Les bouledogues ont une réputation de « froide persistance dans ce qu’ils entreprennent », comme le disait ce bon Abraham Lincoln du général Grant : « Il s’accroche comme un bouledogue ; une fois qu’il plante ses crocs quelque part, personne ne peut lui faire lâcher le morceau », disait-il. La master class de l’UE pourrait donner aux chiens-chiens une bonne leçon de serrage de mâchoires. Bien des Etats européens ont tenté de se libérer de la prison des « nations européennes », mais ils ont tous échoué.
Est-ce que BoJo, comme ils appellent leur flamboyant Boris Johnson, le Premier ministre britannique, va réussir son coup là où les autres se sont plantés ? Lui aussi, c’est un bouledogue dans son bon droit ; il croit à la cause qu’il défend ; il jouit du soutien populaire et de la haine des professionnels de la politique. En tout cas, il est le seul à avoir une chance de gagner. Et s’il gagne, la domination des élites hostiles recevra un terrible soufflet.
Même si le mercredi 4 septembre il a subi une défaite, ce n’est pas la fin de l’histoire. La grosse caisse n’a pas encore retenti. Il y a encore bien d’autres voies ouvertes à un homme tenace pour sortir l’Angleterre de l’UE vers la fin du mois d’octobre. Le soutien massif au parti du Brexit aux élections est envisageable. Un Brexit dur, sans accord, sans l’aval du Parlement, c’est aussi techniquement possible.
La bataille pour le Brexit n’est pas une bataille avec ou contre l’Europe. Les Européens sont avec BoJo contre leurs propres élites. Les Français rêvent d’un Frexit, et même les Grecs préfèreraient un Grexit à leur situation actuelle de pays mis en pièces par l’austérité. Chaque fois qu’on a demandé aux peuples s’ils voulaient rester dans l’UE, cette organisation non démocratique entièrement possédée et dirigée par des élites hostiles, ils ont répondu NON avec des rugissements. La liste est longue. En 2005, les Français avaient voté NON à la Constitution européenne, les Hollandais répondant NEE ; d’autres gouvernements ont vite compris le message et habilement annulé les référendums prévus. La Norvège, la Suisse, l’Irlande, le Groenland, le Danemark, la Grèce avaient voté NON. Mais les élites hostiles n’ont pas considéré ce NON comme une réponse. Chaque fois, ils ont mis en place un subterfuge, en posant une nouvelle question lors d’un nouveau vote, ou, plus souvent, ils ont décidé qu’on n’avait aucun besoin de referendum. Dans le cas de la Grèce, les gens avaient voté NON, mais le parti au pouvoir a rétorqué « c’est pas grave », avant de répondre OUI à leur place.
Les nations les plus importantes, celles qui donnent des subsides, en Europe occidentale, veulent se retirer, ce qui n’est pas surprenant. L’UE est gérée par une commission non élue, tandis que le Parlement européen n’a pratiquement pas de pouvoirs. L’UE promeut l’immigration massive qui dilue et remplace la population native ; elle promeut obsessionnellement des perversions sexuelles comme nouvelle norme ; elle est violemment antichrétienne ; elle adore l’énergie verte très chère et les taxes sur les carburants. Elle travaille main dans la main avec les médias de masse qui sont aussi horribles que ceux de l’Amérique. L’UE prescrit l’austérité pour les classes moyennes et inférieures, elle taxe les revenus du travail ; elle est généreuse avec les banques et les banquiers ; seuls les nouveaux Etats européens votent OUI, dans la perspective de prébendes de l’UE. Les plus enthousiastes sont la Lituanie, la Slovaquie et la Macédoine du nord, et ce n’est guère la compagnie la plus souhaitable pour un beau pays comme la Grand-Bretagne. L’UE a été décrite comme l’outil américain pour gérer l’Europe occupée, mais l’élection de Trump a révélé que c’est plus compliqué. Il y a maintenant deux Amériques, celle de Trump et de ses soutiens nationalistes, et l’autre Amérique, internationaliste et libérale ; celle-ci sera en pleine symbiose avec l’UE. Et c’est pour cela que BoJo, ami de Trump et pro-américain, veut que le Brexit se réalise.
