Or donc, la racaille parlementaire a adopté hier, par 355 voix (socialistes, écologistes) et 21 voix UMP, la loi ferroviaire dictée par l’Union européenne, malgré la grève des cheminots, trahis par leur direction.
Cette loi éclate la SNCF en 3 opaques EPIC (établissements publics à caractère industriel), démantelant ainsi l’ancien monopole de service public pour livrer le Rail à sa privatisation complète au nom de sainte « concurrence libre et non faussée ».
La SNCF était d’ores et déjà un trust semi privé. Quant à sa dette, elle s’est creusée, non pas à rouler les voyageurs mais à enrichir des trusts comme Alstom, qui s’est fait une fortune sur les traverses du Rail.
Demain, totalement démantelé, les "Usagés" seront les premier à en pâtir !
Allez donc demander aux anglais ce qu’ils pensent de la privatisation du Rail !
Pourtant le Chemin de fer français est une entreprise historique vieille de 77 ans ! Elle devrait être propriété nationale !
C’est dans cette optique, pour le retrait total du projet loi que luttaient les cheminots. Et non pour obtenir des « amendements », petits mots changés dans le texte de la loi qui ne changent rien quant au fond.
« Grâce à notre action, des amendements ont été déposés et il semblerait à l’heure qu’il est que le gouvernement tienne compte de ce rapport de forces qui s’est instauré » déclarait frauduleusement monsieur Lepaon qui dirige la CGT.
Avis partagé, au nom du PCF, par Mme Buffet et M.Chassaigne qui se fit le héraut de cette mystification.
Dès le début ce M.Lepaon avait d’ailleurs clairement fait part de son hostilité à une grève reconductible.
« Le fait que la grève se prolonge n’est pas bon ni pour les usagers ni pour les agents de la SNCF » disait-il.
L’arnaque fondamentale c’est que la direction stalinienne de la CGT-PCF avait préparé cette privatisation du Rail !
Par le rapport de M. Lepaon en personne, sur « l’ouverture à la concurrence des services ferroviaires régionaux de voyageurs », séance du 27 juin 2012 au Conseil Economique, Social et Environnemental, le CESE.
Car M. Lepaon est membre émérite du CESE ! Son rapport est un morceau de bravoure de la trahison stalinienne. Comment tromper les travailleurs ! Une leçon de chose aux gouvernants afin d’éviter que les cheminots ne lèvent le « chiffon rouge »[SIC] de la grève contre la privatisation ! Ce sont les termes mêmes de M. Lepaon :
« Il n’aura échappé à personne dans cette assemblée que la locution ’’ouverture à la concurrence’’ appliquée à un noyau dur du service public peut agir immédiatement comme un chiffon rouge. Dans le monde ferroviaire, agiter un chiffon rouge est justement le moyen le plus ancien, mais toujours en vigueur, pour signifier l’arrêt d’urgence notamment lorsqu’il s’agit d’une manœuvre. (…) Nous avons imaginé des évolutions possibles au plan social dans la perspective d’une ouverture à concurrence qui semble se dessiner. »
Étonnant non ?
Quel parti de gauche, d’extrême-gauche, de gauche de la gauche, de la gauche de l’extrême-gauche, etc., a jamais dénoncé ce rôle perfide de Janus bifront ?
Il n’y a pas que la CFDT jaune qui soit vendue. Au fond la CFDT est juste plus franche.
D’ailleurs, le Jaune mélangé au Rouge ne donne-t-il pas ce bel Orangé, qui fait la couleur des fanions de "LA" CGT ?
Satisfait, bouffi de son importance, M. Valls, premier ministre, plastronnant au siège du groupe AXA, a déclaré « nous avons besoin de la Finance » prenant le contre-pied exact du Président-Périmé qu’il entend remplacer, et qui avait déclaré comiquement : « Mon adversaire, c’est le monde de la finance » quand il s’agissait de se faire élire par les demeurés.
Mais le Superflu de l’Élysée n’a pas besoin de son premier ministre éternellement lié à la finance et au maître de la finance, pour se renier misérablement.
Quand le changement c’était maintenant, "Moi-Président" avait pris devant la France entière l’engagement solennel N° 5 : « Je préserverai le statut public des entreprises détenues majoritairement par l’État (EDF, SNCF, La Poste...) » !
