APPEL POUR UN ISLAM NATIONAL : PATRIE, FOI ET ENRACINEMENT
Une lente communautarisation du débat public :
Depuis une quinzaine d’années, nous ont été imposés des discours sur la diversité, laquelle est à la fois une donnée et un questionnement. Ces discours se sont progressivement résumés à une homologie à notre sens négative entre le multiculturalisme et la confessionnalisation des éléments visible du religieux dans l’espace public. Autrement dit au niveau d’un ordre politique et culturel.
D’un point de vue plus général, on peut remarquer que depuis une vingtaine d’années, le discours sur la pluralité culturelle au sein de l’espace national a évolué rapidement. En effet, nous sommes passés de l’assimilation (années 1950), à l’intégration (années 1970 et 1980), puis à l’insertion (années 1990) et enfin à la diversité (années 2000) sans que jamais ne soit pensé le cadre concret de la citoyenneté.
Il est possible d’en dire autant du discours sur la nation : nous sommes passés de la République une et indivisible, à la superposition progressive de communautés niées dans les discours publics tout en étant insidieusement organisées par les mêmes hommes politiques lors des campagnes électorales.
République indivisible mais communautarisée, se dissolvant peu à peu dans la Communauté économique européenne (C.E.E) puis l’Union européenne (U.E), désormais en interaction économique directe avec les régions françaises, sans passer par l’échelon gouvernemental et enfin aboutir au post national.
Là encore, une révolution qui tient moins à la réflexion proposée qu’aux effets de modes imposées. Un air du temps, qui correspond finalement à une vraie stratégie de désintégration des nations.
La problématique repose sur l’inclusion culturelle, économique et sociale de l’immigration ; problématique qui a dérivé sur les héritiers de l’immigration, auxquels il a été demandé d’être à la fois européens, français, déculturés, enracinés et modernes. Cette lente dérive pose le problème de l’unité de la communauté politique que constitue la France sans jamais interroger les cadres institutionnels de cette communauté.
Comment parler par exemple d’une meilleure citoyenneté lorsque les piliers institutionnels tels que l’armée, la famille, l’école, le travail sont eux-mêmes en crise ?
Le monopole médiatique de l’interprétation antiraciste
On peut pronostiquer sans trop de risque d’erreur, que l’année 2011 sera particulièrement polémique, avec comme sujet central la question de l’islam et en arrière plan celle de l’immigration et du multiculturalisme, exhibés à la vindicte populaire – par médias interposés – comme une offrande électorale.
Nos médias, fabricants d’opinion publique – mais aussi inventeurs de présidentiables – sont enfermés depuis une trentaine d’année dans un étrange paradoxe.
Ils promeuvent les partisans – politiques ou intellectuels médiatiques – du multiculturalisme et du métissage généralisé comme projet sociétal indépassable tout en distillant dans l’opinion publique depuis autant de décennies, les ingrédients pernicieux d’une recette islamophobe à succès.
Cette alliance entre politiques, artistes et « intellectomanes » – en somme les acteurs principaux du discours dominant – est particulièrement remarquable à la gauche de la gauche, où le laïcisme virulent et islamophobe, côtoie sans gène la défense des « sans papiers ». Le même engouement pour l’immigration, se retrouve aussi au sein d’une majorité de la droite française – depuis Giscard et son regroupement familial on ne peut plus « humaniste » – pour des raisons prétendument économiques.
Il s’agit en l’occurrence pour la droite, d’une réponse législative aux attentes patronales en matière de dumping social, par le nivèlement des salaires français vers le bas, et valider ainsi le choix volontaire de l’industrie française des trente glorieuses, d’investir sur l’amortissement du facteur travail au détriment de la modernisation de l’outil productif. Ce qui n’empêchera pas la droite française de Pasqua à Géant, sans oublier le ministère du karcher, d’opter pour un contre discours médiatique de façade, opposé au sans-papierisme de gauche – notamment par la « charterisation » médiatique de l’immigration clandestine – histoire de préserver une conformité au clivage droite-gauche entretenu sur ce sujet.
Au laïcisme islamophobe d’une certaine gauche, répondra la lutte contre le terrorisme et la gestion policière du culte musulman par la droite additionné pour le théâtre médiatique de quelques sorties et dérapages de croisés opportunistes.
Clivage qui dans les faits n’a aucune consistance réelle, puisque islamophobie et immigrationisme restent deux caractéristiques communes – mais pour des raisons objectivement différentes – des politiques français.
