Egalité et Réconciliation
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Le mauvais génie du judaïsme

1. Du matérialisme biblique au racisme métaphysique

Les docteurs de la foi chrétienne ont élaboré de multiples niveaux d’interprétation du Tanakh juif, renommé Ancien Testament. Dans cette série d’articles, nous ne nous intéresserons qu’à ce qu’y trouvaient les Juifs, par qui et pour qui il fut écrit. C’est dans la Bible hébraïque (que je nommerai simplement « la Bible ») que le peuple juif puise depuis toujours l’énergie qui le propulse dans l’histoire. Que la judéité soit considérée comme une identité religieuse ou ethnique, elle s’enracine dans la Bible. Le sionisme y trouve aussi son inspiration première, comme je l’ai montré dans un précédent article. Pour comprendre le véritable projet sioniste, nous devons donc identifier l’idéologie qui sous-tend la Bible hébraïque. Avant d’aborder la théologie (conception de Dieu) qui sous-tend ce corpus vénérable, penchons-nous sur son anthropologie (conception de l’homme).

 

Ombre et poussière

 

La Bible est un recueil de textes hétéroclites, d’époques et de styles variés. Néanmoins, il est admis que le Pentateuque (la Torah, soit la Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome) ainsi que les six livres historiques qui le suivent (Josué, Juges, Samuel I et II, Rois I et II), émanent, sous leur forme définitive, d’une même école de pensée et sont coulés dans un même moule idéologique. Les grands livres prophétiques d’Isaïe, de Jérémie et d’Ézéchiel appartiennent à ce même courant, que je nomme yahvisme, mais que les historiens nomment « deutéronomisme » parce que c’est dans le Deutéronome que son idéologie est la plus explicite.

Concernant la nature spirituelle de l’homme et son destin après la mort, malgré des nuances, il existe une conception biblique fondamentale, rarement contredite : elle n’accorde à l’homme aucune âme indépendante du corps, et aucune forme d’après-vie digne de ce nom. La Genèse est très claire sur ce point : « Mon esprit ne résidera pas éternellement dans l’homme, puisqu’il est chair » (Genèse 6,3) [1]. L’homme est poussière et retourne à la poussière (3,19), sans que la moindre âme digne de ce nom ne s’en échappe. Pour appuyer cette idée, Genèse 2,7 joue sur le lien sémantique entre l’homme, adam, et la terre, adamah : « Elohim forma adam, poussière de adamah. »

Par conséquent, Yahvé n’a que faire des morts, qui ne peuvent rien attendre de lui ; « ceux qui gisent dans la tombe », dit l’auteur des Psaumes s’adressant à Yahvé, sont « ceux dont tu n’as plus le souvenir, et qui sont retranchés de ta main » (88,6). L’espérance d’une vie meilleure et d’une rétribution dans l’Au-delà est l’impensé de l’idéologie yahviste. Lorsque le roi Ézéchias est « atteint d’une maladie mortelle », il supplie Yahvé, non pas de l’accueillir en sa demeure de l’Autre Monde, mais de rallonger sa vie afin qu’il puisse continuer à le louer sur terre, dans son Temple ; car une fois mort, se lamente Ézéchias, « je ne verrai pas Yahvé sur la terre des vivants » (38,11). Yahvé exauce sa prière : « J’ai entendu ta prière, j’ai vu tes larmes. Je vais te guérir ; dans trois jours, tu monteras au Temple de Yahvé. J’ajouterai quinze années à ta vie » (38,5).

La Bible hébraïque se distingue radicalement de toutes les traditions religieuses de l’Antiquité par le refus de ses auteurs de concevoir une forme d’après-vie qui soit davantage qu’un sommeil dans les ténèbres humides du Shéol. La Bible désigne sous ce terme une région souterraine où les morts, bons comme mauvais, ne subsistent qu’en tant qu’ombres impuissantes et inconscientes. Le Shéol est surtout un concept négatif, qui se rapproche au plus près de l’idée de néant, impensable par définition ; la mort au Shéol est un quasi-anéantissement. En fait, même cette notion minimale d’Au-delà est tardive. Le terme Shéol n’apparaît qu’une seule fois dans le Pentateuque (Torah), à propos de Coré et deux cent cinquante notables, « hommes de renom » qui se sont rebellés contre l’autorité de Moïse et Aaron :

« Le sol se fendit sous leurs pieds, la terre ouvrit sa bouche et les engloutit, eux et leurs familles, ainsi que tous les hommes de Coré et tous ses biens. Ils descendirent vivants au Shéol, eux et tout ce qui leur appartenait. La terre les recouvrit et ils disparurent du milieu de l’assemblée. » (Nombres 16,31-33)

Le terme n’a ici qu’une fonction narrative : aucune vie sous terre n’est accordée à ces engloutis vivants. Le Shéol, parfois traduit par « la fosse », n’est qu’une façon de désigner la mort, assimilée à la pourriture du cadavre.

On avance parfois que la Torah possède deux termes pour désigner l’esprit immortel : nephesh et ruah. C’est un contresens. Le mot hébreu nephesh est traduit dans la Septante par le grec psyché, et en français par « âme », mais il désigne en réalité un « être vivant », c’est-à-dire un corps que la vie n’a pas encore quitté ; il se traduit parfois simplement comme « la vie ». Le terme est intimement lié au sang dans les interdits alimentaires du Lévitique 17, car le sang est le siège de la vie (ou de l’âme, si l’on y tient) [2]. Le mot hébreu ruah, traduit par pneuma dans la Septante, et généralement par « esprit » en français, signifie « vent », « souffle », « respiration », soit l’air qui entre et sort des poumons. Il constitue donc une autre métaphore de la vie, et en aucun cas, dans la Bible, une âme immortelle individuelle. Ainsi n’y a-t-il aucune notion d’âme immortelle dans la formule de Genèse 2,7 : « L’Éternel Dieu forma l’homme de la poussière de la terre, il souffla dans ses narines un souffle de vie [ruah] et l’homme devint un être vivant [nephesh]. »

 

Une anthropologie anti-spiritualiste et anti-héroïque

 

Ce caractère foncièrement matérialiste de l’hébraïsme ancien, qui demeure le cœur de l’idéologie deutéronomiste, a été souvent relevé par les historiens des religions. Et contrairement à une explication parfois avancée, ce n’est pas un archaïsme remontant à un stade où les hommes n’auraient pas encore développé le concept de l’âme individuelle. C’est au contraire une idéologie révolutionnaire, agressivement dressée contre une croyance universelle et probablement aussi vieille que l’humanité. La répétition de la condamnation de tout commerce avec les morts prouve d’ailleurs que l’interdit ne fut imposé qu’avec la plus grande difficulté par les Lévites [3]. Dans le monde antique méditerranéen, le judaïsme, par son déni de la vie après la mort, faisait figure d’anti-religion.

