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Facebook supprime des comptes sur injonction des États-Unis et d’Israël

En septembre dernier, nous évoquions la tenue de réunions entre des représentants de Facebook et Ayelet Shaked, ministre de la Justice israélienne – un extrémiste notoire en matière de colonisation –, dans le but de déterminer les comptes Facebook palestiniens que le gouvernement israélien voulait supprimer pour « provocation ». Depuis, Facebook a, sur injonction de hauts responsables israéliens, pratiqué une censure acharnée des activistes palestiniens qui contestent l’occupation israélienne – une occupation illégale.

 

Les officiels israéliens ont revendiqué publiquement la docilité de Facebook quant aux injonctions israéliennes de censure. Peu après l’annonce ce mois-ci [dédembre 2017, NDLR] de l’accord entre le gouvernement israélien et Facebook, la ministre de la Justice israélienne Ayelet Shaked a déclaré que Tel-Aviv avait soumis cent cinquante-huit demandes au géant des réseaux sociaux au cours des quatre derniers mois afin de supprimer des contenus jugés « provocateurs », ajoutant que Facebook avait accepté 95 % des demandes.

La soumission aux dictats israéliens est difficilement contestable. En décembre dernier, le New York Times écrivait :

« Les agences de sécurité israéliennes surveillent Facebook et signalent les contenus “provocateurs”. Facebook consent à en supprimer la majeure partie. »

Sachant que 96 % des Palestiniens disent utiliser Facebook essentiellement pour suivre l’actualité, le gouvernement israélien dispose donc d’un redoutable pouvoir sur le principal relais de communication des Palestiniens.

Selon The Independent, quelques semaines après les réunions entre Facebook et le gouvernement israélien, le collectif activiste Palestinian Information Center dénonçait la fermeture d’au moins dix comptes administrateurs de leurs pages Facebook en arabe et en anglais – des pages suivies par plus de deux millions de personnes –, dont sept fermetures définitives. En mars dernier, Facebook a fermé temporairement la page du parti politique Fatah suivie par des millions de personnes, « en raison de la publication d’une photo de l’ancien leader Yasser Arafat tenant un fusil ».

Un rapport du Palestinian Center for Development and Media Freedoms de 2016 révèle l’ampleur de la censure par Facebook :

« Pages et comptes personnels filtrés et bloqués : Palestinian Dialogue Network (PALDF.net), Gaza now, Jerusalem News Network, Shihab agency, Radio Bethlehem 2000, Orient Radio Network, page Mesh Heck, Ramallah news, le journaliste Huzaifa Jamous de Abu Dis, l’activiste Qassam Bedier, l’activiste Mohammed Ghannam, le journaliste Kamel Jbeil, les comptes administrateurs de Al Quds Page, les comptes administrateurs de Shihab agency, l’activiste Abdel-Qader al-Titi, l’activiste pour la jeunesse Hussein Shajaeih, Ramah Mubarak (compte réactivé), Ahmed Abdel Aal (compte réactivé), Mohammad Za’anin (compte toujours désactivé), Amer Abu Arafa (compte toujours désactivé), Abdulrahman al-Kahlout (compte toujours désactivé). »

Bien évidemment, les Israéliens sont eux totalement libres de publier ce qu’ils veulent à propos des Palestiniens. Les appels aux meurtres de Palestiniens par des Israéliens sont chose courante et commis en toute impunité.

L’année dernière, Al Jazeera rapportait que les autorités israéliennes et Facebook se préoccupaient peu des publications en hébreu et que les censures étaient rares, malgré une étude révélant que plus de cent vingt mille utilisateurs publiaient du contenu comprenant « meurtre », « tuer » ou « brûler ». Les Arabes constituaient la cible prioritaire de ces appels à la violence.

Bien que certains appels au meurtre les plus explicites aient été supprimés, Facebook permet toujours la prolifération de propos extrémistes. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou lui-même tient régulièrement sur Facebook des propos nettement incitatifs et explicitement violents à l’égard des Palestiniens.

Contrairement à l’attitude volontaire de Facebook quand il s’agit de supprimer des comptes palestiniens, son pouvoir de censure est moins affirmé lorsqu’il s’agit d’incitation à la violence émanant de Netanyahou ou de toute autre personnalité israélienne. Du reste, Al Jazeera remarque que Facebook « n’a jamais rencontré les dirigeants palestiniens pour entendre leurs préoccupations ».

Facebook avoue également se plier aux injonctions américaines. Plus tôt cette semaine, l’entreprise a supprimé les comptes Facebook et Instagram de Ramzan Kadyrov, le président très autoritaire et répressif de la Tchétchénie. Il cumulait quatre millions de followers sur ses deux comptes. L’homme a le champ libre pour gouverner la province en échange d’une loyauté totale à Moscou. Personnage très antipathique, il fait l’objet d’accusations légitimes de nombreuses violations des droits de l’homme, depuis l’emprisonnement et la torture de personnes LGBT à l’enlèvement et le meurtre de dissidents.