Cette ligne – islamophobe et pro-immigration – est soutenue par le système médiatique toutes sensibilités confondues. Ainsi depuis la révolution iranienne les unes des grands hebdomadaires sonnent – à chaque événement touchant la question de l’islam – l’alerte du raz-de-marée islamiste sur l’Europe
Dans le même hebdomadaire, une ligne éditoriale islamophobe côtoie ainsi en permanence les positions « sans-papieristes » dites humanistes, d’un candidat de gauche et valide la sempiternelle rhétorique « économiste », soutenue par des leaders de la droite libérale, qui présentent l’immigration comme nécessité économique inévitable.
Or l’immigration massive étant essentiellement de confession musulmane et issue de sociétés encore traditionnelles et que le modèle assimilationniste nous est présenté comme révolu, l’expression publique d’un islam importé à habillage culturel extra européen, ne peut alors être que la conséquence directe de cette présence migratoire massive inassimilable.
Lien de cause à effet que nos médiateurs dominants n’osent jamais souligner, quant ils ne le dissimulent pas systématiquement, afin de masquer le lien direct entre immigration massive et visibilité soudaine de l’islam dans l’espace public.
Vouloir donc lutter contre l’expression de signes à caractère traditionnels ou religieux, en prônant la société multiculturelle, après avoir abandonné et dénoncé le modèle assimilationniste français, demeure une contradiction insolvable et pourtant évidente.
Nos fabricants d’opinion le savent bien, quelle est donc leur stratégie ?
Afin de soutenir le plus longtemps possible cette contradiction et légitimer devant l’opinion publique la présence migratoire post trente glorieuses – donc économiquement contestable – notre système médiatico-politique, a promu pendant presque trente ans, une parole antiraciste faussement intellectualisée.
Elle permet de justifier l’immigration dans sa version « humaniste de gauche », soutenue par un discours d’experts économistes, qui rendrait cette présence inéluctable à l’échelle européenne. Soit la validation idéologique et économique de l’immigration et de sa conséquence induite : la société multiculturelle.
Cette logique antiraciste est même poussée au-delà de la scène publique, jusque dans les milieux de la recherche scientifique où toute remise en question fondée sur des chiffres – de plus en plus difficiles à obtenir par ailleurs – est systématiquement frappée du sceau de l’infamie par l’antiracisme dominant.
L’autocensure du chercheur ou le mea culpa obligatoire et public de l’artiste qui a « dérapé », achevant d’interdire toute possibilité de discours critique sur ce sujet si épineux.
Un nouveau discours sous d’anciens habits : la question néo-multi culturaliste de l’islamisation
Cette confusion se retrouve actuellement dans le débat sur l’islamisation qui retraduit de manière paradoxale la philosophie détestable du multiculturalisme.
Car à nos yeux, critiquer sans arrêt l’islamisation apparente, en identifiant certains marqueurs identitaires – pratique alimentaire liée au hallal, jeûne du ramadan « carrés musulmans » dans les cimetières - sert, in fine et paradoxalement, à force de matraquage médiatique, à faire la promotion du multiculturalisme par l’intégration de ces marqueurs identitaires dans l’esprit du public, et valide ainsi de manière paradoxale le discours sur le multiculturalisme.
En définissant cette perspective, il n’est plus posée la question de l’Etat national, et donc de la politique d’immigration au premier plan, mais sera plutôt privilégiée la conséquence directe que constituerait l’islamisation ce qui induit une acceptation implicite et paradoxale du fait migratoire.
En acceptant certains paramètres de l’idéologie mondialiste et post-nationale, notamment la récusation de l’Etat et donc de ses politiques d’assimilations traditionnelles. En oubliant à dessein l’Etat c’est-à-dire le contrat, bien entendu on oublie tout volontarisme dans la politique restrictive d’immigration et on situe le sujet d’abord dans un volet métapolitique : celui de la civilisation.
L’islamisation est traitée comme principal problème, comme cause originelle, alors qu’elle est une conséquence de l’immigration. Une conséquence directe qui est niée, mais dont il faut attaquer constamment – loi après loi – les traductions sur le terrain concret de la vie des hommes et des femmes.
Cela en explicitant le combat des valeurs qui se joue pour la laïcité – à l’école, l’hôpital etc. – soudainement réactualisée dans sa forme anticléricale, comme un palliatif à la colère populaire, peuple qui est sommé par l’antiracisme dominant de taire ses craintes, au risque de réveiller le fascisme.