Car dans toutes les civilisations antiques, et en Égypte plus qu’ailleurs, l’espérance en l’immortalité joue un rôle central. Selon une thèse ancienne mais revenue aujourd’hui en force, l’imaginaire de la mort est l’origine des religions et donc des civilisations. Avant de concevoir et adorer des dieux, soutenait Fustel de Coulanges dans La Cité antique (1864), « l’homme adora les morts, il eut peur d’eux, il leur adressa des prières. Il semble que le sentiment religieux ait commencé par là.  [4] » Pour l’égyptologue Jan Assmann, « la mort est l’origine et le berceau de la culture ». Celle-ci trouve son inspiration première dans les représentations de l’immortalité et les échanges symboliques entre le monde des vivants et celui des morts [5]. C’est pour les morts que la pierre a été introduite dans l’architecture, et c’est aussi probablement pour immortaliser ses défunts que l’homme façonna ses premières images. L’art naît du désir de représenter l’invisible en s’inspirant du visible, et c’est à la lumière de cette considération qu’il faut comprendre l’interdit biblique :

« Tu ne te feras aucune image sculptée, rien qui ressemble à ce qui est dans les cieux, là-haut, ou sur la terre, ici-bas, ou dans les eaux, au-dessus de la terre » (Exode 20,4).

Le yahvisme déclare la guerre à l’immortalité de l’âme. L’analyse critique du légendaire biblique prouve que les rédacteurs yahvistes ont délibérément écrasé ce qui, dans les traditions de l’ancien royaume d’Israël qu’ils s’approprient, évoque la notion d’immortalité héroïque. Seul subsiste comme véritable immortel le prophète Élie, que son disciple Élisée vit emporté par « un char de feu et des chevaux de feu » et « monter au ciel dans le tourbillon » (2Rois 2,11). Mais le motif héroïque fait ici figure de résidu ou fossile d’une idéologie héroïque recouverte par l’anti-héroïsme biblique. Élie n’est que l’exception qui confirme la règle : point d’Au-delà pour les héros bibliques.

Certes, durant la période hellénistique, le dualisme grec s’est infiltré dans la littérature juive dite « sapientielle » (qui fait parler Sophia, la Sagesse de Dieu, assimilée au Logos). Ainsi, le Livre de la Sagesse, écrit en grec à Alexandrie au 1er siècle av. J.-C., affirme que « Dieu a créé l’homme pour l’incorruptibilité » et critique ceux qui « ne croient pas à la récompense des âmes pures » (2,22-23). Mais ce texte est l’une des rares exceptions qui confirment la règle. Il s’inscrit dans la brève parenthèse du judaïsme hellénistique, qui sera vigoureusement refermée par le pharisianisme et le talmudisme et ne sera sauvée de l’oubli que par les copistes chrétiens. Et même dans ce judaïsme hellénistique, l’opinion matérialiste prévaut. D’après l’Ecclésiaste :

« Le sort de l’homme et le sort de la bête sont un sort identique : comme meurt l’un, ainsi meurt l’autre, et c’est un même souffle qu’ils ont tous les deux. La supériorité de l’homme sur la bête est nulle, car tout est vanité. Tout s’en va vers un même lieu : tout vient de la poussière, tout s’en retourne à la poussière » (Ecclésiaste 3,19-20).

« Les vivants savent au moins qu’ils mourront, mais les morts ne savent rien du tout. Il n’y a plus pour eux de récompense, puisque leur souvenir est oublié. […] il n’y a ni œuvre, ni réflexion, ni savoir, ni sagesse dans le Shéol où tu t’en vas » (Ecclésiaste 9,5-10).

Le message est identique dans le Livre de Job, de la même période : point de consolation à espérer pour le pauvre Job à l’issue de ses malheurs.

« Si l’homme une fois mort pouvait revivre, je garderais espoir tout le temps de mes souffrances, jusqu’à mon changement d’état. »

Hélas !

« L’arbre conserve un espoir, une fois coupé, il peut renaître encore […]. Mais l’homme, s’il meurt, reste inerte ; quand un humain expire, où donc est-il ? […] L’homme une fois couché ne se relèvera pas » (Job 14,7-14).

Comme seul prix de sa fidélité à Yahvé, Job recevra une rallonge de 140 ans sur terre, une progéniture nombreuse et « quatorze mille brebis, six mille chameaux, mille paires de bœufs et mille ânesses » (42,12).

Il est vrai aussi qu’entre le 1er siècle avant notre ère et le 1er siècle après, l’idée de « résurrection » des morts fait son entrée dans la littérature maccabéenne écrite en grec. Le mot grec anastasis désigne littéralement le fait de « se lever ». C’est donc l’inverse de koimao, « s’endormir », ou de « se coucher avec ses pères », l’euphémisme utilisé dans la Bible pour évoquer la mort des rois (1Rois 14,31, 15,24 et 16,6, ou 2Rois 14,29). La notion de résurrection fut d’abord appliquée aux martyrs de la résistance contre Antiochos IV dans les Livres de Maccabées. C’est une conception directement imitée de l’idéal gréco-romain du héros immortel [6], mais l’imagination pharisienne l’a réduite à l’idée grossièrement matérialiste du corps physique reconstitué hors de sa tombe, qui se passe de toute forme d’âme immortelle. Du reste, l’idée restera marginale dans la tradition rabbinique et ne fait l’objet d’aucun développement dans le Talmud.

Ce n’est que bien après la naissance du christianisme que le rabbinisme talmudique imitera celui-ci en adoptant la croyance en l’immortalité de l’âme, mais sous une forme très particulière, par une autre de ces inversions ou imitations parodiques qui sont la marque de fabrique du judaïsme : seuls les Juifs auraient une âme divine, l’âme des Gentils étant « équivalente à celle des animaux » (Midrasch Schir Haschirim). S’ils ont un aspect humain, c’est uniquement parce qu’ « il ne conviendrait pas à un Juif d’être servi par un animal, mais bien par un animal à figure humaine » (Sepher Midrasch Talpioth) [7]. Plus tard, il y aura bien des érudits juifs pour introduire l’idée d’immortalité de l’âme sous une forme moins polémique, mais ils l’emprunteront encore au christianisme. Lorsqu’au 18e siècle Moïse Mendelssohn voudra défendre la croyance en l’immortalité de l’âme, il ne s’appuiera nullement sur la tradition juive, mais produira un dialogue de style platonicien intitulé Phédon ou l’immortalité de l’âme.

 

Yahvé, Prince de ce monde

 

Selon une étymologie possible, la « religion » est ce qui « relie » l’homme à la transcendance. Elle oriente l’homme vers le ciel, l’invisible. Yahvé est le dieu qui, au contraire, tourne le regard de ses fidèles vers la terre, le matériel. Les récompenses que promet Yahvé à ceux qui le « craignent » sont exclusivement de ce monde : l’idéal est d’être « rassasié de jours », d’avoir une nombreuse descendance et une grande fortune. Seule la génération, le sang, permet à l’homme de survivre selon la Torah.

