Une vraie personnalité, ça peut rapporter gros. Comme de gros ennuis. Dans l’éventail des Français vraiment populaires, ils sont une poignée seulement à être eux-mêmes, et à ne pas tromper le public : Bénichou, Bigard, Bravo, Damidot, Depardieu, Dieudonné, Lagerfeld, Le Pen, Ménès, Naulleau, Soral, et Zemmour. Le point commun : ils affirment ce qu’ils sont, haut et fort, provoquant un jugement tranché, rarement tiède. Ils ne transigent pas, ne composent pas, ne cherchent pas à plaire. Mieux, ils vivent de leur propre vérité, qui fait corps avec leur personne. Aussi applaudis qu’ils sont honnis, ils constituent à la fois les piliers et les limites amovibles de la liberté d’expression. Car en testant la clôture, ils vont un peu, beaucoup, passionnément plus loin que les autres.
Ils repoussent en permanence les limites du non-dit, et parfois du non-pensé. Par l’espace de liberté qu’ils créent, et défendent, ils ouvrent une voie aux autres. Etre soi-même et le rester n’est pas donné à tout le monde, même si chacun peut théoriquement y arriver. Cela exige une force, une force de résistance à tout ce qui essaye – et réussit souvent – de nous plier, nous formater, par la peur, la menace, sinon des facteurs plus indirects, ou plus inconscients : l’instinct grégaire, la démagogie, le calcul, la séduction, tous ces pièges antipersonnels.
Au prix de certains renoncements, on a beaucoup à gagner à être soi-même : quoi de mieux que de lâcher sa vraie nature (à part celle de Fourniret) ? On est en accord avec soi-même, on ne développe pas de maladies psychosomatiques (les aliénés ne somatisent pas) – qui sont celles de l’inadaptation à son environnement – ou de frein à ses pulsions.
Si le désir des puissants et l’ambition des non-puissants est de vivre selon ses instincts (manger & boire, conquérir & s’accoupler, dominer & punir), ou au plus proche de ses instincts, il n’est pas forcément besoin d’être riche pour ça. Être soi-même coûte socialement, mais peut aussi rapporter. Car dans un monde occidental très formaté, développer une personnalité originale – qui sous-tend une pensée et une action inattendues, ou à contre-courant – peut s’avérer très rentable, à terme. Est-ce à dire que tous les autres (se) mentent ? Non, mais ils composent… avec tous les types de pouvoir (amoureux, familial, amical, professionnel, politique), ce qu’on appelle la socioculture. Peut-être qu’un jour la soumission à l’ordre dominant sera considérée comme étant à l’origine de pathologies mentales, avec son cortège de conséquences organiques nuisibles.
Le contre-exemple absolu de celui qui est payé grassement – en pouvoir réel et symbolique – pour ne pas être lui-même, c’est bien Manuel Valls. Passer de pro-palestinien convaincu à sioniste ultra, pour devenir aussi rapidement Premier ministre, prouve une adaptation toute darwinienne à la réalité du pouvoir réel.
Pierre Bénichou : séfaradoteur
- Pierre Bénichons, surtout
Pierre, bonimenteur survivant du néolithique séfarade, posant son cul de temps à autre au Nouvel Obs, pour qui il écrit un article par siècle, égaye les dîners parisiens avec ses histoires popolitiques. Ours capable de renifler sa poudre anti-rhume en direct dans les studios d’Europe 1 (il s’est calmé à RTL), et d’envoyer chier les récalcitrants. En tant que juif (une espèce protégée), il peut tout se permettre, c’est même pour ça que Ruquier l’a casté. Bénichou n’hésite pas à la ramener avec son sionisme, ou à engueuler un juif si ça le chante. Ce vieux con nous rappelle les heures glorieuses des bordels d’Oran – qu’on n’a pas connus – mais qu’il raconte si bien, de sa voix détruite par les clopes, l’alcool et autres saletés. Personnellement, on n’a jamais lu un article de ce débris, ce qui nous fait douter de sa qualité de journaliste. Mais quand on pense à Christophe Barbier, on se dit qu’il peut écrire ce qu’il veut, du moment qu’il continue à déblatérer ses conneries aux Grosses Têtes. Et même quand il en rajoute, cela fait partie du personnage : avec lui, la Shoah c’est 60 millions de morts environ. Sinon, Bénichou a bien connu Coluche et en a tiré un bouquin gros comme la Torah, mais qui a fait un peu moins de buzz que la Shoah. Imaginez, si Coluche avait été juif !
