Le rejet lors du référendum qui s’est tenu le mercredi 6 avril en Hollande, de l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Ukraine constitue à la fois une victoire de la démocratie et illustre la difficulté de l’Union européenne à respecter les règles élémentaires de la démocratie. Ce référendum signe aussi la crise d’une stratégie politique interne, celle qui cherchait à construire l’Union européenne en contournant les peuples, mais aussi une stratégie externe, celle qui faisait de la Russie un « ennemi ». Cette double crise stratégique va peser sur les développements futurs de l’UE.
Les implications du « non » néerlandais
La question posée était de savoir si les électeurs hollandais approuvaient ou non l’accord d’association. Le fait qu’un référendum puisse être tenue sur un tel sujet est indiscutablement la preuve que la démocratie est bien vivante aux Pays-Bas. De fait, les électeurs hollandais ont rejeté cet accord d’association par une large majorité (64 % des votants). Mais dans le même temps, le gouvernement hollandais, et les institutions de l’Union européenne, ont affirmé qu’il ne serait pas tenu compte de ce référendum. Certes, le vote n’avait qu’une portée consultative. Mais, la réaction des autorités, tant européennes que hollandaises, est de ce point de vue exemplaire. Elle vient confirmer ce que nous savions déjà avec le comportement de ces mêmes autorités tant par rapport au référendum de juillet 2015 en Grèce, que lors des différents votes en France et au Pays-Bas en 2005.
Le vote de mercredi pourrait cependant fragiliser l’accord d’association avec l’Ukraine et, au-delà, l’ensemble de l’Union européenne. Non pas à court terme car cet accord, qui a valeur de traité et qui comporte un gros volet commercial mais aussi politique, a déjà été ratifié par le Parlement européen. De fait, il est entré en vigueur au 1er janvier 2016. Mais, cette situation ne pourra pas durer éternellement. Si les Pays-Bas ne ratifient pas le traité, ce dernier pourrait être dénoncé devant la Cour de justice de l’Union européenne. En tous les cas c’est ce que l’on craint à Bruxelles ou, derrière le référendum néerlandais se profile déjà le référendum britannique du mois de juin et le « Brexit ».
Les autorités européennes au pied du mur
Le président du Conseil européen, Donald Tusk a « pris note », jeudi 7 avril, du non des électeurs néerlandais. Il a indiqué qu’il entendait « poursuivre [ses] contacts » avec le Premier ministre des Pays-Bas, M. Mark Rutte sur ce sujet : « j’ai besoin d’entendre quelles conclusions lui et son gouvernement vont tirer du référendum et quelles seront ses intentions ». Clairement, il entend faire peser tout le poids de la décision sur les épaules du gouvernement hollandais. En janvier dernier, le Président de la Commission européenne, M. Jean-Claude Juncker, avait prévenu qu’un « non » pourrait conduire à ce qu’il appelait « une crise continentale ». Ceci équivalait à avouer l’importance du référendum. Jeudi, il s’est dit « triste », selon un porte-parole. Quant aux conséquences du vote, « il appartient désormais avant tout au gouvernement néerlandais d’analyser les résultats et de décider de la marche à suivre ». Comme Donald Tusk, il rejette la responsabilité de ce qui pourrait survenir sur le gouvernement néerlandais. Mais, on voit bien que le problème ne pourra être cantonné aux seuls Pays-Bas. Que les autorités européennes acceptent de tenir compte de ce référendum, et c’est toute leur stratégie, tant à l’intérieure de l‘UE qu’à l’extérieur qui en sera fragilisée de manière décisive. Qu’ils décident de n’en pas tenir compte et ils offrent sur un plateau un argument très fort aux partisans du « Brexit » et plus généralement à tous les partis « eurosceptiques » en Europe.