Bonjour,
Suite à l’article « Mort d’un enfant in utero : la maternité de Port-Royal blanchie par une enquête interne » paru dans votre revue de presse, j’ai décidé de vous écrire dans l’espoir de rééquilibrer la balance médiatique, qui pour les sages-femmes est souvent déséquilibrée.
Surfant sur la vague du sensationnel, nos médias nous présentent de façon régulière des tragédies survenant dans des maternités. Ainsi il n’est plus rare de retrouver exposés dans les colonnes des presses écrites des sujets aussi morbides que voyeuristes. Ces « journaux » n’hésitant plus à outrepasser le secret professionnel auquel est soumis le monde soignant, et à offrir une tribune aux parents endeuillés.
Le cas de la maternité est présenté comme un cas à part, aussi faut-il rappeler que de nos jours, la mortalité périnatale demeure, que les « mort fœtales in utero » (MFIU) représentent toujours 33 % de la mortalité infantile et 50 % des décès périnataux dans les pays développés (cf. Cnattingius S. et al., Seminar Perinatol 2002), que la connaissance ne met pas à l’abri des aléas de la vie, et que, bien que les pratiques n’aient cessé d’évoluer, la médecine n’est toujours pas infaillible.
Aussi, si la tristesse du couple endeuillé est légitime, c’est la focalisation des médias sur un service ou sur le personnel marqué par une telle tragédie qui relève d’une hérésie. Va-t-on demain reprocher aux soignants de ne pas prédire l’imprévisible ? Pour le moment, la loi reconnaît encore l’humanité de la médecine, si les métiers de santé ont une obligation de moyens, seuls les chirurgiens esthétiques ont une obligation de résultats. Et à raison, car chacun sait que la médecine n’est pas une science exacte, et que le prestige d’un bon praticien vient de sa capacité d’adapter les soins à la personne, et non de sa capacité à appliquer machinalement un protocole.
S’il est utile de montrer les dysfonctionnements des maternités, il serait beaucoup plus intéressant d’écouter ce que les sages-femmes ont à dire (cf. ordre-sages-femmes.fr)
En raison du nombre de patientes prises en charge qui ne cesse d’augmenter, le temps passé auprès des couples doit se limiter de plus en plus à des soins purement médicaux, et à des explications basiques et stéréotypées au détriment d’un temps d’écoute et d’accompagnement. On constatera aussi, parallèlement à la pénurie des gynécologues-obstétriciens, un élargissement des compétences de la profession, ce qui revient également à dire, dans le domaine hospitalier, élargissement des responsabilités. Sans qu’il y ait pour autant de revalorisation salariale. Autant dire qu’on n’hésite plus à faire travailler encore plus les maieuticien(ne)s, déjà surchargés. Les usagers de santé n’ont dorénavant plus l’assurance d’une prise en charge optimale, faute de temps, ou de moyens mis à dispositions des soignant(e)s.
Le 4 octobre 2012, ce sont pourtant ces femmes et ces hommes qui scandaient l’importance d’une mise en place de la politique « une femme/une sage-femme » afin de redevenir les intervenants de premier recours. Leur mobilisation ayant principalement pour but la défense de la sécurité du couple mère-enfant tout au long de la grossesse, mais aussi en salle de naissance, malgré l’absence de connaissances de la majorité de la population sur leur profession ;
La sonnette d’alarme est tirée dans les maternités.
Bien à vous
Rémi Sakhi