En ce 9 mai 2015, nous commémorions le 70ème anniversaire de la victoire contre l’Allemagne nazie. Cette date restera dans les livres d’histoires comme celle ou ce que l’on appelle « l’Occident », et qui n’est en réalité que le cercle des alliés européens des États-Unis, a commis une faute politique majeure. Dans cette faute, la responsabilité du Président François Hollande est importante, et pourrait avoir des conséquences profondes.
Poutine isolé ?
Sous les pressions des États-Unis, une majorité des pays européens ont renoncé à envoyer un président ou un premier ministre à Moscou pour la grande parade commémorant la Victoire. Mais, et ceci est extrêmement important, la Chine, l’Inde et de nombreux pays d’Amérique latine ont fait le déplacement. Si l’on mesure démographiquement le poids de ces représentants, ils pèsent plus de 50 % de la population terrestre. Si l’on mesure économiquement leur contribution, elle est élevée, autour de 40 %. Parler dans ces conditions d’un « isolement » de Vladimir Poutine est une absurdité.
Mais, la symbolique politique est encore plus importante. Ont fait le déplacement à Moscou les chefs d’État ou les chefs de gouvernement des pays des « BRICS » et des pays de l’OSC, l’organisation de Sécurité et de Coopération. Plus encore, la présence des Chinois et des Indiens acquière une signification particulière. La population de la Chine a payé d’un prix humain extrêmement lourd un conflit qui, pour elle, a commencé non en 1939 mais en 1937. En fait, elle est – derrière l’URSS – le deuxième pays à avoir le plus souffert. Les atrocités commises par l’armée japonaise ont été abominables. Les troupes indiennes se sont battues, tant contre l’Allemagne et l’Italie que contre le Japon. La participation de contingents des armées chinoises et indiennes au défilé de Moscou a, à l’évidence, une portée qui dépasse la simple commémoration.
Il était donc clair que ce 9 mai allait revêtir une importance particulière. Du fait de l’attitude des États-Unis, mais aussi du fait de la couardise, pour ne pas utiliser de mots plus blessants, de dirigeants européens, ce 9 mai 2015 a entériné la coupure du monde en 2. Il a symbolisé l’opposition d’un « ancien monde », celui du bassin atlantique à ce nouveau monde en train d’émerger autour de l’Asie, et qui attire à lui sans cesse de nouveaux pays. On ne peut, à cet égard, que constater que les initiatives chinoises, ou sino-russes [1], de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures [2] (BAII/AIIB) jusqu’au projet d’union eurasienne ne cessent de prendre de l’ampleur. Ces initiatives auraient pu être conçues dans un cadre ouvert sur « l’ancien monde ». C’est la responsabilité des États-Unis, mais aussi de ceux qui par suivisme à courte vue ou par peur leur ont emboîté le pas que d’avoir provoqué cette rupture symbolique entre ces deux mondes que l’on a vérifiée avec le défilé du 9 mai.