« On peut donc déduire que ce qui est réel est vrai » : Non. La justesse d’une proposition est mesurable à sa reconductibilité et à son universalité. Par analogie, si vous dites à une personne que vous l’aimez sincèrement, d’un strict point de vue conceptuel, votre amour est une réalité phénoménologique qui ne peut toutefois pas candidater à l’ordre des vérités. En effet, la vérité n’est en aucune façon conditionnée par la validation du réel.
Pour preuve : Vous attendez dans un wagon à l’arrêt, tandis que le train parallèle se met en marche. Une subtile illusion d’optique trompera vos sens, altèrera votre perception du réel, pour imprimer dans votre œil la sensation de mouvement : votre corps entier aura l’impression que votre train immobile se déplace, au même titre que celui d’en face. Par conséquent, tant que la finitude et l’imperfection de nos sens constituent une entrave à l’acuité de notre perception des réalités, cette anamorphose perceptive résultant de notre bornage ontologique invalide toute équivalence entre réalité (notre saisie circonscrite des phénomènes) et vérité (l’immensité indondable de l’étant).
Autre analogie à l’appui de l’idée platonicienne d’un découplage entre la vérité et notre réalité : La terre tourne en permanence. Ceci est une vérité. Pour autant, vous ne tanguez pas lorsque vous êtes debout, comme si vous étiez embarqué sur un océan démonté. Votre réalité corporelle et sensorielle ne vous signalent pas que la terre tourne. Et pourtant, en vérité, elle tourne.
Conclusion : le divorce entre le réel et le véridique est acté par le filtre intellectif et le plafond de verre perceptif qui rendent impossible la saisie organique et cognitive des vérités.
« l’absolu qui n’a besoin de rien d’autre pour exister, c’est la matière et non pas l’esprit. » : Faux. La matière, qui n’est jamais inerte, puisque même morte, elle continue son processus de corruption et de dégradation, obéit à des cycles saisonniers, aux lois de la magnétique telles que mises en évidence par la science physique, au principe de la géo-physique, selon un schéma palingénésique de perpétuel recommencement du même : cette dynamique de fonctionnement possède une intelligence propre et s’appelle la loi de la nature, laquelle découle d’une intelligence organisatrice : Dieu. Attendu que toute loi est rationnelle, il est loisible d’en déduire que l’intelligence innée de la matière l’assujettit à l’esprit.