Jean-Marie Bigard : mort dans le WTC
- Et pis l’avion il rentre comme ça entre les deux tours bien écartées ces salopes et là, vlam !
Le parrain de l’humour égrillard s’est pris une volée d’obus des médiartilleurs sionistes pour l’émission d’un microdoute sur le 11 Septembre. Rien que pour avoir douté de la « vérité officielle », deux mots qui vont mal ensemble et qui sentent le pot de colle, il a perdu d’un coup son rond de serviette à la télé comme un chimio ses cheveux. Traité d’antisémite et de complotiste, menacé de mort, il a soudain vécu ce que vivent les dissidents, mais après avoir croqué profondément dans la pomme du système. Le Big gagnait plusieurs millions d’euros chaque année, et dépensait tout. Aujourd’hui il recommence presque à zéro, et les gardiens des médias qui l’ont adulé hier lui tournent aujourd’hui le dos. Il lui reste la tournée des vieux comiques, relatée dans le numéro spécial Humour du Canard enchaîné, qui sait faire du journalisme quand Haziza est en vacances à Tel-Aviv.
Malgré une enfance compliquée, le pic du Stade de France et sa chute vertigineuse, Bigard a toujours exprimé ce qu’il pensait être juste. En plateau, chez Ardisson, dans la grande période de Tout le monde en parle, on sentait poindre le pro-palestinien. Et on n’hurlait pas tout de suite « antisémite ! », à l’époque. Tout était plus nuancé, BHL n’avait pas encore soumis Ardisson avec son gros bâton de Laser-Shoah, qui lance des éclairs aux insolents. C’était l’bon temps d’la liberté. Bigard avait beau être chapeauté par un producteur sioniste, les bénéfices pulvérisaient toute critique. Trahi par le journal Libération, venu lui tailler le portrait à domicile, et un short XXL en dernière page, la plus lue, on lui concède le droit de se méfier des médias, dont le pire restera Europe 1. Une radio nationale qui s’arroge le droit de boycotter les humoristes qui ne pensent pas comme Elkabbach. Dire que c’est la station qui a propulsé Coluche, notamment grâce à Philippe Gildas… À l’époque, il y avait encore des Bretons dedans !
L’aventure bigardienne aura servi de leçon de terreur à tous les humoristes qui seraient tentés de franchir la ligne rouge, et qui se sont tus. Un beau lâcher de salopes, en vérité !
Christine Bravo : gauloise sans filtre
- Aucun micro n’est trop gros pour Christine
Une institutrice qui devient reine des plateaux télé de divertissement, c’est pas courant. Mais ça, c’était avant. Christine, comme chacun l’ignore, a répondu un jour à un concours, ses textes ont plu, elle a lâché l’Éducation nationale pour la presse, puis la télé, et bien lui en prit : elle aura tout connu. Les émissions flamboyantes, le boulot en bande, le lancement de petits nouveaux – qui lui planteront tous des dagues dans le dos – les soirées déjantées, où elle arrosait toute l’équipe, l’adrénaline des audiences, puis le retrait, l’échouage, sur les chaînes du câble, et enfin Twitter, à partir duquel elle lance trois piques assassines par mois. Cricri avait compris le principe de base : ne jamais faire chier les gens au retour du travail ou avant de sortir le week-end (Frou-Frou, Union libre), les divertir avec un mélange d’infos et de séduction. La marchande de poisson savait s’entourer de bellâtres des deux sexes pour faire baver l’audience. On se souvient avec émotion du minois d’Anette, l’Allemande, ou des formes de Martineke, la Hollandaise… La Bravo, c’est un ton direct, une espèce de vulgarité, mais une vulgarité de précision. Vous pouvez retrouver cette grande gueule pas farouche dans Les Grosses Têtes version Ruquier, l’émission populaire qui conserve encore un peu de liberté de thon. OK, c’est facile.