Son principal adversaire Jeremy Corbyn lui aussi rêve d’un Brexit pour sortir l’Angleterre de l’UE néolibérale et la mettre face à son avenir socialiste, mais il marche sur des œufs, parce qu’il veut éliminer Boris Johnson et prendre sa place personnellement au 10 Downing Street. Il flirte avec les anti-Brexit parce qu’il a besoin de toutes les voix pour gagner, et il craint qu’en cas de réussite du Brexit, Johnson ne devienne imbattable. Autrement dit, il est aussi partisan du Brexit que BoJo, quoique pour des raisons différentes.
D’autres personnes ont d’autres raisons et d’autres buts ; aucun doute, la cause du Brexit est très populaire dans le peuple malgré la torture subie depuis trois ans. Les récentes élections au Parlement européen l’ont prouvé : une nette majorité a voté pour les candidats qui soutenaient le Brexit. Si la démocratie signifie le choix du peuple, le Brexit est l’acte le plus démocratique que l’Angleterre puisse poser, même si dans ce but le Parlement de Westminster doit être mis hors jeu.
Le Parlement britannique de 2016 a créé une fenêtre d’Overton inattendue, et les gens se sont rués dedans. Les élites avaient mal calculé leur coup quand elles avaient considéré les Anglais comme parfaitement domestiqués. C’est un peuple malin qui savait que c’était une occasion à saisir, et qu’il pouvait gagner ; et il a voté NON. On en aurait tous fait autant. Les élites étaient choquées, comme les élites hostiles des US ont été choquées par la victoire de Trump. Et elles ont aussitôt commencé à œuvrer pour inverser ce résultat, exactement comme leurs pairs américains. Ce sont des gens têtus, c’est le moins qu’on puisse dire. Le referendum en Grande-Bretagne a eu lieu en juin 2016, et depuis lors les élites font tout ce qu’elles peuvent pour empêcher la volonté populaire de s’imposer.
Le Guardian est un quotidien anti-Brexit. Autrefois j’ai été un fervent lecteur du Guardian ; c’était un journal de gauche jovial, avec John Pilger, Seamus Milne et d’autres bons garçons et bonnes filles, un choix évident pour Julian Assange et son Wikileaks. Depuis, il a basculé à 180 degrés, et c’est devenu un torchon qui donne la nausée à tout le monde anglophone. J’ai perdu tout intérêt pour sa ration journalière de gens avec des noms exotiques qui décrivent les micro-agressions dont ils souffrent ; les féministes contre les quolibets grossophobiques, les transgenres à la recherche de toilettes publiques ; les juifs redoutant le méchant Corbyn, les vieilles dames de 75 ans courant après leur premier orgasme (je n’exagère pas) et d’autres sujets qui m’indiffèrent complètement. Depuis ces trois dernières années, le Guardian n’a pas laissé passer une occasion de faire peur aux Brexiteurs. Il n’y aura plus rien à manger, le pays va s’effondrer, il n’y aura plus de lois ni d’ordre, prophétisent-ils. Pour moi, c’est autant d’arguments pour un Brexit ; quoi que le Guardian vous recommande, cela ne peut pas être bon pour vous.
The Economist est un autre cas funeste, qui prêche contre le Brexit. Jadis un bon magazine, c’est devenu la voix des banquiers. Le « Social Justice Warrior » trotskiste a rejoint les banquiers, dans une combinaison peu fréquente. Ce n’est pas souvent que The Economist et The Socialist Worker parlent d’une même voix.
Les Anglais qui ont voulu et voté pour le Brexit se retrouvent décrits comme des racistes et des chauvinistes. Je n’apprécie pas le racisme, qui est une idéologie destinée à égarer et à diviser ; mais les antiracistes sont encore pires. L’antiracisme est l’idéologie de la conquête et du remplacement. Les conquistadors étaient antiracistes, alors que les autochtones d’Amérique pourraient être vus comme des racistes, parce qu’ils se battaient contre les envahisseurs.
Si la Grande-Bretagne était un pays normal, comme il y a cinquante ans, elle foncerait dans le Brexit comme un couteau dans le beurre. Mais sa classe ouvrière a été mise en pièces par Mme Thatcher, Londres est devenu une résidence de choix pour les riches arabes et russes, qui ont les Polonais et les Indiens pour domestiques. La nouvelle population cosmopolite ne s’intéresse pas à l’Angleterre ni au peuple anglais, et eux aussi ont le droit de vote. Ils préfèrent l’UE, l’entité supranationale qui est bonne pour les finances et pour les immigrants.
