Dans cet entretien réalisé le 30 novembre 2014, Maître Damien Viguier revient sur la notion de clan et son importance dans l’histoire des systèmes familiaux.
Qu’est ce que le clan ? – Comment a-t-il périclité ? – Mariage homosexuel : aboutissement du mariage monogamique exogamique hétérosexuel ?
Récentes accélérations sociétales – Jusqu’où ? – Questions successorales
Clan et classes – Aristocratie – Délitement du clan et prolétarisation – Rôle de l’Église catholique
Sexualité, génétique et famille : l’homoparentalité en question
Mère porteuse, père donneur de sperme, échange des rôles entre homme et femme, adoption de l’enfant d’un autre, toutes ses institutions étaient de très longues dates déjà présentes dans le Droit. Mais elles servaient dans le cadre de la famille clanique, et pour sa perpétuation. Il a fallu la désagrégation du clan, structure sociale élémentaire, qui s’est opérée sous le coup de la montée de l’égalité entre les sexes, au moyen du mariage, érigé en modèle familial alternatif, pour que ces instruments, désormais sortis du cadre pour lequel ils avaient été élaborés, servent les fins du ménage homosexuel, lui-même rendu possible par une conception extrémiste de l’égalité. Aussi le mariage tel que nous le connaissons, le mariage égalitaire, et même le couple parental égalitaire, bien loin de représenter le modèle adverse du couple homosexuel, en constitue-t-il bien plutôt le tremplin.
L’union matrimoniale entre personnes de même sexe est maintenant un donné de la législation française. Quoique la polémique ne soit pas éteinte pour autant, elle tend naturellement à se déplacer sur la question connexe de la parentalité homosexuelle. Il ne pourra en résulter qu’une clarification de la situation, car il était artificiel de distinguer la filiation du mariage, qui y a toujours trouvé sa seule raison d’être. Mais il faut bien noter que la question ne se pose plus dans les mêmes termes. Juridiquement, les termes du problème sont mêmes inversés. Le mariage homosexuel présupposait, plus qu’il ne réalisait, une parfaite égalité de condition juridique entre homme et femme, égalité allant même jusqu’à l’indifférenciation. Au contraire, la parentalité homosexuelle maintient une différenciation des rôles parentaux qu’au demeurant elle est encore, en l’état actuel des choses, bien obligée d’accepter. L’enfant est génétiquement issu, à part égales, d’une cellule mâle et d’une cellule femelle. On n’a donc pas suffisamment remarqué que la parentalité homosexuelle, si elle suppose, on l’a dit, une préalable égalité de statut entre les deux sexes, n’entraîne pas une parfaite indifférenciation des rôles parentaux, qui demeurent sexués.
Cela ne forme pas pour autant un obstacle à la parentalité homosexuelle. C’est ainsi que dans un couple de femmes, l’une des deux sera biologiquement et juridiquement la mère, tandis que l’autre sera seulement structurellement à la place du père réel, donneur de sperme plus ou moins médicalement assisté en cela, ou même père légal ou réel de l’enfant adopté. En tant que cette femme remplace et se substitue au père biologique, elle sera un père fictif. C’est ainsi que sous le Code civil du Québec il est interdit à l’épouse lesbienne d’aller à l’encontre de la présomption pater is est, qui veut que le mari de la mère soit supposé être le père, et d’agir en désaveu de paternité, dès lors qu’elle a été associée au projet de procréation médicalement assistée dont l’enfant est effectivement issu. Réciproquement, en cas de couple d’hommes, celui des deux qui n’a pas de lien biologique avec l’enfant prendra en quelque sorte la place de la mère biologique, évincée par adoption ou autrement. Les parents homosexuels peuvent d’ailleurs, d’un enfant à l’autre, inverser les rôles. Il n’empêche que, hormis le cas plus confus où ni l’un ni l’autre n’aurait de lien biologique avec l’enfant, le phénomène de la parentalité homosexuelle tient à ce qu’un homme soit en place de mère, et une femme en place de père.
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