Valérie Damidot : gorette goyette
- Valérie est à droite sur la photo
Dans le genre blonde à gros derche et à grande gueule, la Bravo a été remplacée en télé par la Damidot. Perceuse en main, vanne macho à la bouche, elle épate les terriers de blaireaux dépourvus de goût et leur assène le chic M6, mélange de rêve de singe et de promo IKEA. Ça coûte pas cher (son salaire mensuel pour ses hebdos ne dépassait pas 10 000 €) et ça rapporte en parts de marché. C’est pas sur M6 qu’on va voir de l’Art. Valérie harcèle les virils corps de métier du bâtiment, qui lui obéissent au doigt, à l’œil, et parfois au reste. Elle est complètement dans son élément. Pour qui a suivi une de ses émissions de déco, elle ne joue même pas, ne triche pas, s’éclate. Bon, son talk-show Y a que les imbéciles était un peu merdique, mais l’exercice est difficile, surtout avec un parterre de survivants dénichés dans les poubelles du PAF et les archives de la chaîne.
Notons qu’elle a le courage de venir personnellement ramasser son Gérard, alors que les autres animateurs se planquent sous leur divan pendant la cérémonie. En même temps, les Gérard, ce poil à gratter de la télé, c’est pas vraiment des bolcheviques. Bon courage à Valérie sur la chaîne la plus radine du PAF.
Gérard Depardieu : moujik saoul
- Quand il dessaoule, Gérard fait de bons films
On a tout dit sur Gégé, qui gonfle et dégonfle au rythme des conseils paniqués de ses médecins. Sa récente évasion de l’étouffoir sioniste national vers le goulag russe est simple bon sens quand on voit le marécage du cinéma français, aligné sur les daubes existentielles du Festival de Cannes et les divertissements toledanonakachiens. Comment cet ogre complètement libéré au niveau des instincts (il est dénué de surmoi) a-t-il pu survivre si longtemps dans une telle atmosphère ? C’est que la prise en main idéologique du cinéma français n’a pas 10 ans.
Ses saillies verbales de soudard en campagne passent très bien dans la haute bourgeoisie, moins bien dans l’univers médiatique perclus des jalousies et des frustrations des donneurs de leçons habituels. Vivre avec deux putes à 15 ans prédisposait effectivement à un parcours différent. On ne vous fera pas la bio de la barrique (celle de Bernard Violet est très bien), ballottée par les vents sur l’océan de la vie. Sa filmo démentielle traduit bien cet appétit d’apatosaure, mais aussi ce trou noir qui n’a pas laissé beaucoup de grands rôles aux autres comédiens français, ceci expliquant quelques tirages de maillot. On comprend en tout cas que Gégé ne supporte pas l’hypocrisie médiatico-politique actuelle. Quand on a les moyens de quitter les délires pseudo socialistes pseudo français pour la patrie du vrai socialisme…
Dieudonné : le roi des animaux
Normalement, un humoriste devrait pouvoir tout dire, et apporter son modeste contrepoids à la parole dominante. Le peuple en a besoin, surtout quand ça va mal. Malheureusement, dans notre bananeraie démocratique, la liberté d’expression se limite à ce que le franco-sionisme tolère. Cela provoque quelques dépassements accidentels, rapidement punis. Mais on y prend goût. À la fois au dérapage, et aux petites tapes sur le gros nez de l’élite que tout le monde déteste en secret. Sauf les médias… qui se retrouvent logiquement détestés. Comme si la détestation était contagieuse. On le répète : point d’antisémitisme là-dedans, juste la rançon de ceux qui font chier les Français en leur disant ce qu’ils doivent penser, écouter, regarder, rire. Ce serait pareil si les Martiens étaient au pouvoir : on ne pourrait plus saquer les petits hommes verts. Eh bien là c’est pareil, mais avec les petits élus. Il n’est donc pas question de judaïté dans cette détestation : c’est l’abus de pouvoir, la privatisation des moyens d’expression et l’imposition d’un goût de chiottes généralisé qui énerve. Et Dieudonné incarne ce passing shot de revers décroisé du peuple, qui n’a plus qu’un gros déconneur en première ligne pour railler la propagande, respirer un peu, et entendre de simples vérités. Depuis ce changement de fonction, Dieudonné a changé de division : il navigue désormais dans la stratosphère de l’humour, une couche éminemment supérieure, laissant loin derrière lui les petits amuseurs terrestres flippés par ce pouvoir vengeur, mesquin et menteur. Devant un tel ennemi, tout est permis. Dieudonné est la pierre qui ne reculera jamais, le menhir. Un peu breton, un peu camerounais, mais très français au fond. Et derrière, il commence à y avoir du monde. Le pouvoir contesté ne s’en rend-il pas compte ?