À l’inverse des traditions égyptienne, babylonienne, perse, grecque ou romaine, la tradition juive est hostile à toute forme d’imaginaire de l’Au-delà. Elle ne connaît rien de semblable à la riche mythologie funéraire des autres cultures, dont les héros explorent l’Autre Monde puis s’y établissent éternellement, en vainqueurs de la mort-anéantissement. On chercherait même en vain, dans la Bible, l’idée que l’homme en mourant va rencontrer son Créateur : la vie de chacun des patriarches se termine simplement par la mention de leur lieu de sépulture. De Jacob, il est dit qu’il « fut réuni aux siens » (Genèse 49,33), mais rien ne suggère d’y voir autre chose qu’une formule toute faite, un euphémisme conventionnel. Jacob, en tout cas, ne rejoint pas Yahvé. En fait, Yahvé ne semble pas exister dans un espace particulier ; c’est un dieu sans domicile propre autre que son Temple de Jérusalem, qui se manifeste occasionnellement pour renifler l’ « odeur agréable » de la chair calcinée des holocaustes (Nombres 29,36).

Les peuples dits polythéistes placent leur espérance ultime dans une Terre promise qui n’est pas de ce monde. Cet Autre Monde paradisiaque est souvent doté d’une source miraculeuse ou d’un « arbre de vie », qui procure vie et jeunesse éternelles. C’est, par exemple, Mag Mell, « la Plaine du Bonheur » où l’on reste jeune et beau, dans la mythologie irlandaise, ou encore « la Terre des Vivants, où il n’y a ni mort, ni manque, ni péché  [8] ». Aucune espérance de ce genre n’est donnée par Yahvé à son peuple. La Terre promise des Juifs est un lieu géographique qui s’étend du Nil à l’Euphrate ; c’est un destin exclusivement terrestre et collectif. En fait, les scribes yahvistes ont retourné sur la tête le thème mythique du Paradis (mot emprunté au perse Pardès), terre d’immortalité bienheureuse ; ils l’ont transposé, avec son arbre de vie qui transforme les mortels en immortels, au début de leur histoire, puis ils en ont fermé l’accès à tout jamais. Ils y ont mis en scène le drame qui a introduit dans le monde le double fléau de la mort et du travail, car la mort n’est à leurs yeux porteuse d’aucune promesse, et le travail n’est générateur d’aucun mérite spirituel ; ce n’est qu’en punition de sa transgression que Yahvé déclare à Adam :

« C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes dans la terre où tu as été pris » (Genèse 3,19).

  L’orientation terrestre du yahvisme est intimement liée à son légalisme. Selon l’égyptologue Jan Assmann, l’idée qu’un dieu puisse dicter ses lois aux hommes est une innovation hébraïque. En Égypte et dans le reste du monde antique, le droit n’est pas la responsabilité des dieux, mais celle des hommes. Elle découle du consensus humain, et son application repose sur le jugement humain. « Aucune religion "païenne" n’a fait du droit son domaine de prédilection. […] Ce que l’on doit au monothéisme [hébraïque] n’est donc pas l’introduction, mais la "transplantation" du droit et de la justice : la source du droit n’est plus à chercher sur la terre et dans l’expérience humaine, mais au ciel et dans la volonté divine. » Les prêtres yahvistes ont dépouillé l’homme de sa responsabilité de se donner des lois. Selon le grand penseur juif Yeshayahou Leibowitz, « la Torah ne reconnaît pas d’impératifs moraux découlant de la connaissance de la réalité naturelle ou de la conscience du devoir de l’homme envers son prochain. Tout ce qu’elle reconnaît est les Mitzvot [Commandements], les impératifs divins. » En fait, selon Gilad Atzmon, « le légalisme judaïque a pour fonction de remplacer le jugement éthique authentique. […] les personnes éthiques n’ont pas besoin de "commandements" pour savoir que le meurtre ou le vol sont des choses mauvaises. » Il est aussi à noter que la divinisation de la loi contribue à faire des Juifs un peuple inassimilable. L’historien juif Bernard Lazare note que tous les peuples conquis par les Romains, à l’exception des Juifs, se soumirent sans difficulté aux lois des vainqueurs. « Ils le pouvaient facilement, parce que, chez eux, la séparation était très nette entre les doctrines religieuses venues des dieux et les lois civiles émanées des législateurs. » La loi mosaïque, elle, est tombée du ciel, gravée dans la pierre par le doigt même de Dieu. Elle ne souffre aucun compromis. L’Alliance entre Yahvé et son peuple (alliance éternelle selon le judaïsme) est un contrat qui se résume ainsi :

« Si tu obéis vraiment à la voix de Yahvé ton Dieu, en gardant et pratiquant tous ces commandements que je te prescris aujourd’hui, Yahvé ton Dieu t’élèvera au-dessus des toutes les nations de la terre. » Deutéronome 28,1

À l’opposé de cette promesse de domination terrestre, le christianisme offre à ses fidèles un Royaume qui n’est pas de ce monde. Dès lors, bien des chrétiens ont perçu l’antinomie entre Yahvé et le Christ. Les gnostiques des premiers siècles avaient saisi le problème : s’appuyant sur saint Paul, ils tenaient Yahvé pour un démiurge mauvais qui avait asservi les hommes, tandis que le Dieu d’amour de Jésus venait les libérer. Comment, au fond, distinguer Yahvé promettant à son peuple la domination des « nations de la terre », du diable tentateur qui, ayant emporté Jésus « sur une très haute montagne, lui montre tous les royaumes du monde avec leur gloire et lui dit : "Tout cela, je te le donnerai, si, te prosternant, tu me rends hommage" » (Matthieu 4,8-10). Tel est le dilemme profond du christianisme et de son rapport à l’Ancien Testament. Le matérialisme judaïque a de profondes conséquences sur le mode de vie juif.

Parmi ces conséquences, Karl Marx identifie la poursuite immodérée du pouvoir financier. « L’argent est le dieu jaloux d’Israël, devant qui nul autre dieu ne doit subsister. L’argent abaisse tous les dieux de l’homme et les change en marchandise. » [9]. Jacques Attali, qui crédite le peuple juif d’avoir fait « de la monnaie l’instrument unique et universel d’échange, tout comme il fait de son Dieu l’instrument unique et universel de la transcendance », fait aussi remarquer qu’en hébreu, « monnaie » (DaMim) est le même vocable que « sang » (DaM, pluriel DaMim), et se réjouit de cette « dangereuse et lumineuse proximité » [10]. Le capital, en effet, transcende l’individu et se transmet par la progéniture. Donnons raison à Attali : par leur pratique et leur perfectionnement de l’usure, les Juifs ont en quelque sorte doté l’argent d’un pouvoir quasi surnaturel. Tout se passe comme si le monde spirituel auquel le Juif ne croit pas avait été remplacé par un monde virtuel de sa fabrication ; une spiritualisation de la matière qui est en réalité un monde spirituel inversé, puisqu’au lieu de relier l’homme au Ciel il l’enchaîne à la Terre.

