Depuis ces derniers jours, l’atmosphère se tend à Kiev, mais aussi dans les officines de propagande qui relaient les humeurs de ce gouvernement et par ricochet de l’OTAN. Il est vrai que la situation se détériore sur le plan militaire, mais aussi politique.
Les opérations de ces derniers jours
L’armée de Kiev connaît des revers dans le « chaudron » de Debaltsevo. Ce « chaudron » (le terme est une traduction de l’allemand « kessel ») correspond en fait à la langue encore tenue par les troupes de Kiev dans le territoire contrôlé par les insurgés (carte 1).
Carte 1
Des combats très violents s’y déroulent, avec l’emploi de chars et de l’artillerie et les pertes des forces de Kiev ont été lourdes. L’artillerie de Kiev a tiré sur des cibles civiles à Donetsk provoquant plusieurs morts, mais ne semble pas en mesure d’affronter efficacement les forces des insurgés. Ces derniers tentent de fermer la poche à deux endroits. Mais, les combats se concentrent autour de Gorlovka (carte 2).
Carte 2
On est en présence de combats de rue à rue, où la détermination des insurgés leur permet de prendre le dessus. De fait, il semble que depuis dimanche soir ils tiennent sous leurs feux la route reliant la poche et le gros des forces ukrainiennes, empêchant par là même l’arrivée de renforts.
Carte 3
Cette bataille a provoqué de fortes tensions politiques dans les forces de Kiev. La « mobilisation générale » décrétée par le pouvoir de Kiev n’a, selon les dires de son propre ministre de la défense, eu qu’un effet très limité, seuls 20% des jeunes requis se sont présentés. Le mouvement de protestation contre la conscription s’amplifie (comme à Kramatorsk et à Odessa) en Ukraine et en 3 jours près de 7 500 jeunes ont fui en Russie pour échapper à la conscription. Pour donner un ordre de grandeur, c’est comme si 45 000 jeunes américains avaient fui au Canada en trois jours lors de la Guerre du Vietnam.
Face à ces échecs, tant militaires que politiques, le gouvernement de Kiev ne songe qu’à une nouvelle escalade et demande des armes à l’OTAN. C’est une logique insensée, hélas appuyée par l’OTAN, et qui risque de conduire, par petit pas, à une guerre généralisée. On peut être effectivement inquiet car les négociations de la fin de la semaine dernière à Minsk ont échouées. Mais, il y a dans ce tableau une véritable lueur d’espoir.
Quelle solution politique ?
Les négociations pour un cessez-le-feu qui avaient reprises à Minsk se sont interrompues. De fait, on ne voit pas ce qui aurait permis d’aboutir à un accord qui soit respecté.
Il faut aujourd’hui avoir le courage de dire qu’une victoire limitée des insurgés du Dobass offre en réalité les meilleures perspectives pour que l’on aboutisse, enfin, à un cessez le feu durable. Une fois la « poche » de Debaltsevo passée sous le contrôle des insurgés, il devient possible de penser à une ligne de cesser-le-feu continue. C’est pourquoi, la mise en œuvre d’un cessez-le-feu réel, appelé de leurs vœux par Mme Merkel et par François Hollande, passe en réalité par une défaite des forces de Kiev. Une fois une ligne continue réalisée, il faudra, ensuite, trouver un accord sur des forces d’interposition.
L’une des raisons de l’échec des divers cessez-le-feu négociés jusqu’à présent est que les adversaires sont directement au contact. Cette situation est propice à des provocations venant des deux côtés. Il faut donc que sous l’égide de l’ONU une force d’interposition, sans doute constituée autour de soldats des BRICS, puisse être mise en place sur la ligne de cessez-le-feu. Au-delà, il convient de réflechir à une solution politique à ce conflit où déjà plus de 5 000 civils ont péris et qui a provoqué des centaines de milliers de réfugiés, en grande partie en Russie.
Sur la base d’un cessez-le-feu qui soit réellement respecté, on pourra effectivement construire une véritable solution politique qui sera le prélude à la reconstruction du Donbass où les troupes de Kiev ont systématiquement détruit toutes les infrastructures. Si la notion de « fédéralisation » de l’Ukraine est morte, on peut penser qu’un statut d’autonomie des régions de l’est de l’Ukraine au sein du pays, sur le modèle de la région autonome du Kurdistan en Irak, pourrait être possible. Mais, cette solution exigera des deux côtés beaucoup d’efforts.