Caroline Fourest : BHLA
- Caroline écoute son rabbin qui tente de la dissuader de se marier avec une résistante ukrainienne
On a hésité à inclure Caroline chérie (celui qui a dit chierie, tu sors) dans cette étude, non parce qu’elle serait incohérente, ce qui n’est pas le cas, mais parce qu’elle ne peut s’avouer qu’elle travaille objectivement pour le sionisme en place, tout en faisant croire qu’elle fait partie du camp des audacieux qui élargissent le champ de la liberté d’expression. Belle imposture plus ou moins consciente. Où l’on voit que l’inconscient, ça sert à tout : on y fourre toutes ses contradictions !
Car il n’y a pas une feuille de papier à cigarette entre son logiciel et celui de BHL : anti-musulmans (des salauds), anti-curés (des pédophiles), anti-Français (des vichystes), anti-hétérosexuels (des violeurs), anti-antisionistes (des criminels contre l’humanité). Ceci dit, son discours tient la route, et Caro représente le stade ultime du gauchisme décadent, entre Charlie Hebdo et Cohn-Bendit, sexuellement douteux, composé d’humanitaire mal placé, de respect craintif du vrai pouvoir, et de tir sur cibles émissaires. Si elle n’est pas consciente de ça, c’est qu’elle est limitée. Si elle est consciente de ce décalage entre positionnement et discours, c’est une truqueuse finaude à l’intelligence supérieure. Mais on a un doute.
Karl Lagerfeld : la dame de piques
- Karla avant (à gauche) et Karla après (à droite)
Et si le nec plus ultra était d’accumuler les fautes de goût ? Le boche qui s’habille mal est pourtant le centre de gravité du fashion parisien. À 80 ans et des brouettes, avantage de l’âge, on ne s’embarrasse plus de politikement korrekt. Nous aussi, quand on sera sur notre lit de mort, on dira tout ce qu’on pense, surtout des salopards, l’expression préférée de BHL, qui n’est jamais sorti de la philo sartrienne pour ados. Karlag, une des rares figures de l’élite qui ose défendre les malpensants. Les journalistes n’osant le reprendre là-dessus, ces lèche-cul étant bien trop soumis à la puissance des stars.
C’est vrai que ce « citoyen monégasque » a oublié de déclarer un peu de pognon au fisc français pendant 20 ans, qui lui a réclamé 20 millions d’euros. La diva du textile s’en sortira par un minuscule chèque de sept millions. Depuis, elle fait gaffe et des photos, et pavane sa maigreur de vicomte tragique dans les défilés aux côtés des pétasses défraîchies du milieu (on ne citera pas de nom, actuellement on économise sur les procès). Marrant, ce contraste entre les beautés girafoïdes qui évoluent sur les tapis contre deux feuilles de salade et trois viols sous coke en agence, et les sorcières atroces des bords de scène. Jeune beauté démunie versus vieux fric pervers, avec transferts de liquidités entre les deux rives…
Avant d’ouvrir sa gueule et de tarter les ongleuses, Karlag a quand même dessiné quelques modèles. Mais on sent bien que tout en haut de la montagne de la mode, on ne peut pas penser comme il faut (juris-prudence Galliano). Une grosse dose d’humour fait passer le mépris qu’il ressent physiquement pour les parasites urticants du type Mademoiselle Agnès, qui lui colle au derche pendant la fachonouik en se croyant sa copine, alors qu’elle refoule visiblement de l’âme. Et on ne parle même pas de ces batraciens du Petit Journal, gang de laiderons (on croyait que seuls les apollons avaient le droit d’être gays !) qui s’autorisent toutes les audaces parce qu’ils sont armés d’une caméra. Le chantage à l’image, dictature des fiottes ? Il faudra que Karlag nous affranchisse sur son guide de survie en milieu dégoûtant.