 

Du yahvisme à l’athéisme

 

L’Ancien Testament fut le cheval de Troie du judaïsme et de son anthropologie matérialiste au sein de la chrétienté. Parmi les conversos ou « nouveaux chrétiens » suscités par les édits d’expulsion des Juifs d’Espagne et du Portugal de la fin du 15e siècle, nombreux furent ceux qui renoncèrent avec soulagement à Yahvé. Mais ils n’en reçurent pas nécessairement pour autant la foi en l’Au-delà, et ne perdirent pas leur vision foncièrement matérialiste du monde. C’est par les communautés marranes que semble s’être répandu dans la chrétienté au 16e siècle le matérialisme philosophique et son corolaire, l’athéisme. Et c’est sous l’influence des marranes de Hollande et de Venise, souvent reconvertis en calvinistes, que cette disposition d’esprit se fraiera un chemin dans l’Angleterre de Cromwell, pour devenir au 19e siècle le ferment de la modernité.

L’impulsion vint de Thomas Hobbes, auteur du fameux Léviathan (1651). Hobbes est un puritain, mais ses idées religieuses sont si typiquement juives qu’on a émis l’hypothèse de son origine marrane [11]. Son matérialisme philosophique est en tout cas compatible avec le judaïsme et non pas avec le christianisme :

« L’univers est corporel ; tout ce qui est réel est matériel, et ce qui n’est pas matériel n’est pas réel. »

Mû principalement par l’instinct de conservation et vivant dans l’angoisse permanente de la mort violente, « l’homme est un loup pour l’homme » à l’état de nature, et les relations humaines se résument à « la guerre de tous contre tous ». Hobbes était lui-même influencé par Machiavel, au sujet duquel le néoconservateur Michael Ledeen se demande s’il n’était pas aussi un « Juif secret » : « Écoutez sa philosophie politique et vous entendrez la musique juive », écrit-il dans la Jewish World Review [12].

Dans le sillage de Hobbes apparaissent Adam Smith, le théoricien du libéralisme mercantile avec The Wealth of the Nations (1776), puis Thomas Malthus et son Essai sur le principe de population (1798). Le malthusianisme, qui s’adapte bien au climat mental victorien, inspire à la fin du 19e siècle Herbert Spencer, qui formule la loi naturelle de la « survie du plus apte » dans Progress, its Laws and Causes (1857). Deux ans après le livre de Spencer paraît celui de Darwin sur L’Origine des espèces (1859), qui apporte la caution des « sciences naturelles » à la loi spencérienne de la « survie du plus apte », laquelle était déjà en germe chez Thomas Hobbes. Darwin admet que sa théorie n’est que « la doctrine de Malthus appliquée au règne animal et végétal, agissant avec toute sa puissance ».

Le darwinisme tient lieu aujourd’hui de fondement doctrinal du catéchisme de l’athéisme institutionnel. En 1920, l’écrivain anglais Bernard Shaw voyait poindre avec inquiétude la nouvelle religion laïque, dont le principe éthique est la compétition pour la survie du plus apte. Mais Shaw, qui était partisan de la théorie de « l’évolution créatrice » ou vitalisme, comprenait aussi que l’attrait pour le darwinisme était lié au dégoût qu’éprouve la pensée rationnelle pour le démiurge capricieux, incompétent et génocidaire de l’Ancien Testament [13].

La vérité est que l’Ancien Testament, qui fut le cheval de Troie du judaïsme au sein du christianisme, a suscité l’athéisme par réaction dialectique. Voltaire, par exemple, ne dénigre le Dieu chrétien qu’en citant l’Ancien Testament : « Jamais le sens commun ne fut attaqué avec tant d’indécence et de fureur » (Sermon des Cinquante). L’athéisme qui a englouti la chrétienté occidentale est l’enfant naturel du yahvisme.

 

Le peuple éternel

 

À l’opposé de la pensée grecque qui a développé l’idée de la psyché individuelle, le judaïsme sacralise le génétique au-dessus de tout. Seule la génération permet à l’homme de survivre ; par conséquent, seule la descendance d’Abraham, Isaac et Jacob est déclarée éternelle par Yahvé : « J’ai constitué un peuple éternel » (Isaïe 44,7). C’est, en quelque sorte, le peuple élu tout entier qui est « héroïsé ». La Torah ramène constamment l’individu à son origine génétique, et le seul destin qu’elle lui offre après la mort est sa descendance. Lorsqu’Abraham contemple le ciel étoilé, il n’y voit pas des âmes divinisées, comme le font les Égyptiens, mais l’image de sa future progéniture terrestre (Genèse 15,5 ; 22,17).

La circoncision vient renforcer ce primat du corps et de la matière :

« Mon alliance sera marquée dans votre chair comme une alliance perpétuelle. L’incirconcis, le mâle dont on n’aura pas coupé la chair du prépuce, cette vie-là sera retranchée de sa parenté : il a violé mon alliance » (Genèse 17,13).

La circoncision est comme un trait génétique surajouté, transmis de père à fils. Spinoza ne s’y est pas trompé :

« J’attribue une telle valeur au signe de la circoncision, qu’à lui seul je le juge capable d’assurer à cette nation une existence éternelle.  [14] »

L’immortalité n’est refusée à l’individu que pour être réinvestie entièrement sur le collectif. Isaac Kadmi-Cohen décrit le judaïsme comme « la spiritualisation déificatrice de la race », et son Dieu comme « l’exaltation de l’entité représentée par la race ». C’est la raison pour laquelle, « dans l’hébreu ancien, le verbe "mourir" s’applique à tous les êtres vivants, hommes et bêtes. Pour les Hébreux, on emploie une périphrase : Rejoindre son peuple (Héasef léamo).  [15] » Si l’éternité n’est accordée qu’au peuple en tant qu’entité collective, tout se passe comme si les Juifs se trouvaient réunis par une âme collective, ethnique, génétique. Faut-il donner à cette âme collective le nom de Yahvé ? C’est ce que semble vouloir dire Maurice Samuel, dans You Gentiles (1924) : « Le sentiment dans le Juif, même dans un Juif libre-penseur comme moi, est qu’être un avec son peuple, c’est être admis à la capacité de participer à l’infini. Je pourrais dire, de nous : "Nous et Dieu avons grandi ensemble".  [16] »

Nombreux sont les penseurs juifs qui ont conçu la judéité comme une forme d’âme tribale. Quelques citations du rabbin américain Harry Waton, tirées de son Program for The Jews écrit en 1939, résument assez bien cette idée :

« Jéhovah est différent de tous les autres dieux. Tous les autres dieux résident au ciel. Pour cette raison, toutes les autres religions se préoccupent du ciel, et elles promettent toute récompense dans le ciel après la mort. Pour cette raison, toutes les autres religions dénigrent la terre et le monde matériel et sont indifférentes au bien-être et au progrès de l’humanité sur cette terre. Mais Jéhovah descend du ciel pour résider sur la terre, et pour s’incorporer à l’humanité. Pour cette raison, le judaïsme se préoccupe seulement de cette terre et promet toute récompense ici-même sur cette terre. »

« La religion des Hébreux, en fait, était intensément matérialiste et c’est précisément ce qui lui a donné une réalité persistante et efficace. »