La majorité des parlementaires est contre le Brexit. Il détestent le Brexit presqu’autant qu’ils détestent Corbyn : « Trop de députés tentent désespérément de détourner le Brexit, disait le député John Baron. Trop de membres des Communes sont en secret des gens qui veulent rester dans l’UE et ils ont juste cherché à gagner du temps trop souvent : ils devraient reconnaître que ce qu’ils veulent vraiment c’est la fin du Brexit ».
Nous pouvons écarter leurs explications, qu’ils disent qu’ils veulent un « Brexit bien ordonné », ou qu’ils veuillent bloquer le « coup d’État de Boris Johnson ». Ce qu’ils veulent, c’est rester dans l’UE, dans la structure à laquelle ils sont reliés. Les professionnels de la politique survivent grâce à leurs réseaux, et les leurs, ce sont l’UE et l’establishment américain internationaliste.
En attendant, les Britanniques peuvent se féliciter d’avoir fait échouer l’accord bricolé par Mrs Theresa May. Cet accord était probablement pire que de rester dans l’UE, car il aurait remis l’Angleterre au cœur de toute négociation de l’UE sauf pour ce qui est du pouvoir décisionnaire. La Grande-Bretagne aurait aussi dû payer plus de 40 milliards de dollars, ou peut-être plus encore. L’UE ne veut pas que la Grande Bretagne la quitte, parce que c’est un donateur capital ; le Brexit pourrait ouvrir le chemin hors de l’UE à d’autres Etats. L’UE aura moins d’argent à dépenser pour nourrir ses nouveaux membres pauvres de l’Europe de l’Est, sans parler de la misérable Ukraine. Toute l’influence que l’UE a en Grande-Bretagne s’est vue mobilisée pour faire échouer le Brexit. Maintenant, avec la nouvelle loi Benn, l’UE va pouvoir compliquer vraiment le travail à Boris Johnson.
Le meilleur Brexit, c’est un Brexit dur, sans accord du tout. Après son évasion, la Grande-Bretagne indépendante sera capable de négocier pacifiquement de nouveaux rapports avec l’UE. En bloquant la solution No-Deal, les parlementaires l’ont rendue presque impossible à réaliser, et très coûteuse.
L’UE n’a pas envie de décliner et de disparaître. Elle se bat contre le Brexit en implantant une nouvelle norme. Si l’Empire romain avait été géré par les fonctionnaires de l’UE, la Grande-Bretagne en ferait encore partie. Si les Russes avaient su qu’ils pouvaient faire payer les États baltes et l’Allemagne de l’Est pour avoir quitté l’URSS et le Pacte de Varsovie à hauteur de je ne sais combien de milliards, l’OTAN ne se serait jamais étendue à l’est. Boris Johnson a été sermonné par Donald Tusk, le Président du Conseil européen, parce que son pays, la Pologne, est un des principaux bénéficiaires de l’aide européenne, tant que le Royaume-Uni paye pour les nantis polonais. Il ne veut pas voir la Grande-Bretagne prendre la tangente, comme tout propriétaire d’esclaves déteste voir son esclave reprendre sa liberté.
La débâcle du Brexit est un signe de crise de la démocratie. La volonté du peuple britannique s’est vue contrecarrée à répétition par les parlementaires élus et par des administrateurs non élus. Il en a pratiquement été de même aux États-Unis, où la volonté du peuple s’était clairement exprimée à travers l’élection de Trump. Ceux qui le soutiennent voulaient voir les soldats rentrer chez eux, voulaient nouer une amitié avec la Russie, en finir avec l’immigration de masse, en finir avec la diabolisation des hommes blancs américains. Tous ces souhaits ont été détournés par les membres du Congrès et les domestiques non élus de l’État profond.
La volonté populaire devrait prévaloir, en Angleterre comme en Europe. Pour cela, l’immense pouvoir des élites internationales hostiles devrait se voir contenu ; les médias devraient être rendus au peuple, et les parlements purgés de ceux qui parmi eux, se soucient plus d’Israël que de leurs propres pays. Certes, le Parti travailliste serait capable d’assumer le Brexit s’il n’était pas détourné de son but par la chasse aux sorcières de l’antisémitisme. Il y a une claire corrélation entre la cause juive et la cause de l’UE, mais cela pourra faire l’objet d’un autre débat.