Pour autant, le raisonnement justifiant la politique de censure de Facebook n’en est pas moins préoccupant. En effet, un porte-parole de Facebook a déclaré au New York Times que l’entreprise a supprimé les comptes de Kadyrov non pas du fait des accusations de tyrannie et de meurtres en série, mais parce que « son nom a été ajouté à la liste des sanctions américaines » et que l’entreprise « en a l’obligation légale ».

Comme le fait remarquer le New York Times, ce motif mis en avant est incohérent voire douteux, car d’autres personnalités présentes sur cette liste de sanctions, comme le président vénézuélien Nicolas Maduro, restent actifs sur Facebook et Instagram.

Ainsi, le gouvernement des États-Unis – en l’occurrence, le gouvernement Trump – a le pouvoir unilatéral et absolu d’imposer la suppression de comptes Facebook et Instagram de qui que ce soit, simplement en ajoutant un nom sur une liste de sanctions.

Ce type de pouvoir est-il souhaitable ? Peut-on avoir confiance dans le gouvernement Trump – ou tout autre gouvernement –, quand il s’agit d’imposer à une plateforme de réseau social la suppression ou le blocage de toute personne qu’elle veut réduire au silence ? Jennifer Granick, de l’ONG « Union américaine pour les libertés civiles », a déclaré au New York Times que ces injonctions de suppression de comptes sont formulées dans le cadre d’une loi relative aux relations commerciales et de financements. Cette loi n’inclut pas le cadre spécifique de la liberté d’expression et est donc inappropriée. Aussi, elle risque fortement d’entraver le droit à la parole.

Se demander si la politique Facebook de blocage des personnes « sanctionnées » s’applique à tous les gouvernements, c’est y répondre ! Si, par exemple, l’Iran décidait d’imposer des sanctions à Chuck Schumer pour son soutien à la décision de Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël, il va sans dire que Facebook ne supprimerait pas les comptes de ce leader de la minorité démocrate au Sénat – tout comme Facebook ne supprimera jamais les comptes de responsables israéliens qui incitent à la violence contre les Palestiniens, ou qui seraient sanctionnés par des responsables palestiniens.

Le mois dernier, la Russie a annoncé des sanctions de représailles contre plusieurs membres du gouvernement canadien. Sans surprise, Facebook n’a appliqué ni censure ni blocage de leurs comptes.

De la même manière, Facebook oserait-il censurer des politiciens ou des journalistes américains qui utiliseraient le réseau social afin d’appeler à la violence contre les ennemis des États-Unis ?

De fait, le seul et unique principe directeur de la censure est le pouvoir. Facebook se soumettra et n’obéira aux injonctions de censure qu’aux gouvernements ou hauts responsables ayant une influence sur lui, et ignorera les autres. D’où l’impuissance des opposants aux gouvernements américains et israéliens face à la censure de Facebook et d’où, inversement, la force des dirigeants américains et israéliens (et de leurs alliés les plus tyranniques et répressifs).

Qu’elle provienne de l’État ou des géants de la Silicon Valley, la censure demeure un danger. Les demandes de censure par l’État peuvent parfois être bien intentionnées (par exemple, la protection des minorités contre les méfaits des « propos haineux »). Cependant, on le sait, elles sont bien plus souvent formulées au détriment des minorités : on les censure au lieu de les protéger. Une brève observation de la façon dont les lois contre les contenus haineux sont utilisées en Europe ou sur les campus universitaires américains suffit à comprendre que les victimes de la censure sont, pour la plupart, des personnes critiques des guerres européennes ou des activistes opposés à l’occupation israélienne, ou encore des défenseurs des droits des minorités.

Pour qui vit dans un monde fantasmé, les responsables de la Silicon Valley utilisent leur pouvoir afin de protéger les peuples marginalisés dans le monde et pour censurer ceux qui leur veulent du mal. Mais dans le monde réel, gouvernements et entreprises utilisent ce pouvoir de censure non pas pour réprimer, mais pour servir les factions les plus puissantes de la planète.

Au même titre que l’on pourrait se féliciter de la censure de celui qu’on n’aime pas sans se préoccuper des conséquences à long terme sur la validité d’un tel principe, on pourrait se féliciter du retrait de Facebook et d’Instagram d’un monstre tchétchène. Mais Facebook nous dit explicitement que la motivation de ses actions se limite à l’observance de décrets du gouvernement américain contre ceux qui doivent être réduits au silence.

Il est difficile de croire que la vision idéale de l’Internet implique le pouvoir du gouvernement américain, du gouvernement israélien, ou de tout autre pouvoir dans le monde de décider qui peut être admis et qui doit être supprimé. Mais inexorablement, et ce au nom de la nécessité pour les entreprises du web de nous protéger, c’est exactement ce qui est en train de se produire.

 

Article traduit de l’américain par le Pôle Traduction d’E&R

 

 

 

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