« La Bible parle d’une immortalité ici même sur terre. En quoi consiste cette immortalité ? Elle consiste en ceci : l’âme continue de vivre et de fonctionner à travers les enfants et les petits-enfants et tous leurs descendants. Par conséquent, quand un homme meurt, son âme est réunie à son peuple. Abraham, Isaac, Jacob, Moïse et tous les autres continuent de vivre dans le peuple juif, et un jour ils vivront dans toute la race humaine. Voilà l’immortalité du peuple juif, telle qu’elle a été connue des Juifs de tous temps. »

« Les Juifs qui possèdent une compréhension plus profonde du judaïsme savent que la seule immortalité qu’il y ait pour le Juif est l’immortalité dans le peuple juif. Chaque Juif continue de vivre dans le peuple Juif, et il continuera de vivre aussi longtemps que vivra le peuple juif.  [17] »

Ce paradigme judaïque explique pourquoi renoncer à la judéité est pour un Juif comme s’arracher une partie de l’âme. « Vous pouvez extraire le garçon hors d’Israël, mais vous ne pouvez pas extraire Israël hors du garçon », dit un proverbe juif [18]. Le concept de la « haine de soi » dont on affuble tout Juif apostat ou simplement critique de sa communauté d’origine, trahit une conception de la judéité comme élément indéracinable de l’individualité. On le comprend mieux en lisant comment Benzion Netanyahu analyse la situation du Juif qui épouse une non-Juive :

« Son individualité, qui est un extrait et un exemple des qualités de sa nation, sera alors perdue pour les générations futures, dominée par les qualités d’autres nations. Quitter une nation est par conséquent, même d’un point de vue biologique, un suicide.  [19] »

Selon l’ethnohistorien juif Raphael Patai, auteur de The Jewish Mind (1977), « la conscience d’appartenance » est « le critère ultime de la judéité  [20] ». « Être juif pour moi, confirme Alain Finkielkraut, c’est me sentir impliqué, concerné, compromis parfois par ce que font les autres juifs. C’est un sentiment d’appartenance, d’affiliation.  [21] » Chaque juif, dans l’exacte mesure où il se sent juif, se voit lui-même comme la parcelle d’un tout. Par conséquent, ce qu’accomplit un Juif rejaillit sur toute la communauté. Lorsqu’un Juif est soupçonné de crime, la communauté se mobilise pour sa défense. Il ne s’agit pas véritablement de solidarité, encore moins d’empathie, selon Otto Weininger, mais plutôt de « la crainte que le coup n’en retombe sur l’ensemble des Juifs, ou mieux sur la juivité même, que l’idée même de juivité en ressorte ternie.  [22] » Et lorsqu’un Juif est victime, c’est tout le peuple juif qui est victimisé. La mémoire obsessionnelle de la Shoah est enracinée dans ce paradigme ; chaque Juif, fût-il le rejeton de Séfarades nord-africains n’ayant jamais vu l’ombre d’un uniforme nazi, se sent victime de l’Holocauste, et traumatisé en tant que survivant. Une frontière floue entre la mémoire personnelle et la mémoire collective est l’un des effets marquants de la judéité.

Nombres de penseurs juifs modernes ont clairement identifié cette spécificité du judaïsme qui fait sa force. Ainsi pour Moses Hess (Rome et Jérusalem, 1862), précurseur du sionisme, « la religion juive est, par dessus tout, le patriotisme juif ». « Rien n’est plus étranger à l’esprit du judaïsme que l’idée du salut individuel », car l’essence du judaïsme est « la croyance vivide en la continuité de l’esprit dans l’histoire humaine ». Cette géniale idée juive ne serait pas selon lui un rejet de l’immortalité individuelle ; ce serait elle au contraire qui aurait « au cours des âges, rétréci dans la croyance dans l’immortalité atomique de l’âme individuelle ; et ainsi, arrachée de ses racines et de son tronc, elle s’est fanée et a pourri  [23] ». Sur ce point, Hess se trompe, mais en partie seulement, car il est exact que la notion étroitement individuelle de l’âme qui a cours dans l’imaginaire chrétien (une nouvelle âme dans chaque nouveau-né) a sa faiblesse. Jean Jaurès l’avait bien saisi, et c’est ce qui lui faisait voir le socialisme comme le complément nécessaire du christianisme [24]. John Steinbeck a illustré cette idée dans Les Raisins de la colère avec le personnage de Jim Casy, un ancien prêcheur qui a renoncé à sauver les âmes et s’investit dans le combat social, en se disant : « Peut-être bien que les hommes n’ont qu’une grande âme et que chacun en a un petit morceau.  [25] »

En définitive, le déni de l’âme individuelle, qui peut apparaître comme une terrible lacune du judaïsme primitif, est en même temps ce qui fait la force du peuple juif en tant qu’âme-groupe. Car l’individu n’a que quelques décennies pour accomplir son destin terrestre, tandis qu’un peuple dispose de siècles, voire de millénaires. Ainsi le prophète Jérémie pouvait-il rassurer les exilés de Babylone que, dans sept générations, ils retourneront à Jérusalem. Sept générations dans l’histoire d’un peuple, c’est un peu comme sept ans dans la vie d’un homme. Tandis que le Goy attend son heure à l’échelle d’un siècle au plus, le peuple élu voit beaucoup plus loin.

En pratique, cet esprit se manifeste par une capacité exceptionnelle des Juifs à œuvrer en réseaux de génération en génération. Les néoconservateurs en ont fait récemment la démonstration ; en trois générations, ils ont pénétré les centres névralgiques de l’État américain dans le but précis de tirer les ficelles de sa politique étrangère et militaire. Il est intéressant de savoir que le maître à penser des néoconservateurs, Leo Strauss, spécialiste de Hobbes et de Machiavel, voyait en ce dernier un patriote d’un type supérieur, parce qu’il ne croyait pas en l’immortalité de l’âme mais seulement en celle de la nation, et en déduisait que, l’individu ne pouvant se damner, rien n’est immoral de ce qui peut servir la nation [26].

Laurent Guyénot

Notes

[1] Toutes les citations bibliques sont tirées de l’édition catholique de la Bible de Jérusalem (Desclée de Brouwer, 1975).

[2] Josef Kastein, History and Destiny of the Jews, Garden City Publishing, 1936, p. 173.

[3] Deutéronome 18,10-12 et 26,14 ; Lévitique 19,31, 20,6-7 et 20,27 ; Psaumes 106,28 ; Isaïe 8,19 et 65,3-4. Voir Susan Niditch, Ancient Israelite Religion, Oxford University Press, 1997.

[4] Numa-Denis Fustel de Coulanges, La Cité antique (1864), Flammarion, « Champs », 1984, p. 20

[5] Jan Assmann, Mort et au-delà dans l’Égypte ancienne, Rocher, 2003, p. 17

[6] Marie-Françoise Baslez, Les Persécutions dans l’Antiquité. Victimes, héros, martyrs, Fayard, 2007, p. 149-178.

