En 2009, le gouvernement de Sarkozy a créé le statut d’auto-entrepreneur dans le but de faire baisser le chômage, de donner aux salariés une chance d’augmenter leurs revenus en ayant une activité annexe et de permettre aux jeunes entrepreneurs de se mettre un peu d’argent de côté dans le but de devenir artisan.
Là où réside l’arnaque, c’est que pour éviter que les artisans s’insurgent contre ce nouveau statut déloyal, ils leur ont donné la possibilité de prendre des auto-entrepreneurs comme sous-traitants.
Le sous-traitant pouvait gagner plus au détriment de ses prestations sociales (pas de droits au chômage, moins de retraite) et l’artisan gagnait plus d’argent car libéré des cotisations salariales.
On a dissuadé les ouvriers de rester ou de devenir salariés, car ils pourraient devenir leur propre patron en travaillant en sous-traitance avec un revenu mensuel plus élevé.
Assez méfiants au début, très vite les particuliers voulant faire des travaux ont compris l’astuce : les auto-entrepreneurs étaient un bon plan pour leurs finances, au moins 35 % moins cher qu’un artisan (charges moindres, pas de TVA).
Les artisans s’adaptent comme ils peuvent mais les auto-entrepreneurs ont pris beaucoup de marchés, les prix ont fortement chuté ces 5 dernières années. Quand les artisans ont compris l’arnaque, il était trop tard, trop honteux car ils avaient profité de cette main-d’œuvre pas chère, presque personne ne s’est révolté sérieusement contre ce statut. On a préféré râler contre les charges patronales trop élevées, l’augmentation de la TVA. Baisser les charges patronales contribuerait à supprimer le droit au chômage, à la retraite et à la sécurité sociale.
Progrès ou pas, n’importe qui peut devenir carreleur, peintre ou plaquiste en quelques clics sur Internet. Vous voulez carreler et gagner un peu d’argent pendant vos RTT, le weekend, c’est autorisé. D’ailleurs il suffit de regarder D&Co sur M6 pour voir comme ces métiers du bâtiment sont faciles et amusants.
Il ne faut plus se cacher la vérité, l’artisan ne dit rien depuis des années car, soit il se sent coupable d’avoir fait travailler cette main-d’œuvre bon marché, soit il est aveuglé par le discours de l’UMP qui lui dit que nous sommes en crise et qu’il faut tenir bon, soit il est muselé par le travail au black, il n’ose pas râler car il a peur qu’on le balance au fisc.
L’ironie de cette histoire, qui se passe sur une période de 5 ans, ce n’est pas seulement la destruction de l’artisanat et du savoir-faire, c’est l’arnaque qui fait croire que la solution à l’augmentation du pouvoir d’achat des Français se fera par la concurrence des prix. Au final ce mécanisme n’aboutira qu’à la baisse des salaires et à l’appauvrissement du savoir-faire en général.
Les auto-entrepreneurs, à l’heure où je vous parle sont en train de se faire manger tout crus par la concurrence venant en masse des pays de l’Union européenne.
Il faut savoir qu’un artisan travaille en moyenne pour 300 € par jour, un auto-entrepreneur pour 160 €, un Espagnol ou un Roumain pour 80 €. Bien sûr tout ceci de manière légale.
Je suis artisan depuis cinq ans, j’ai trente ans et je suis écœuré, je suis en concurrence avec des types qui sont pratiquement deux fois moins chers que moi et c’est légal. Dans un mois je ferme l’entreprise par manque de travail et par conviction, car la seul chose qu’il me reste à faire si je veux continuer d’exercer mon métier, c’est de devenir auto-entrepreneur.
J’envoie ce message à Égalité & Réconciliation, car votre analyse du système me semble juste et sincère.
J’ai écris ce message sans haine, ni contre les auto-entrepreneurs ni contre les travailleurs étrangers, car les politiciens veulent nous faire tomber dans ce piège.
J’habite à Nice, tout ce que je décris dans ce texte sont des situations que j’ai vécues, je peux amener des preuves concernant tout ce que j’ai écrit.
Cordialement,
Rémi P.
PS : Je soutiens évidement Alain Soral pour sa démarche intellectuelle courageuse et pour les personnes qu’il me fait découvrir, notamment Marion Sigaut, que j’aime beaucoup.
À propos de la destruction des savoir-faire, sur E&R :