Alors que l’on se rapproche de plus en plus de l’hypothèse d’un défaut de la Grèce, deux lignes d’arguments commencent à être développés par les eurolâtres de tout poil : la « catastrophe » qu’une sortie de l’euro entraînerait pour la Grèce, mais aussi, plus subtilement, le fait qu’une telle sortie, affaiblissant, voire compromettant la survie de l’euro, ferait en réalité le jeu des États-Unis. Cet argument est aujourd’hui mobilisé tant par des hommes politiques du centre-droit (François Fillon et Alain Juppé) que du centre gauche (essentiellement au P « S »).
Sur le premier argument, je renvoie les lecteurs à ce que j’ai écrit, et ce que tout le monde connaît. La situation de la Grèce est – hors le problème de la dette – relativement assainie aujourd’hui avec un quasi-excédent primaire (autrement dit les dépenses « hors dettes » sont couvertes par les recettes) et un déficit extrêmement faible de la balance commerciale. Une dépréciation de la nouvelle monnaie (la Drachme ?) de 20% à 30% serait suffisante pour que la Grèce devienne excédentaire du point de vue de la balance commerciale.
Quant au risque d’inflation, compte tenu des pressions déflationnistes extrêmement fortes aujourd’hui dans l’économie grecque, il est des plus réduit. Une dépréciation de -30% devrait entraîner une hausse des prix de 6% la première année et de 4% la seconde. C’est donc le second argument qui apparaît le plus « intéressant » car il cherche à retourner la réalité des faits.
1 - Aujourd’hui (et depuis en réalité 2010) les États-Unis ont pris position en faveur de l’euro :
Ce sont eux qui ont fait pression sur le FMI pour qu’il assouplisse sa position. Mais, nous ne sommes plus dans la situation des années 1980 ou 1990. Les États-Unis ne sont plus tout puissants au sein du FMI, même s’ils conservent une voix dominante. Cela explique en partie les embardées dans la communication de cette institution, qui d’une part reconnaît que la dette grecque n’est pas soutenable, et de l‘autre exige le paiement des intérêts. Mais il faut savoir que les prêts du FMI se font, en général, hors des conditions de marché, et que leur contrepartie est que ces prêts ne peuvent être renégociés que dans un cadre global, si tous les acteurs (et tous les prêteurs) sont d’accord pour une telle renégociation.
De plus, Mme Christine Lagarde, l’actuelle directrice du FMI, doit tenir compte non seulement des voix allemandes au sein de l’organisation mais aussi de la diversité des opinions selon les divers départements du FMI. Présenter le FMI comme un « obstacle » à un règlement est faux. Le véritable obstacle n’est pas sur les bords du Potomac, mais à Berlin. Dire cela n’excuse pas les erreurs qui ont été commises par le FMI sur la question grecque, mais doivent cependant conduire à les relativiser. La Commission de européenne et la Banque Centrale Européenne ont eu une politique bien plus nocive que le FMI, et les conséquences de cette politique ont été largement plus désastreuses que celles du FMI.