Une nouvelle configuration
Aujourd’hui, l’actualité internationale et les révoltes populaires arabes viennent bouleverser ces postulats dominants ; et l’occasion nous est donnée, par l’ouverture du débat sur l’identité nationale, le regain du sentiment patriotique à l’approche des présidentielles d’avril 2012, et la prochaine tenue d’un énième débat sur la laïcité – au cours duquel nous allons, une fois encore, entendre les mêmes personnes sans réelle légitimité parler d’islam à notre place – de réfléchir à une réponse qui réglerait les conséquences négatives d’un tel système idéologique.
Notre préoccupation est de nous libérer de ce paradigme antiraciste et multiculturel imposé, dont les conséquences pour les descendants de cette immigration nous semblent des plus dangereuses.
Communautarisme à la fois volontaire et organisé par le haut, haine de la France et identité immigrée fantasmée, vertu politique de l’immigration surestimée, enfermement de l’islam et de sa théologie dans des camisoles culturelles et traditionnelles qui mènent fatalement à sa dégénérescence, conflit intra-musulmans et enjeux politiques dans les coulisses consulaires, instrumentalisation des communautés émigrées par les puissances étrangères etc.
La réponse la plus efficace à l’ensemble de ces problématiques, impossible à résoudre successivement et séparément, réside nous semble-t-il dans une solution universelle et globale qui résoudrait d’un seul tenant ces dangereuses configurations sociologiques.
Nous proposons la tentative de production d’une doctrine complète, d’une pensée à la fois fondée sur une lecture légitime des textes et une approche pluridisciplinaire en matière de sciences sociales, afin de susciter une nouvelle lecture politique et théologique, un paradigme populaire partagé par les héritiers de l’immigration, à même de dépasser toutes ces contingences.
La question de l’islam national
Notre préoccupation qui est de penser une « vision d’un islam national » nous conduit vers les questions suivantes :
Quel est l’intérêt culturel, épistémologique et intellectuel d’une telle vision ? Et comment, à partir de celle-ci, aborder de nombreux champs de réflexion ? Nous entendons par islam un triple niveau de définition, un niveau éthique, un niveau sociologique ainsi qu’un niveau civilisationnel. De manière plus anthropologique, l’islam national a principalement six matrices culturelles (maghrébine, africaine, turque, indo-pakistanaise, asiatique et européenne), le poids de ces matrices étant aussi des cosmologies particulières, plurielles, ne peut être nié dans l’étude de la minorité musulmane.
Dans le cadre de ce travail, il nous faut faire appel méthodologiquement à une optique qui rattache de manière consubstantielle le récit global et le récit local, les processus généraux et ceux des modalités singulières.
Ce qui permet de clarifier l’éternel débat sur l’étude des systèmes sociaux entre une démarche privilégiant les facteurs de continuité notamment la tradition et une lecture qui insiste de manière plus marquée sur les facteurs de changements.
Notre approche se veut à la fois scientifique en intégrant l’ensemble des outils d’analyse issus des sciences sociales, mais aussi théologique par la légitimation d’un islam national fondée sur une approche actualisée des textes.
Elle se veut aussi agissante, par la création d’une organisation capable de porter la réflexion érudite sur le terrain militant au sein même des populations concernées.
Dans cette optique, nous annonçons par ce texte fondateur le lancement d’un mouvement d’opinion, de musulmans engagés pour promouvoir une nouvelle lecture du réel post-colonial et des textes musulmans, afin de favoriser l’apparition d’une élite militante consciente de son appartenance nationale et attachée aux principes immuables de ses références spirituelles. Un mouvement qui appelle les jeunes musulmans de ce pays, à se penser par eux- mêmes pour dépasser les clivages et les tensions ethniques et confessionnelles.
Un mouvement fédérateur, national et enraciné, qui assume l’identité française charnelle en préservant les mémoires familiales et personnelles des ancêtres, pour dépasser l’appartenance communautaire ethnicisée et préparer nos contemporains musulmans à assumer leur rôle de premiers ancêtres français, des futures générations musulmanes de ce pays.
Pour une France souveraine et un islam national. Pour que les hommes de bonne volonté se rassemblent.
Paris le 31 mars 2011 Rassemblement des Musulmans Souverainistes