Comment est il possible qu’un tel gouvernement, qui fait 6 % des voix, vomi par les travailleurs, puisse impunément étaler son arrogance et poursuivre jusqu’au bout sa besogne d’éclatement de la Nation, de pourrissement de la jeunesse, de destruction du service public, de liquidation des emplois ?
Réponse : par la complicité des dirigeants des organisations syndicales !
Le vrai clivage, la fracture de classe douloureuse n’est pas entre Grévistes et Usagés, non plus qu’entre Gouvernement et Syndicats, elle passe à l’intérieur des organisations syndicales, entre d’un côté la bureaucratie pourrie, et de l’autre la base.
C’est là, à ce niveau qu’est la faille et que s’expriment les forces telluriques.
Aux dirigeants staliniens et leurs complices trotskistes le rôle historique d’aiguilleurs de la colère ouvrière afin que le train d’enfer du capital ne déraille pas dans le fracas d’acier des révolutions.
À la base la tâche historique de se débarrasser de ces directions traîtres, à sortir des rails de la gauche syndicale qui le trompe depuis si longtemps.
Sinon la locomotive continuera de patiner et tournera à vide.
Et ce n’est pas un hasard si ce vide de révolution est rempli par la révolution du vide des stipendiés de la Révolte du Spectacle qui nous offrent par intermittence le spectacle de la révolte. La révolte d’Homo-Festivus.
De quoi faire se retourner Debord sous les planches.
Leurs défilés inter-minables, relookés révolutionnaires, font un remake de MAI 68, joué dans la transgression mimétique par des comédiennes au chômage qui délaissent pour ce casting, l’été, la hampe des directeurs de théâtres subventionnés pour celle des drapeaux prolétariens.
« Hollande t’es foutu la Culture est dans la rue », couinent ces Julie en herbe qui rêvent secrètement d’être foutues par Hollande.
Comme de bien entendu NPA s’est félicité de ce renfort Jeune-Filliste qui renchérit sur la mise en scène pour dépolitiser. D’ailleurs les militants NPA de Sud, fidèles en cela à leur conception de « La révolution c’est la fête » ont organisé le soir vacarmeux de la Défaite de la Musique « un pique-nique festif » entre cheminots et intermittentes, à la Villette, soi disant pour « continuer et amplifier notre mouvement de grève » mais en vérité pour le travestir dans tout ce cinéma.
’’LA’’ CGT aussi s’est félicité de ce renfort, qui discrédite le mouvement des cheminots, et à sa tête Lepaon faisait la roue : il pouvait, ’’LA’’ CGT ne se prélasse-t-elle pas chaque année sur les chars de la gay-pride, la plume au cul ?
Mais il ne s’agit pas seulement de rouler peinard et d’arriver à l’heure ! Il s’agit de savoir où nous allons pour des esprits déboussolés.
Tout est lié. Le démantèlement du Rail et le capharnaüm d’un monde qui déraille.
Les travailleurs les plus énergiques et les plus décidés se détourneront avec dégoût de cette gauche bâtarde qui ânonne l’anticapitalisme mais contre-signe ne varietur toutes les saletés morales capitalistes.
Au fond, en ce crépuscule du capitalisme décomposé, les thèses inaugurales de l’Aurore du mouvement ouvrier, celles de l’Anarchie, retrouvent toute leur brûlante actualité : socialisme auto-gestionnaire, antiétatique et farouchement antiparlementaire, par l’organisation de comités, de conseils, d’assemblées, n’importe le nom pourvu qu’on ait la structure, soit le pouvoir de la base, la Commune prolétaire.
À cet égard nous devons nous féliciter de la renaissance du Cercle Proudhon.
Et si la piétaille intermittente marche pour son petit ego démultiplié, les cheminots ont également raison de défendre leurs intérêts corporatistes, la noble Corporation du Rail ! Ce faisant ils défendaient les intérêts de tous les futurs transbahutés du chemin de Fer, pèlerins de l’existence plus ou moins usagés que nous sommes.
« Un corporatisme intelligent et souple doit permettre aux maisons de toutes tailles et de tout chiffre d’affaires de trouver leur place dans une organisation d’ensemble » disait Jaurès en son temps.
Félix Niesche
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Ex-France ; Fragrans Feminae ;Arabesques ; Vis comica ; Spleen and strings ; CCCP & autres chutes.