Cette étrange et malsaine fascination de la France pour Céline
(Par Laurent Sagalovitsch)
On n’a jamais autant célébré son œuvre. Comme si finalement, ses furies antisémites n’étaient qu’un point de détail.
On n’en aura donc jamais fini avec Céline. Quand on ne songe pas à publier ses immondes pamphlets antisémites, on exhume de derrière les cadavres plusieurs romans inédits. Ou alors, histoire d’égayer l’été et de ne pas bronzer bêtement, on se permet de proposer à ses lecteurs un hors-série entièrement consacré à sa personne. À quand des figurines Panini tirées des personnages de ses romans ou des pièces de monnaie à son effigie ?
Étrange et singulière fascination que celle exercée par Céline sur le monde littéraire hexagonal. Voilà un auteur qui fut donc la pire des crapules antisémites et dont pourtant on ne cesse à longueur d’années de louer le génie sans que finalement personne n’y trouve rien à redire. Le génie, s’il existe, n’excuse pas tout. Céline fut non seulement maladivement antisémite – maladie hélas extrêmement contagieuse – mais sa haine des juifs atteignit de tels sommets qu’on peut lui incomber une part de responsabilité dans les massacres commis en France comme ailleurs sur les populations juives.
D’une certaine manière, sans Céline et ses outrances, il n’y a pas de Vel d’Hiv.
Qu’importe ! Année après année, comme un exercice mémoriel inscrit dans le marbre de la constitution, il faut nous incliner devant la grandeur de cet écrivain hors norme, le seul avec Proust à être de taille à souffrir la comparaison avec les autres géants de son siècle, Faulkner, Joyce et compagnie… C’est là affaire d’honneur national, semble-t-il. Évidemment, eût-il écrit avec une rage aussi égale pareilles infamies envers toute autre minorité – n’importe laquelle – qu’aujourd’hui personne n’oserait entretenir un quelconque rapport avec lui. À raison, la société dans son ensemble ne le permettrait pas.
Mais quand il s’agit des juifs, tout est permis ou presque.
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Au grand dam de Sagalovitsch,
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