[7] Édition de Varsovie, 1875, p. 255, cité dans André Gaillard, Les Racines judaïques de l’antisémtisme, AMG Éditions, 2012, p. 69

[8] Laurent Guyénot, La Mort féerique. Anthropologie du merveilleux (XIIe-XVe siècle), Gallimard, 2011, p. 155.

[9] Karl Marx, « La capacité des Juifs et des chrétiens actuels de devenir livres » (1843), dans Sur la question juive, Kontre Kulture, 2012, p. 65.

[10] Jacques Attali, Les Juifs, le monde et l’argent, Fayard, 2002, p. 36.

[11] Robert Kraynak, « The Idea of the Messiah in the Theology of Thomas Hobbes », Jewish Political Studies Review, Automne 1992, en pdf sur jcpa.org

[12] Michael Ledeen, « What Machiavelli (A Secret Jew ?) Learned from Moses », Jewish World Review, 7 juin 1999, sur www.jewishworldreview.com/06...

[13] Bernard Shaw, Réflexions sur le darwinisme, Éditions Infrarouge, 1996, p. 72.

[14] Cité dans Jean Daniel, La Prison juive. Humeurs et méditations d’un témoin, Odile Jacob, 2003, p. 107.

[15] Isaac Kadmi-Cohen, Nomades. Essai sur l’âme juive, Felix Alcan, 1929 (sur archive.org), p. 27-28, 98, 141-143.

[16] Maurice Samuel, You Gentiles, New York, 1924 (sur archive.org), p. 74-75

[17] Harry Waton, A Program for The Jews, An Answer To All Anti-Semites : A Program for Humanity, 1939 (sur archive.org), p. 52, 125, 132.

[18] Gilad Atzmon, Du tribalisme à l’universel, Kontre Kulture, 2015, p. 129.

[19] Benzion Netanyahu, The Founding Fathers of Zionism (1938), Balfour Books, 2012, kindle éd., k. 2203-7.

[20] Raphael Patai, The Jewish Mind, Wayne State University Press, 1977, p. 25.

[21] « Juif ? Selon Finkielkraut », sur Youtube.

[22] Otto Weininger, Sexe et caractère (1903), Kontre Kulture, p. 422

[23] Moses Hess, Rome and Jerusalem : A Study in Jewish Nationalism, Bloch Publishing Company, 1918, p. 48, 64-65.

[24] Henri Guillemin, L’arrière-pensée de Jaurès, Gallimard, 1966.

[25] John Steinbeck, Les Raisins de la colère (1939), Gallimard/Folio, 1972, p. 38.

[26] Leo Strauss, Pensées sur Machiavel, Payot, 1982, p. 42.

 

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  • #1690920
    Le 26 mars 2017 à 18:47 par JL29
    Le mauvais génie du judaïsme

    Excellent travail de Laurent Guyénot, j’attends (im)patiemment la suite.

     

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  • #1690942
    Le 26 mars 2017 à 19:33 par l’épie curien
    Le mauvais génie du judaïsme

    Grosse erreur concernant la philosophie matérialiste et l’athéisme qui en découle, qui s’oppose en tout point au judaïsme de l’ancien testament.

    La philosophie matérialiste est individualiste, contrairement au judaïsme qui d’après l’article ne conçoit la personne qu’au sein de la communauté.
    La philosophie matérialiste est immanente et rejette toute transcendance, corolaire, les lois sont faites par les hommes.
    Que ce soit hobbes ou Marx, ils défendaient tous deux une société où les hommes font la loi, et non la religion ou la tradition.

    Et surtout l’origine du matérialisme philosophique c’est la philosophie matérialiste de la Grèce antique, notamment Épicure.
    Ce qui rend caduque, en plus du reste les affirmations sur le lien entre la philosophie matérialiste et le judaïsme. Et ça devient encore plus faux pour l’athéisme, qui s’est construit contre les religions, notamment en rejetant tout ce qui venait de l’ancien testament.

    L’athéisme s’est développé en occident sur les philosophies grecques antiques, , la critique contre la religion, et la science, qui apportait une interprétation matérialiste du monde, sortant du carcan religieux.

     

    Répondre à ce message

    • #1691186
      Le Mars 2017 à 07:38 par mirza
      Le mauvais génie du judaïsme

      Intéressant cette critique. Merci de l’avoir faite.
      Pourrais-je apporter mon grain de sel/sable ?

      "La philosophie matérialiste est individualiste, contrairement au judaïsme qui d’après l’article ne conçoit la personne qu’au sein de la communauté."
      Pourquoi la philosophie matérialiste ne pourrait-elle pas exister à l’échelle d’une communauté ?

      Quant au reste de ton message, tu soulignes le rôle à juste titre l’influence profonde de la philosophie grecque sur la pensée rationnelle occidentale dont un des traits est l’athéisme. Mais là où Guyénot suggère que la religion juive est à l’origine profonde et exclusive de l’athéisme, tu le contredis en disant que c’est la pensée philosophique grecque qui est exclusivement à l’origine de cet athéisme.
      La vérité ne pourrait-elle pas se situer entre les deux, c’est à dire :

      La philosophie grecque a jeté les bases du raisonnement rationnel qui a sapé peu à peu les dogmes chrétiens lorsqu’ils étaient soumis à la critique logique mais cela n’a pas été suffisant en soi pour défaire les individus de leur croyance et les faire basculer dans l’athéisme. Il fallait la preuve éclatante du bien fondé du rationalisme à travers le matérialisme dont l’un des aspects est la société de consommation. La communauté juive, mue par ce désir collectif de réussite, a toujours oeuvré par et pour le capitalisme et la marchandise.

       
    • #1691381
      Le Mars 2017 à 17:04 par paramesh
      Le mauvais génie du judaïsme

      vous regardez encore par le petit bout de votre lorgnette, le matérialisme et l’athéisme ne sont pas des exclusivités occidentales, bien avant les grecs, les Indiens ont développé une pensée philosophico religieuse matérialiste et athée : le Nastika représentée principalement par les écoles Samkhya et Mimamsa (çà c’est pour être précis) le jaïnisme et le bouddhisme en sont les purs produits, comme quoi matérialisme ne rime pas obligatoirement avec immanence ou individualisme (notion totalement inconnue de la pensée indienne védique (le Nasika reconnait les Védas) et surtout l’athéisme n’est pas une négation de la religion mais une religion qui nie le principe divin ce qui n’implique pas non plus qu’il nie obligatoirement l’ unicité de l’être ou le principe de la cause première.
      Quand on connait en outre le lien de parenté structurel (philosophique et rituel) évident entre le brahmanisme et le levitisme, votre argumentation tombe définitivement à l’eau. désolé

       
    • #1691996
      Le Mars 2017 à 22:39 par Alba Wadi
      Le mauvais génie du judaïsme

      Tout à fait d’accord.

