Samedi 13 mai, à Villejuif, devant un auditoire recueilli d’un millier de bobos insoumis, s’est tenu la réunion des candidats aux législatives de la France Insoumise. Candidats soigneusement épurés de leurs brebis galeuses comme la journaliste Chenon Ramlat pour cause de « soutien d’Assad » et de « négationnisme ».
L’ex-Sénateur (mais sénateur un jour sénateur toujours) Mélenchon, drapé dans la toge pourpre du Tribun de la Plèbe, vint conclure ces agapes. Son discours fut beau comme l’Antique, l’élite d’Île de fRANCE inSOUMISE se soumettait à son verbe puissant ! L’électricité passait dans l’auditoire survolté qui scandait par moment « Résistance, résistance ! » comme un seul Ohm.
À la fin, les néo-papas barbus tendirent leurs bébés convenablement langés, vers le Sénateur ! Leurs compagnes tendaient leurs poings, avec des trémolos suraigus, admirablement discordants. À certains moments, je sentais que dans une autre existence, débarrassée du lourd fardeau de la conscience, j’aurais pu m’accorder à certains des propos tenus, du genre :
« Les communes, matrices des libertés des Françaises et des Français, c’est là qu’a commencé la République » !
ou encore :
« Un énorme coup de tonnerre se prépare avec l’abrogation du Code du travail » !
« un projet de contre-réforme, de contre-révolution, une violence sociale terrible » !
[remettant en cause]
« un siècle et demi de lutte de classe dans notre pays ».
« C’est pour cela que Macron veut les pleins pouvoirs »
Rien n’est plus vrai. Le code du Travail participe de ce qui fonde la classe ouvrière comme une classe, et non comme une servile réserve taillable et corvéable à merci.
Face à ce projet de « contre-réforme d’une violence sociale terrible », QUE FAIRE ?
« Mettre en échec la constitution de la majorité macroniste dans c’pays ! (…). On peut renverser la situation, c’est le moment ou jamais ! »
Diable ! Le Sénateur sur le retour, par un mouvement orbital cyclique reviendrait-il au trotskisme de sa prime jeunesse ?
Debout les damnés de la terre, debout les forçats de la faim !
Assis, les bobos désorbités, la bouche ouverte, se regardaient, inquiets, en attendant la Chute.
Elle vint !
On ne saurait tomber de plus haut !
« La France insoumise propose aux électeurs d’organiser une nouvelle cohabitation ! »,
Ouf, on respire ! L’odeur de poudre des révolutions se dissipe, ce n’était que de la poudre aux yeux. C’était donc ça renverser une situation ! Non pas la renverser dans la paille pour la prendre, de gré ou de force, mais lui tourner virilement le dos, la priant de bien vouloir nous mettre !
Retour à Syriza, retour à l’électoralisme, cette science magique pour dindes votantes, qui ne spécule qu’en terme d’électorat, et non de classe sociale. Retour à l’idéologie contre l’histoire, à l’État contre la démocratie.
On avait bien compris, par la composition du « nouveau » gouvernement Macron que son projet visait à une large cohabitation, à l’image de la « grande coalition », social-démocrate + chrétien-démocrate teutonique. Hé bien, cette promiscuité politicarde, ce concubinage de gouvernement, le Sénateur veut en être ! Comme un vulgaire LR ou PS, FI veut co-gouverner, apporter sa caution au projet « de contre-révolution, d’une violence sociale terrible » !
Et pour étayer son projet, le Sénateur donna en exemple le gouvernement de cohabitation Chirac-Jospin (1997-2002) !
« La cohabitation de Lionel Jospin pendant cinq ans a été un des moments les plus positifs de la vie économique française ».
Positif, mais pour qui ? Comme bilan de son gouvernement, Jospin avait réclamé la reconnaissance du MEDEF qui la lui accordera volontiers. Mais pas la population laborieuse qui en 2002, par une abstention exceptionnelle, du jamais vu lors d’une élection présidentielle, a balancé Jospin dans la poubelle de l’histoire. La suite on la connaît : ce que Lionel Jospin appellera « du théâtre ».
