L’Ordre national des chirurgiens-dentistes (ONCD) regroupe 44 000 praticiens. Dans son rapport annuel, la Cour des comptes conseille à l’Ordre de « retrouver le sens de ses missions de service public ».
« La gouvernance de l’Ordre national des chirurgiens-dentistes se caractérise par un défaut de représentativité et de renouvellement des instances dirigeantes ainsi que par l’absence de contrôle sur son mode de fonctionnement. De ce fait, l’Ordre a délaissé une partie de ses missions d’organisation et de contrôle de la profession dentaire au profit de la défense d’intérêts catégoriels qui ne lui incombe pas. L’aisance financière que lui procure une augmentation continue des cotisations a favorisé de graves désordres dans les comptes et la gestion. »
C’est ainsi que la Cour des comptes résume son rapport sur l’Ordre national des chirurgiens dentistes, organisme de droit privé chargé (en théorie) d’une mission de service public.
En 2015, les 19 membres du conseil national ont touché plus de 600 000 euros d’indemnités, dont plus de 400 000 euros pour les 8 membres du bureau (50 000 euros par tête de pipe). Ceux-ci bénéficient d’un appartement de fonction, et toutes les charges sont payées par l’Ordre, « jusqu’aux factures de blanchisserie du linge de maison », ce qui équivaut à plus de 100 000 euros par an.
La Cour précise que « l’avantage en nature que constituent ces logements n’est ni déclaré ni réintégré dans les rémunérations des conseillers. S’il peut se justifier pour les conseillers domiciliés en province, qui se rendent deux jours par semaine à Paris, il est sans fondement pour les trois membres du bureau qui habitaient Paris ou la région parisienne au cours de la période contrôlée. »
L’ex-président de l’Ordre, Christian Couzinou, est dans le viseur de la Cour, qui lui consacre un encadré spécial :
« Les indemnités servies au président de 2009 à 2015
Le président de l’Ordre, chirurgien-dentiste retraité depuis le 31 décembre 2008, s’était fait embaucher en avril 2009, pour un salaire de 150 € nets par mois, comme « assistant dentaire » 58 par un confrère. En réalité, son contrat, qui ne comportait qu’une obligation d’une demi-journée de travail par semaine, avait surtout pour effet de lui permettre de continuer à percevoir les indemnités ordinales au taux maximum, le montant alloué aux actifs (605 € en 2015) étant supérieur de 30 % à celui alloué aux retraités (462 €). Son complément de revenu a atteint 107 000 € sur la période. Il y a mis fin lorsqu’a cessé son mandat de président du conseil national de l’Ordre en juin 2015. »
Certains conseils locaux sont également épinglés par la Cour des comptes, notamment pour leur organisation de « réunions confraternelles »...
« Certains conseils locaux organisent des voyages d’agrément, tous frais payés, pour les conseillers. Le conseil départemental du Loiret a ainsi organisé des séjours dans des villes thermales, avec les conjoints, à Vichy en 2012 pour 18 participants et près de 9 000 €, à La Baule en 2014 pour 21 participants et un coût de 14 000 €.
En juin 2012, le président et les membres du bureau du conseil départemental de l’Isère ont, quant à eux, séjourné quatre jours en Corse, près de Porto-Vecchio, aux frais de l’Ordre. Ce voyage, réalisé sous couvert d’une « réunion confraternelle » avec les membres du conseil départemental de l’Ordre de Corse du Sud, a, en réalité, été conçu et organisé comme un voyage d’agrément : présence de conjoints, traversée depuis le continent avec des motos, hôtel de charme à 150 km d’Ajaccio où se trouvent les locaux du conseil départemental de l’Ordre. »
Le rapport pointe également les petits cadeaux matériels concédés par l’Ordre :
« La pratique des cadeaux, achetés sur les fonds de l’Ordre, et donc au moyen des cotisations ordinales, en faveur des conseillers, des membres de leur famille ou parfois des salariés, est extrêmement répandue : grands vins, coffret « Relais et châteaux® » d’une valeur de plusieurs milliers d’euros, bijoux et accessoires de haute couture, pulls en cachemire, montre sertie de diamants, ordinateurs, stylos de grande marque, soins de thalassothérapie et autres chèques cadeaux sont offerts avec prodigalité. Les ordinateurs portables attribués systématiquement aux conseillers nationaux, qui ne font l’objet d’aucun recensement, d’aucun amortissement et d’aucun déclassement, ne sont jamais restitués à l’Ordre en fin de mandat. »
En 2016, la cotisation d’un dentiste à l’Ordre est fixée à 457 euros (+ 14,25 % entre 2009 et 2016). Il est à noter que l’Ordre possède près de 30 millions d’euros de placements financiers.