Pierre Ménès : too fat too furious
- Pierrot, dit le Blogre
Nathalie Iannetta partie faire de grosses piges chez François Hollande, Pierre règne en maître sur le plateau du Mathoux. On sent bien qu’il exaspère les conformistes du clan Canal, comme le statisticien Dominique Armand, chiant comme un dimanche après-midi sur le parking de Carrefour. Il a d’ailleurs giclé lors de la saison 2014/2015 du Canal Football Club. On reconnaît que Pierrot risque à chaque instant de pétrifier le plateau avec une intervention lourde, mais il fallait bien quelqu’un pour incarner l’esprit de Thierry Roland dans le sanctuaire du bobo foot.
Décalé chez les décalés, Pierre est capable de bousculer tout l’édifice bien-pensant d’un seul coup de hanche, faisant crisser les pieds de table et les dents des chroniqueurs. Heureusement, l’audience et les études quali des abonnés lui valent une survie médiatique qui fait manger leur micro à ces gauchistes du foot, qui n’a jamais été de gauche. Ménès, à lui tout seul, sauve la liberté d’expression sur cette chaîne en péril. Faut dire que Le Club du dimanche, de la concurrence Bein Sports, est quasi-impossible à regarder : composée de transfuges de Canal, des traîtres, quoi, l’hebdo est drivée par Alexandre Ruiz, dont l’énergie positive surjouée à l’américaine fait peur. Il plombe ses chroniqueurs, condamnés à abonder dans son sens, et ses invités, qui se demandent pourquoi ils sont reçus comme des pharaons. Émission grotesque de A à Z, qui permet à Canal de garder une longueur d’avance sur le talk footballistique. Ne jamais oublier la connerie, dans un conflit. Elle peut faire basculer un match.
Au-delà de ces bisbilles, on souhaite longue vie au Joufflu, dernier survivant du bon sens populiste sur une chaîne qui a choisi l’élite contre le peuple, et qui le paiera.
Éric Naulleau : no logo
- Duel à l’aube à OK Soral
Arriver à se faire une place dans les médias « français » sans mettre un genou à terre est un exploit que nous soulignons au stabilo fluo. Jamais, dans toutes ses émissions, ni dans les émissions des autres, le Naulleau n’a dérogé à sa pensée. Moins subversif que Zemmour, qui franchit la ligne rouge établie par le PAF sur ses cibles préférées (la gauche, les musulmans, les racailles), Naulleau ne commet pas de faute de goût, mieux, de dégoût. La faute de dégoût (exemple : détester le foot ou la presse people) étant aussi éliminatoire que la faute de goût (aimer le chanteur Raphaël ou le « comique » Kev Adams). Naulleau profite à fond de sa tardive notoriété, et cela fait du bien de voir un type qui pense plutôt juste survivre dans un univers formaté et totalitaire. Ce qui ne prouve aucunement la trahison. Que ceux qui le traitent de balance système aillent faire un tour dans le service juridique des chaînes, ou chez les producteurs. Et ceux qui rétorqueraient que personne n’est obligé de faire de la télé ne devraient pas lâcher les derniers résistants (à la bêtise) qui y travaillent. Il y a peu de relais objectifs de la dissidence, pourquoi les condamner ? Tout le monde doit-il être radical ? Le livre avec Soral était peut-être un coup d’édition pour Naulleau, mais qui d’autre a osé le rapprochement – la confrontation nécessitant un rapprochement – idéologique avec la tête pensante de la dissidence ? Faut-il faire sauter tous les ponts ?