Le théâtre de l’antifâchisme institutionnel. Des semaines durant, il nous fallut subir quotidiennement ces monstrations destinées à humilier et à affaiblir l’abstention des ouvriers décriés comme « sales collabos et populistes » ! Plus de 50 % d’abstention pour l’élection de sa majesté le Président, tout l’appareil d’état vacilla : l’élection du président-monarque étant la clé de voûte de la Cinquième République, dans la tradition la plus Louis-Philipparde du Roi bourgeois.
Petit rappel des haut-faits du gouvernement Jospin
Aucun gouvernement avant celui-là, de mémoire de Cinquième, n’avait plus privatisé, plus déréglementé, davantage mis en œuvre de contre-réformes ayant entraîné des souffrances accrues pour le peuple travailleur. Le Sénateur le sait bien, il en était ministre ! Le gouvernement de Lionel Jospin pendant cinq ans :
privatisé EDF-GDF
mis en application le plan Juppé sur la Sécurité sociale, qui avait pourtant dressé contre lui des millions de gens
mis en place l’euro, qui divisé le pouvoir d’achat par sept
« annualisé » et « flexibilisé » le temps de travail
aboli la loi interdisant le travail en dessous de 16 ans
contre-réforme de l’enseignement technique et professionnel, et cette contre-réforme fut concoctée par... le ministre Jean-Luc Mélenchon himself !
Et, cerise féministe sur le gâteau capitaliste , cet infâme gouvernement a osé rétablir le travail de nuit des femmes dans l’industrie ! Qui était interdit par le Code du travail, précisément !
Cette régression sociale inouïe s’est faite au nom de « l’égalité homme-femme ! » Au nom de la Parité, autre conquête majeure du gouvernement de la gauche plurielle qui fut nommé « le plus féministe de l’histoire » !
Alors, en 2002, les ouvrières livrées au travail de nuit refusèrent de voter, et les petites bourgeoises antifâchistes, qui sont toutes aujourd’hui au Parti de gauche, manifestèrent pour traîner dans la boue cette superbe abstention ouvrière !
Du féminisme réel
Le gouvernement de la gauche plurielle fut un des exemples les plus aveuglants de la nature réelle du féminisme. De la main droite il a institué la Parité obligatoire et de la gauche il a rétabli le travail de nuit pour les femmes, il fut à la fois le plus féministe et le plus ennemi des femmes !
Ce fait, comme tant d’autres, est si aveuglant qu’on ne l’a pas vu. On appelle désormais féminisme la défense ou la protection des femmes, une forme de galanterie.
Prendre le mot pour la chose.
Il y a un féminisme idéal, un idéal du féminisme, en dehors des faits et gestes des féministes, en dehors du féminisme institué, qui serait intrinsèquement bon. Ainsi tout le monde porte son petit féminisme à soi, sa petite idée du féminisme ; dans féminisme il y a féminin, c’est donc qu’il doit bien contenir une part aimable, une défense des femmes, de la « condition de la Femme », n’est-ce pas ? [1]
La défense des femmes, des femmes réelles, qui vivent et meurent, qui peinent et enfantent, nos filles, nos sœurs, nos compagnes, n’est pas, n’a jamais été, l’objet du féminisme. Son objet, sa vérité ultime, ce qu’il est en nature et en vérité, je l’ai donné dans une forme théâtrale dans L’Enfer de Don Juan, qui n’est pas seulement un divertissement comique, mais l’expression de la vérité.
FI, Farce Insipide
Oui, Ô Sénateur, le gouvernement Jospin est un bel exemple à suivre pour une fRANCE inSOUMISE, insoumise au peuple et à la classe ouvrière.
FI n’est qu’une grosse dinde pleine de farce électorale. De la chair qui s’est faite autour de l’os. La chair c’était les travailleurs qui ont voté Sénateur comme une continuation dans les urnes de leur marche dans la rue pour défendre leur Vieux Code du Travail.
L’os, c’est le Parti de gauche, dont vous pourrez lire la naissance glorieuse ici, si le cœur vous en dit.