de débattre avec son adversaire pour le second tour, le candidat de la France insoumise Cédric Maisse.
Dans la 2e circonscription de l’Oise, le candidat FN Gaétan Dussausaye accuse la candidate LREM Agnès Thill d’avoir refusé un débat proposé par France 3 Picardie. « Le retour des vieilles magouilles politiciennes », estime-t-il.
Même cas de figure dans la première circonscription du Gard, où le candidat du FN Yoann Gilet dénonce le refus de Françoise Dumas, son opposante LREM pour le second tour, de débattre avec lui sur le plateau de France 3 Languedoc-Roussillon. Informé de ce désistement par la chaîne, il pointe du doigt un « mépris de la démocratie ».
Déni de démocratie : Françoise Dumas refuse de débattre !#Circo3001 pic.twitter.com/LB2Bfkc4iB
— Yoann Gillet (@YoannGillet_fn) 12 juin 2017
Dans la 2e circonscription du Cher, la candidate LREM Nadia Essayan a également refusé de participer à un débat proposé par Le Berry républicain, face à Nicolas Sansu, le candidat du Parti communiste.
Sur les réseaux sociaux, les témoignages se comptent par dizaine de militants du PS, de LR, du FN ou de FI rapportant le refus du candidat LREM dans le circonscription de rencontrer leur adversaire.
Il convient également de noter que certains candidats de la majorité présidentielle ne suivent pas la tendance et ont ainsi accepté de rencontrer leurs adversaires, comme dans la première circonscription du Cher, où François Cormier-Bouligeon a consenti à rencontrer Wladimir d’Ormesson (LR).
Faut-il voir dans cette vague de refus du débat une volonté stratégique de LREM, ou une simple coïncidence ? S’ils sont moins médiatisés que ceux organisés dans le cadre de la campagne présidentielle, les débats de l’entre-deux-tours aux législatives sont souvent des moments forts de la campagne. Organisés par la presse régionale ou dans des petites salles, ils ont principalement pour but de convaincre les indécis ainsi que les électeurs des candidats éliminés au premier tour... Or, la totalité des candidats cités ci-dessus ont pour autre point commun d’être en situation de ballottage favorable pour le second tour.