Le mois de mai a ceci de spécial qu’il est le mois des révolutions, des émeutes, des colères, ces colères congelées pendant l’hiver. Au printemps, il fait beau, on peut sortir dans la rue gueuler contre le pouvoir. En général, ça sert à rien : les pauvres finissent toujours par se faire entuber.
Un Noir se fait flinguer, et toute la communauté noire se réveille, saison 150, épisode 434. Avant de se rendormir profondément, politiquement. Réclamer justice au pouvoir blanc, même incarné par un Noir, suprême astuce, revient à demander au KKK d’accepter le mariage mixte, ou aux Texans de rendre leur État aux Mexicains. Bien sûr que l’Amérique est violente et raciste, c’est inscrit dans ses gènes, mais c’est aussi le pays des stars noires, du moment qu’elles produisent du dollar. Où sont les stars noires communistes, dissidentes ? Où est la preuve de l’antiracisme américain ?
145ème anniversaire de la naissance de Lénine, l’homme qui installa à coups de botte cette plouc de Russie sur les rails de la superpuissance. L’homme qui fracassa les certitudes des politiciens et des capitalistes de l’Ouest avec quelques phrases bien flippantes, qui réveillèrent les dominés de l’Occident. L’épouvantail communiste a disparu provisoirement, mais il ne fait aucun doute qu’il reviendra, plus fort : les premiers chrétiens ne faisaient-ils pas rigoler le pouvoir totalitaire romain ?
40ème anniversaire de la chute de Saïgon, prise par les forces du Nord-Vietnam. Un pays agricole et artisanal a eu raison de la superpuissance américaine, au prix d’un sacrifice inouï, un million de combattants et le double de victimes civiles. Ce pays communiste s’ouvre peu à peu aux touristes occidentaux, et à l’économie mondiale. L’embargo américain, double peine, ayant été levé il y a 20 ans seulement. Depuis, les États-Unis sont devenus le principal partenaire à l’export des Vietnamiens. Être capable d’un tel pardon, ça c’est de la grandeur.
Avoir serré les dents deux fois, la première pendant les galipettes de son mari avec la grosse suceuse du Mossad, la seconde pendant l’investiture imprévue du Noir Obama, autorise Hillary à enfin se présenter aux futures présidentielles. Entre-temps, elle se sera occupée de politique étrangère, menaçant par exemple de rayer l’Iran de la carte en cas d’attaque d’Israël. Plus conne, tu meurs dans un mauvais hamburger.
Tiens, les Américains découvrent – tardivement – la grève. Au pays de la réussite et du bénéfice roi, cette forme de management du pauvre est assez mal vue. Cela n’a pas empêché quelques employés inconscients de McDonald’s de réclamer une hausse de salaire. Vous avez qu’à travailler plus, bande de pauvres cons, aurait dit Sarkozy, notre ex-président franco-américain englué dans les affaires chelou.
En attendant le retour du Bonaparte de Neuilly, tout juste capable d’éliminer sous les bombes celui qui aura contribué financièrement à sa campagne de 2007, le président par intérim François Hollande tente d’amadouer la chancelière de l’Allemagne, seule puissance européenne capable de résister à l’impérialisme américain. On se croirait revenus en 42 ! En tous les cas, la révélation des écoutes allemandes de l’Élysée et du quai d’Orsay (de 2001 à 2013) permet à Samuel Valls d’obtenir auprès de Bruxelles un petit sursis en matière de déficit de son budget. La politique, c’est avant tout savoir jouer avec les faiblesses de l’adversaire.
Un casque en prévision des coups qu’il va prendre sur la tête en 2017 ? Une coquille d’œuf sur la tête comme le petit poussin poissard Calimero ? L’homme des Israéliens, et surtout de son épouse Gravoin, la magnifique dominatrice qui lui fait danser Rabbi Jacob au son du violon du ghetto, fait le dur devant les foules. Avec lui, le fascisme, le racisme, le populisme, le soralisme, l’antisémitisme et le terrorisme ne passeront pas. Sauf que tous ces trucs, c’est comme les ondes radio, ça traverse le corps, et le corps social. C’est pas comme les pierres.
À Ramallah, restrictions de budget obligent, on se bat contre la puissante armée israélienne, cette partie avancée de l’armée américaine au Proche-Orient, avec des pierres, des lance-pierre, et les briques qu’on ramasse dans les ruines des maisons écrasées sous les bombes. L’impérialisme, condamné à la répression, est condamné par la répression.