Alain Soral
Toujours dire toute la vérité, rien que la vérité, en dépit des obstacles et des intérêts rencontrés, produit un double effet : le grossissement de la foule de fans, parallèlement à celle des ennemis. Les deux bataillons menaçant de se rencontrer. Cela donne une situation schizophrénique, avec un fanatorium qui frise l’armée rebelle, et une résistance de tout ce que le système compte de pistonnés redevables qui ont un poste à perdre. Car il s’agit, au fond, de ça : la légitimité. Et derrière la légitimité, l’argent. On a beau lutter du côté de la vérité contre un énorme mensonge, le mensonge se défend avec toutes les armes dont il dispose : et il dispose de toutes les armes. Les soraliens en sont donc réduits à une stratégie gandhiste, ce mélange de non-violence et d’élévation de la conscience (politique, hein, on n’est pas dans une secte). Ne pas donner à manger à la répression, et retourner un par un les ennemis par la voix de la raison. Et c’est bien parce que cette stratégie est gagnante sur le long terme, que Soral est dangereux : le système montre à la fois son visage totalitaire, et sa main qui tape dans le vide. Méchant, et con à la fois ! Du coup, les rieurs et les gens qui pensent changent de crèmerie, dans un exode idéologique qui est le plus grand changement politique de ces 10 dernières années, et la plus grande interrogation aussi : comment tout ça va-t-il finir ? Si beaucoup doutent que la dissidence puisse gagner, plus de monde encore se demande comment le pouvoir pourra interdire l’intelligence ! Seul Dieu le sait. En attendant, Soral avance dans l’inconnu, dans un parcours qui n’est radical que dans sa cohérence.
Éric Zemmour
Le furet dressé pour piquer les concepts fertiles à la dissidence est désormais riche. 400 000 exemplaires (format numérique compris) de son ouvrage sur la mort de la France (assassinée par ses lointains cousins sionistes) lui assurent une retraite de général napoléonien. Riton sera récompensé par une ville, Zemmourgrad, ou un État, le Zemmourland.
Le système ne peut pas faire mieux (ou pire, selon les goûts) que Zemmour, qui se situe à l’extrême limite de ses possibilités en matière d’admissibilité de l’idéologie antisystème. En réalité, Éric ne bouleverse rien, mais a l’avantage d’aller dans le sens de la nouvelle France qui grogne… contre la gauche qui l’a grugée. Il peut alors lâcher ses coups, et ses chiens. Quelle que soit sa charge, malgré les résistances humanistes plus ou moins sincères de ses employeurs, son audience populaire constitue son meilleur avocat : i>Télé l’a viré, perdant une bonne partie de ses téléspectateurs de la gauche pragmatique. RTL ne peut pas perdre au profit de RMC les Français en colère, qui font le sel des polémiques actuelles… publicitairement vendeuses.
La question qui nous intéresse vraiment : s’il y a de la place pour un Zemmour, malpensant mais juif, sans être ultrasioniste, peut-il y avoir de la place pour un dissident authentique, du type Soral, ou approchant (mettons un penseur entre Zemmour et Soral), dans les médias de masse ? En d’autres termes, ce système est-il assez fort pour absorber sa critique, son miroir critique ? Voilà le test ultime.
- Tiens, va lui fermer sa gueule, à celui-là
Si le système a besoin de grandes gueules pour donner au public des gages de liberté d’expression, on a vu que les grandes gueules touchaient rarement à la clôture. D’abord parce qu’on y prend des coups de jus qui calment aussitôt, ensuite parce que les coups de jus servent de prévention à ceux qui seraient tentés de penser autrement, ou plus loin. C’est de la prévention répressive, ou de la répression préventive : pendant la bataille d’Alger, quand les services français torturaient un militant FLN, ils prenaient bien soin de laisser les autres prisonniers écouter la séance, ce qui suffisait à les faire parler.
En milieu démocratique, tout l’art des dominés consiste généralement à ne pas tendre la chaîne, pour ne pas sentir la dureté du pouvoir. Les vraies grandes gueules tirent à fond dessus. Sans ces éclaireurs, au vrai sens du terme – puisqu’ils éclairent le troupeau grâce aux coups de jus qu’ils provoquent – on vivrait tous dans une liberté factice, où tout serait pensable, mais rien ne serait possible.