Au Front national aussi, on connaît la célèbre formule du prince Salina dans Le Guépard : « Il faut que tout change pour que rien ne change. » C’est pourquoi à (Jean-Marie) Le Pen succédera probablement Le Pen (Marine).
Tout y pousse. Les régionales ont permis au père de sauver l’héritage qui menaçait ruine depuis la présidentielle de 2007. A la fille de le faire désormais fructifier. Marine Le Pen pourrait alors inverser la célèbre formule : il faut que rien ne change pour que tout change. Marine n’était pas née pendant la guerre d’Algérie, encore moins pendant la Seconde Guerre mondiale. Sa naissance tardive lui a permis de prendre ses distances avec son père et ses plus célèbres tirades - « détail de l’histoire » ou « Durafour crématoire »- sans trahir.
Ses campagnes électorales tournent autour d’une dénonciation véhémente de la mondialisation, et des conséquences sociales du libre-échange, la désin dustrialisation, les délocalisations, que pourrait signer la gauche qui a voté non au référendum sur l’Europe en 2005. Face à la question de l’immigration, elle tient un discours assimilationniste qui aurait paru fort banal sous la IIIe République. Marine Le Pen se place donc hors du consensus post-soixante-huitard, multiculturaliste, féministe, libre-échangiste, qui unifie nos élites de droite et de gauche, mais que rejette une part croissante de l’électorat populaire.
C’est parce qu’il avait osé braconner sur ces terres interdites que Sarkozy a été élu en 2007. Mais il a douché les espoirs mis en lui par les classes populaires qui, depuis, boudent l’UMP. Le parti unique de la droite n’a plus de réserves, ni à droite, ni au centre. Si on en reste au scrutin majoritaire à deux tours, la droite sarkoziste devra impérativement reconquérir cet électorat populaire. Ou la question de l’alliance avec le FN se posera inéluctablement un jour.