       
    • #1692221
      Le Mars 2017 à 12:41 par vivien
      Le mauvais génie du judaïsme

      Je me permets de répondre à Curien : l ’indiidualisme n ’ est pas contradictoire avec le communautarisme juif : quand la communauté organisée et solidaire gagne , ce sont tous ses membres qui s ’en trouvent avantagés individuellement ; "la philosophie matérialiste rejette toute transcendance " oui et la Bible aussi ! Guyénot le démontre : lis l ’ Ecclésiaste ; "les grecs ont amené les sciences" : oui mais la pensée positiviste est une réduction anti-scientifique qui ne pouvait éffeurer les grecs . Je reponds à Paramesh que la pensée de l ’ Orient est essentiellement l ’ acceptation du Destin , Amour de la Destinée ( l’ univers fût il tout matériel ) ;quant au Judaisme la Destinée ,il l ’ a fabrique (et la nôtre aussi par la même occasion ) et se prévaut d ’une mission divine pour cela ; il s en donne les moyens par le levier de l’ argent ; le judaisme est aussi un programma politique et une stratégie de pouvoir comme Soral l’ a souvent dit et comme Guyénot le démontre.

       
    • #1695185
      Le Avril 2017 à 10:12 par Borntogrowl
      Le mauvais génie du judaïsme

      Peut-être. Mais si on observe le monde, ce n’est pas la communauté grecque qui est toute puissante.

       
  • #1691183
    Le 27 mars 2017 à 07:26 par Mike
    Le mauvais génie du judaïsme

    C’est là le sens explicite d’un texte ésotérique, quand les personnages du Tanakh sont pris pour de véritables individus.

    A partir du 19ème siècle, beaucoup d’ordres spirituels ésotériques ont dévoilé le fait qu’ils représentent des constellations, que celles-ci meurent quand elles passent sous l’horizon occidental, et que cette mort désigne l’incarnation. On peut lire Robert Taylor ou David Mathisen à ce sujet.

     

    Répondre à ce message

  • #1691187
    Le 27 mars 2017 à 07:39 par mirza
    Le mauvais génie du judaïsme

    Très bon article. Merci M. Guyénot.

     

    Répondre à ce message

  • #1691223
    Le 27 mars 2017 à 09:17 par Jorong
    Le mauvais génie du judaïsme

    Laurent Guyénot ne sait manifestement rien des athées....Il ne comprend pas que l’athée n’est pas un croyant qui adhère à un dogme appelé athéisme. Il est incapable de comprendre que l’athée et le croyant ne fonctionne pas de la même manière. Quand le croyant croit, l’athée demande des preuves. Il se sert de la Raison, il vérifie la conformité d’une prétendue vérité, pour déterminer si s’en est une ou pas. L’athée ne rejette pas l’existence de Dieu, il refuse d’y croire. L’athée confronte la Bible au réel et s’aperçoit que ce texte présenté comme la parole de Dieu comporte des erreurs que ne commettrait pas le créateur de toute vie. Le modèle géocentrique biblique est faux.. Le récit du Déluge, une Terre sous les eaux 40 jours et 40 nuits, est incompatible avec la diversité des espèces, plantes et animaux, et à titre d’illustration, s’oppose à l’existence d’espèces endémiques comme les Kangourous. Le récit de l’Exode est lui aussi faux, puisque les historiens et archéologues s’accordent sur le fait que Moïse n’a jamais existé, que les ouvriers sur les chantiers égyptiens n’étaient pas des esclaves, et que jamais il n’y eu de mouvement aussi massif de population à l’époque considéré. Quand à la théorie de l’Evolution, l’athée n’y croit pas. Il se contente d’observer que cette théorie, dans son principe, est démontrée tout les jours. L’athée attends qu’un scientifique démontre qu’elle est fausse, publie sa découverte et décroche son prix Nobel pour considérer que la théorie est fausse.

    Voila Monsieur Guyénot, comment pense un athée. Vous auriez du en interroger avant d’écrire vos absurdités... athéisme et dogmatisme sont opposés..arrêtez de croire que tout le monde partage vos schémas de pensée...ce n’est pas le cas.

     

    Répondre à ce message

    • #1691263
      Le Mars 2017 à 11:25 par Titus
      Le mauvais génie du judaïsme

      L’athée croit que Dieu n’existe pas. C’est donc un croyant.

       
    • #1691315
      Le Mars 2017 à 13:39 par françois
      Le mauvais génie du judaïsme

      à lire votre message on se dit que l’athée n’a pas de cerveau

       
    • #1691415
      Le Mars 2017 à 18:18 par MP
      Le mauvais génie du judaïsme

      Cher Jorong,

      Athéisme et dogmatisme sont opposés pensez-vous... ? Justement pas, il est bien là le problème, ils nourrissent une même direction en utilisant différents moyens. L’ahtéisme est la négation à l’état pur ; le fait de nier en permanence, alors que le dogmatisme enrobe les choses de la manière qui convient ; il détourne. Et l’un dans l’autre l’être humain est toujours à côté de la plaque et l’ordre naturel n’est jamais respecté ! Vous savez la nature, les choses simples et primordiales nécessaires à l’être l’humain qui ne demandent, normalement, aucun effort intellectuel pour vivre la certitude et non pas avoir des croyances ni être en attente de justifications afin de valider si oui ou non il faut y aller sans jamais y aller pour autant. Cherchez donc ce que le diabole et le symbole signifient en réalité, ça vous aidera sûrement à calmer vos élans d’acidité.

       
    • #1691515
      Le Mars 2017 à 21:31 par Titus
      Le mauvais génie du judaïsme

      L’athéisme est une croyance qui n’est pas basée sur la raison ou la science, car aucune expérience scientifique n’a jamais montré que la vie pouvait naître de l’agitation et de la rencontre au hasard de molécules. L’expérience montre que le chaos ne construit jamais rien et que seul une intelligence peut élaborer une machine.
      L’athéisme est donc une croyance irrationnelle.

       
    • #1692077
      Le Mars 2017 à 04:25 par félicien
      Le mauvais génie du judaïsme

      Le problème est que la science est si courte ! on attendra des preuves jusqu ’ a la fin du monde ; il y a un autre mode de connaissance , celle de l ’ intérieur ; certains sentent la beauté artistique d ’autres fort peu ; pour Dieu c ’est pareil , c ’est un don . Pour ceux a qui Dieu s ’est manifesté il est une évidence bien plus forte qu ’une vérité scientifique toujours relative et partielle , mais cette évidence est incommunicable sauf un peu par les arts : Bach , Mozart ça parle de cette évidence de Dieu ou mettez le mot que vous voudrez : l ’ innommable . "on peut parler a Dieu , on ne peut parler de Dieu" .

       
    • #1692103
      Le Mars 2017 à 09:15 par Titus
      Le mauvais génie du judaïsme

      Le problème est que la science est si courte




      La science est limitée, mais elle est plus compatible avec l’existence de Dieu que l’athéisme. L’athéisme est un non-sens en sciences car la science suppose l’existence de lois éternelles, universelles et immuables régissant la nature. Or une loi, comme toute loi, est d’ordre immatériel (une loi n’est pas constituée d’atomes et ne pèse rien) et donc le produit d’un esprit, nécessairement.

