La Bourse de Shanghai s’est brièvement effondrée de plus de 8% mercredi, avant de modérer à grand peine ses pertes dans un climat de panique, en dépit de nouvelles mesures d’urgence des autorités - dont la suspension des échanges sur quelque 1 300 titres.
A mi-séance, l’indice composite shanghaïen chutait de 3,89%, ou 144,90 points, à 3 582,22 points, après avoir lâché plus de 8,20% en cours d’échanges, ayant enregistré une véritable chute libre à l’ouverture.
La Bourse de Shenzhen, quant à elle, s’affichait en repli de 3,04%, à 1 874,03 points.
Les Bourses chinoises ont abandonné plus de 30% en trois semaines, voyant s’envoler plus de 3 200 milliards de dollars en valeur - selon une estimation publiée par l’agence Bloomberg - soit une douzaine de fois le PIB de la Grèce l’an dernier.
La débâcle se poursuivait mercredi dans un climat d’affolement général, qu’aucune admonestation ou annonce du gouvernement ne parvenait à endiguer.
Les autorités de régulation ont pourtant dévoilé précipitamment tout un train de nouvelles mesures adoptées à marche forcée.
Les compagnies d’assurance sont ainsi désormais autorisées à placer une proportion accrue de leurs actifs en Bourse (40% contre 30% précédemment), et peuvent investir jusqu’à 10% de leurs fonds sur un seul titre.
Pékin a promis d’offrir des "liquidités abondantes" aux maisons de courtage pour maintenir leurs "opérations sur marge" (achats d’actions par endettement), assurant que ces courtiers allaient gonfler leurs acquisitions de titres de sociétés de petite et moyenne capitalisation.
Par ailleurs, les échanges sont désormais interrompus sur plus de 1 300 entreprises cotées, afin d’empêcher leurs titres de descendre encore plus bas : environ 40% de la cote se trouvent donc paralysés.
"Le fait qu’une telle quantité d’entreprises soient suspendues restreint la liquidité disponible (car les titres concernés ne peuvent plus être vendus) et cela accroît le risque pour le reste de la cote", indiquait à l’AFP Li Daxiao, analyste du courtier Yingda.
Du coup, faute de mieux, "les investisseurs n’ont d’autre choix que de commencer à vendre les blue chips (valeurs vedettes à forte capitalisation)", confirmait Zhang Yanbing, de Zheshang Securities.
Même les autorités reconnaissent la gravité de la situation, et les limites de l’interventionnisme officiel.
"La panique des investisseurs et ces ventes massives irrationnelles provoquent une forte pression sur la liquidité des Bourses", s’est lamenté Deng Ge, porte-parole de la CSRC, le régulateur des marchés.
La "débâcle des Bourses contamine les autres marchés financiers, cela génère un sentiment de panique", confirmait Zheng Ge, du courtier Wanda Futures.
Le crédit se réduit sous l’effet de la défiance générale, poussant les investisseurs en quête de liquidités à vendre massivement leurs actions pour s’en procurer.
Rien n’y fait : les nouvelles décisions annoncées dans l’urgence n’ont pas convaincu, pas plus que l’arsenal de mesures prises durant le week-end.
Les 21 principales sociétés de courtage chinoises s’étaient engagées samedi à investir plus de 19 milliards de dollars dans des produits financiers boursiers, et les régulateurs ont promis d’arrêter les introductions en Bourse pour éviter toute perturbation supplémentaire.
L’écrasante majorité des investisseurs sur les Bourses chinoises sont des particuliers, souvent suivistes et s’étant endettés - via des opérations sur marge - pour investir.
Le phénomène a alimenté sur l’année passée l’envolée des marchés, mais il contribue maintenant à accélérer leurs pertes.
Même si la crise grecque n’arrange pas les choses, la raison principale de la sévère correction des place chinoises est à chercher localement.
La Bourse de Shanghai avait gonflé de 150% en douze mois, dopée à l’endettement et déconnectée de l’économie réelle.
De l’avis général, les autorités chinoises sont condamnées à intervenir encore davantage pour stopper l’hémorragie et éviter un trop gros mécontentement populaire.
Pour le gouvernement, c’est aussi une question de crédibilité : il s’appuyait sur les Bourses pour financer le décollage du secteur privé, approfondir ses réformes du secteur financier et ses efforts de rééquilibrage économique.