Merci à l’Arabie saoudite pour avoir fait découvrir, grâce à ses bombardements, le Yémen au grand public mondial. Ce Yéménite exhibe un reste d’obus. Le Yémen est le nouveau théâtre du conflit frontal Iran/Arabie, auparavant indirect. En Syrie, ce sont les Gardiens de la révolution (iranienne) qui donnent un coup de main à l’armée d’Assad et aux forces spéciales du Hezbollah. Ceux qui craindraient une extension de l’agression américano-israélienne au Moyen-Orient peuvent aller se rhabiller : elle s’étend désormais en Afrique et en Asie mineure, jusqu’aux frontières de la Chine. Vous avez dit petite guerre mondiale ?
Heureusement, nos joyeuses contrées occidentales ne sont pas touchées. Ici, la color run parisienne bat son plein, aux pieds de la Tour Eiffel. Les occidentaux aiment noyer leurs soucis dans des trucs collectifs à la con, totalement inoffensifs pour le pouvoir : nuit blanche (à l’arme blanche), fête de la musique, des couleurs (à dominante rose), danses débiles, happenings de trouducs… un voile de connerie devant le Réel que seuls les attentats déchirent. Ça change des manifs de sidérurgistes ou des explosions de colère zouloues.
Nous qui croyions que les victimes du racisme ne pouvaient pas l’être elles-mêmes… Remarquez, quand on voit les pouvoirs militaires fascistes se succéder à Tel-Aviv, on se décille les yeux. En ce moment, en Afrique du Sud, ce vieil ami d’Israël, surtout pendant l’Apartheid, c’est la semaine commerciale de la xénophobie. Le roi zoulou Goodwill Zwelithini a demandé aux travailleurs immigrés africains de faire leur valise. La valise ou le cercueil, un dilemme toujours d’actualité.
La valise ou le cercueil, pour pas mal de migrants venus des côtes libyennes, c’est devenu la valise ET le cercueil. Poussés par la misère, les illusions ou le manque de perspectives, une partie des forces vives de l’Afrique débarque chez nous, mais pas à la manière des Américains sur les côtes normandes en juin 44. Les barges de débarquement sont un peu moins élaborées ; en revanche, les envahisseurs bénéficient de l’absence de tirs de barrages côtiers. Pas de batteries européennes pour les couler. Ceci dit, ils ne sont pas vraiment attendus comme le messie, sauf par quelques Parisiens de la gauche du cœur, antiraciste et internationaliste.
Un migrant de plus, ça mange pas de pain. L’empathie, c’est sympa, mais en l’occurrence, ça sert à rien. Tout le monde sait que l’origine du problème, c’est le sous-développement économique là-bas, et le chômage de masse ici, deux purs produits de l’impérialisme capitalistique, qui se goinfre les richesses du sous-sol pas chères là-bas, et vire les gens trop chers ici. L’idéal, pour le système, serait donc une France peuplée de travailleurs africains pas chers – les Blancs étant au chômage – et une Afrique pas suffisamment forte pour se défendre contre la prédation économique. Finalement, ce bobo n’a pas tort, sauf que dans son émotion humaniste, il ne dispose peut-être pas du plan d’ensemble.
Un qui s’est bien échoué aussi, c’est ce gros cachalot de 15 mètres. L’homme ne s’occupe que de l’homme, et il a tendance à oublier, dans son égoïsme congénital, les autres créatures, avec qui il partage la Terre. Mais les animaux sont comme les Indiens au XIXe siècle : les envahisseurs européens réduisent progressivement leur espace vital. Il reste les grandes réserves africaines, qui subissent la pression du développement agricole, et les zoos européens, qui annoncent la disparition des grands mammifères du quaternaire. Et logiquement, le prochain sur la liste, c’est l’Homme.
Justement, pour aller plus vite vers sa fin, l’homme n’a pas renoncé aux ethnocides, génocides et autres massacres interhumains. Il y a 100 ans, les Turcs, en guerre sur tous les fronts, extérieur et intérieur, déclenchaient l’élimination d’un million et demi d’Arméniens, avec l’arrière-pensée de neutraliser les soulèvements nationalistes dans l’Empire ottoman, et de récupérer les territoires arméniens en Asie mineure (Anatolie). Heureusement pour l’État turc un peu crétin, qui nie en bloc malgré les évidences, les Arméniens de la diaspora n’en ont pas rajouté dans la surmédiatisation et l’obtention d’avantages politiques ou pécuniaires.
Ce n’est pas le cas des juifs, qui ne laissent pas passer une occasion, même ridicule, de rappeler le nazisme, la souffrance juive, histoire de passer pour les gentils et faire oublier les exactions du présent. Ici, le procès grotesque d’Oskar Gröning, 93 ans, le comptable d’Auschwitz. Bientôt, on va devoir se taper le procès du boulanger de Treblinka, et du jardinier de Sobibor.
Jusqu’où vont-ils descendre, pardon, remonter ?