      Tous les savants qui ont fait la science moderne, de Newton à Copernic en passant par Mendel, étaient des croyants. Sinon ils n’auraient pas commencé leurs recherches scientifiques. Car quand on recherche quelque chose, c’est qu’on sait qu’on peut le trouver...

       
    • #1692263
      Le Mars 2017 à 13:43 par Héraclef
      Le mauvais génie du judaïsme

      @ félicien

      "On peut parler a Dieu , on ne peut parler de Dieu" .

      Déjà si nous pouvions parler en confiance et plus entre soi(s), cela effacerait bien des images au sujet de Dieu.

       
    • #1692545
      Le Mars 2017 à 08:33 par kirua
      Le mauvais génie du judaïsme

      @Jorong, Voici la définition de l’athéisme de wikipédia :

      "Au début du XXIe siècle, l’athéisme est défini, notamment, comme l’absence ou le refus de toute croyance en quelque divinité que ce soit , Le terme s’oppose donc au théisme et est à distinguer de l’agnosticisme."

      Si j’ai bien comprit, vous vous considérez comme athée, pourtant votre définition de l’athée se rapproche plus de l’agnostique.

       
    • #1693451
      Le Avril 2017 à 09:21 par Fred
      Le mauvais génie du judaïsme

      @ M.P. "L’ahtéisme est la négation à l’état pur" : les athés seraient donc des "négationnistes" et à voir la quantité d’athés déferler sur les chaînes de télévison,on constate que l’État cautionne cela.

      @Joring "L’athée confronte la Bible au réel" : les athés seraient donc des "révisionistes" et à voir la quantité d’athés déferler sur les chaînes de télévison,l’État cautionne cela.

      Personnellement je ne cautionne pas le prosélytisme étatique actuel,mais je respecte le droit de chacun d’avoir ses opinions.

       
    • #1695186
      Le Avril 2017 à 10:16 par Borntogrowl
      Le mauvais génie du judaïsme

      La raison n’a de finalité qu’elle même.

       
    • #1706320
      Le Avril 2017 à 21:12 par Joss
      Le mauvais génie du judaïsme

      L’athéisme, c’est la Divinité qui joue à cache-cache avec elle-même. (sagesse hindoue).

       
  • #1691386
    Le 27 mars 2017 à 17:21 par Henri
    Le mauvais génie du judaïsme

    Interprétation très partiale des écritures hébraïques. Pour le moins.

     

    Répondre à ce message

  • #1691578
    Le 27 mars 2017 à 23:30 par homme_des_forêts
    Le mauvais génie du judaïsme

    « En définitive, le déni de l’âme individuelle, qui peut apparaître comme une terrible lacune du judaïsme primitif, est en même temps ce qui fait la force du peuple juif en tant qu’âme-groupe. Car l’individu n’a que quelques décennies pour accomplir son destin terrestre, tandis qu’un peuple dispose de siècles, voire de millénaires. »

    Résumons, donc pour les Juifs, âme commune, réincarnation dans le grand tout, où seul la tribu compte et le matérialisme qui va avec ;

    Pour les Chrétiens, âme individuelle, pas de réincarnation, où la repentance est de mise et le don de soi au bénéfice du grand tout ;

    Pour les Bouddhistes, réincarnation de l’esprit corps après corps sous l’emprise de l’ignorance et d’actions contaminées qui axe sur le but d’être dans le juste ;

    C’est vraiment résumé, et si concis mais il me semble se dégager que le Judaïsme et le Christianisme sont deux opposés et que le Bouddhisme soit situé à l’intersection de ces deux pôles en terme de vision.

     

    Répondre à ce message

  • #1692007
    Le 28 mars 2017 à 22:59 par Alba Wadi
    Le mauvais génie du judaïsme

    Pourquoi marquer si négativement la corporalité ? Et pourquoi déprécier le "matérialisme" qui regarde au sol plutôt que de repousser la félicité et la vérité dans un arrière-monde ? C’est peut-être précisément le bon aspect de la pensée juive

     

    Répondre à ce message

  • #1692017
    Le 28 mars 2017 à 23:10 par Alba Wadi
    Le mauvais génie du judaïsme

    Le grand crime du judaïsme c’est d’avoir inventé l’exclusivité religieuse. Vos purs et braves catholiques s’y sont effondrés aussi...

     

    Répondre à ce message

  • #1693428
    Le 1er avril 2017 à 03:45 par FranckT
    Le mauvais génie du judaïsme

    Et moi qui, il ya quelques années me disais athée puis agnostique.

    La vie du Christ est riche d’enseignements. L’audit qu’il a réalisé de son vivant rend compte de plusieurs écarts significatifs dans la société des hommes. Jésus (auditeur pour le compte du dieu unique) n’a pas certifié le royaume d’Hérode. Bien au contraire. Le prophète suivant reprendra l’audit de Jésus augmenté d’une action corrective et préventive. Al-Ihsãn

    La France est pagano-chrétienne depuis l’origine avec une Eglise Catholique, le matérialisme n’existe pas au pays du Christ-Roi.
    Si « en France autour de la révolution française, la lutte n’était pas d’essence constitutionnelle mais d’essence religieuse. [...] lutte entre deux philosophies radicalement opposées. L’épopée vendéenne illustre ce propos puisque au nom de la liberté de conscience, les républicains ont massacré le petit peuple de toute une province dont le seul crime était de vouloir rester catholique. [...] L’idéologie nouvelle, la philosophie des lumières en se faisant appelée ainsi, montre qu’elle voulais se substituer à l’enseignement du Christ, [...] la lumière du monde. Elle est aussi totalement opposée à la philosophie chrétienne. [...] La philosophie des Lumières ne peut admettre aucun ordre, pas plus naturel que surnaturel, auquel l’homme doit se soumettre. Seul compte dans ce monde la volonté de l’homme, indépendante de toute transcendance, en sorte que, ce qui est bien un jour peut être mal le lendemain et inversement. ».

    Puisqu’en 1877 Gambette déclare : « Nous avons l’air de combattre pour la forme d’un gouvernement [...] ; la lutte est plus profonde. La lutte est entre ce qui reste du vieux monde dans les mains de la théocratie romaine, et les fils de 1789. ».

    Si l’on considère ensuite le ralliement de l’Eglise aux républicains car « ce qui est populaire c’est moins la République que l’anticléricalisme. ».

    Alors nous avons en France une philosophie matérialiste en sommeil qui va se réveiller par la lumière révolutionnaire. Cette philosophie des droits de l’homme aboutira à l’athéisme et à sa victoire, favorisant la propagation du scientisme, noachisme où théorie du genre et multivers seront les bienvenus.
    Indéniablement, il est plus facile de remplir un pot vide qu’un pot plein.
    Au final, pour les Goys c’est “mon c*l sur la commode”, Shoananas" censuré et “la minute de la Mémoire” !
    Les grecs, comme disait Laplace à Napoléon : « Je n’avais pas besoin de cette hypothèse. ».

     

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