« À l’origine du mal, il y a l’idée du “mâle”. Il est quand même incroyable que depuis plusieurs dizaines de milliers d’années – déjà à l’époque du prénéandertalien il y a 750 000 ans –, les hommes aient organisé le retrait et la soumission des femmes à la fois physiquement et moralement ! Françoise Héritier avait déjà théorisé cette “valence différentielle” des sexes. On a ostracisé les femmes et, au néolithique, il y a près de 30 000 ans, on s’est carrément mis à les traiter en objets, en choses à disposition des hommes dont ces derniers tirent prestige et pouvoir. »
- Raphaël se refuse à démonter les femmes (parce qu’après il faut les remonter)
Ce que Raphaêl Liogier oublie dans son entretien au Temps, c’est que l’homme est programmé pour regarder le cul des femmes [1], et que tout découle de cet impératif catégorique. La culture, c’est justement de ne pas lui mettre tout de suite la main au cul (à la femme, pas à la culture), mais de l’approcher avec suffisamment de sournoiserie (ben ouais quoi) pour ensuite, une fois apprivoisée, lui mettre la main au cul au pieu en toute impunité.
Cela s’appelle la drague pour ceux qui manquent de vocabulaire, ou l’éternel jeu de séduction hommes/femmes pour ceux qui en ont, et les femmes en raffolent, quand c’est bien fait, évidemment. Pas question de cautionner le taré crado qui pelote les gonzesses dans le bus ou se frotte contre elles dans le métro, même si elles sont habillées provo. Les nanas vulgaires n’étant d’ailleurs pas forcément les meilleures en amour, au lit ou dans la vie...
Nous qui sommes civilisés (partiellement) refusons l’amalgame entre le dragueur qui aime les femmes et le malade sexuel qui dérive vers le viol !
« Je crois que les hommes ont peur que les femmes se mesurent à eux. Françoise Héritier, là encore, parlait déjà de cette fascination masculine pour le pouvoir reproductif des femmes. J’essaie de montrer dans mon livre qu’à cela s’ajoute la volonté de contrôle de la jouissance des femmes en leur imposant la pudeur, le retrait, voire le silence. Cette dévalorisation systématique des femmes m’a mené à penser que le complexe de castration est en réalité masculin, contrairement à ce qu’a affirmé Freud : ce sont les hommes qui craignent d’être impuissants (d’où le sens d’abord sexuel de l’impuissance) face aux femmes, et c’est pour ça qu’ils cherchent à les empêcher de participer à la compétition sociale. Comme l’écrit Simone de Beauvoir : “Nul n’est plus arrogant à l’égard des femmes, agressif et dédaigneux, qu’un homme inquiet de sa virilité”. »
Pour Liogier, les hommes auraient peur des femmes. Là on est d’accord avec lui : Caroline Fourest nous fait peur, la folle de Tolbiac nous fait peur, Madonna nous fait peur...
- Caro ne comprenait pas pourquoi Tariq avait une telle pudeur sur ses sentiments : n’avait-elle pas crié son amour pour l’homme qu’elle chérissait ? Pourquoi ne disait-il rien ? Que pensait-il ? L’aimait-il vraiment ? Parfois, elle avait envie de le gifler.
« J’ai réalisé que l’immense majorité de ces femmes ne cherchaient ni un règlement de comptes, ni un puritanisme excessif, ni un tribunal populaire pour faire tomber X ou Y, mais juste à remettre en cause la base de l’inégalité : le regard masculin sur le corps des femmes, qui en fait un objet et non un sujet. »
Pas faux sur les règlements de comptes sauf pour les actrices démonétisées d’Hollywood, ce qui ne retire rien à la malfaisance (mâle-faisance aurait écrit Lacan avant de sauter une de ses patientes cherchant l’Orgasme que sa lâcheté de bourgeoise lui cache) d’un Weinstein. Le porc sexiste a été attaqué mais pas le vilain sioniste, c’est heureux. Cela explique les tortillages du cul des deux côtés de l’Atlantique quand on touche à un mogul de ce calibre.
Liogier s’en prend même aux faux féministes, ces hommes qui n’en font pas assez dans le genre :
« Parce qu’il est très difficile de prendre conscience du fait qu’on participe tous, en tant que partie prenante de la société, à la perpétuation de ces stéréotypes et de ces inégalités ! Les pires, ce sont les hommes qui sont convaincus d’être féministes, progressistes, et qui ne réalisent même pas ou n’admettent même pas qu’ils portent un regard sexiste sur le corps des femmes. Ils constituent le cœur du problème, “l’armée générale” qui permet à cette culture misogyne de se perpétuer de siècle en siècle. On en connaît tous ! Ce sont ceux qui se disent féministes mais vont aller se vanter auprès de leurs amis d’avoir “démonté” leurs conquêtes au lit, qui vont faire la blague lourde, qui vont faire preuve de jalousie rétrospective en essayant de savoir avec combien d’autres hommes a couché leur copine avant eux, qui vont regarder une jupe et penser, sans le dire, “quelle salope” – ou le fameux “elle s’est fait agresser, d’accord, mais elle était habillée comment ?”. C’est ce que j’appelle “le paradigme Bertrand Cantat” : ceux qui se disent et se croient progressistes mais qui dans l’intimité ne sont pas capables d’introspection – et on sait où ça peut mener. Or, il y a un moment où il faut être sérieux : soit on est pour l’égalité et on sort de ce regard-là sur le corps des femmes, soit on ne l’est pas. »
OK, OK compris, on va arrêter de mater le cul des femmes. On va essayer d’aller contre nos instincts les plus vils. En attendant, puisque Liogier se pose en anti-Cantat, ce dernier, qui a vu ses deux concerts annulés à l’Olympia, vient d’annoncer qu’il allait faire un Zénith le 7 juin. Et pourquoi pas le 8 mars ? Si on suit la logique du Liogier, on est tous des Cantat en puissance.
- La femme de droite n’a pas évolué, par exemple
Punaise, à cause de deux mecs qui ont déconné à mort avec leurs gonzesses, Cantat et Ramadan, qu’est-ce qu’on se mange sur la gueule ! Nous voilà ravalés au rang de prénéandertaliens ! On n’a pas évolué d’un iota depuis 750 000 ans ! Mais ça, c’est un peu à cause du cul des femmes : pourquoi est-ce qu’elles ont un cul toujours aussi attirant, ces salopes ? Elles auraient pu en 750 000 ans évoluer en perdant leur cul et leurs nichons, mais non ! Salopes !
Pour clore cet hommage au féminisme sur une note détendue, voici une interview de Liogier sur Nova, avec l’introduction innocente de l’animateur, « merci de venir passer l’Heure de Pointe avec nous » :