Les chiffres des demandeurs d’emplois, ce que l’on appelle abusivement les « chiffres du chômage », du mois de mars ont été l’occasion d‘un étalage d’autosatisfaction de la part des différents ministres du gouvernements aussi injustifié qu’indécent. Le fait que des médias aient repris de manière non critique et sans les discuter ces chiffres ajoute au scandale le désagréable sentiment d’être pris pour des imbéciles par des arriérés ne sachant visiblement pas de quoi l’on parle ni calculer. Les « journalistes » de France 2 se sont à cet égard particulièrement « distingués », si l’on veut employer ce terme, par des commentaires où l’ignorance ne le disputait qu’à la l’indécence et à la propagande, lors de leur journal de 20h du 26 avril 2016.
De quoi parle-t-on ?
De quoi s’agit-il ? La baisse du nombre des demandeurs d’emplois de « catégorie A » a donc été saluée à coup de trompes. Il eut mieux fallu user de la corne de brume tant les « journalistes » semblent dans le brouillard !
Rappelons donc d’abord quelques faits. Les données présentées en France ne sont pas celles du « chômage » mais uniquement celles des « demandeurs d’emploi ». Elles sont collectées par la DARES. Les données des demandeurs d’emplois sont des données administratives, et peuvent faire l’objet de corrections, en particulier quand le demandeur d’emploi ne remplit pas certaines des conditions pour se voir inscrit. Dans ce cas, il est rayé des listes et « disparaît », mais ne cesse pas pour autant d’exister comme « chômeur »… Ces données sont de plus réparties en catégories qui sont définies comme suit par la DARES [1] :
« … la Dares et Pôle emploi présentent à des fins d’analyse statistique les données sur les demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi en fonction des catégories suivantes :
Catégorie A : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, sans emploi ;
Catégorie B : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite courte (i.e. de 78 heures ou moins au cours du mois) ;
Catégorie C : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite longue (i.e. de plus de 78 heures au cours du mois) ;
Catégorie D : demandeurs d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi (en raison d’un stage, d’une formation, d’une maladie…), sans emploi ;
Catégorie E : demandeurs d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, en emploi (par exemple : bénéficiaires de contrats aidés). »
Ainsi, le chômage réel, tel que l’on peut l’estimer à partir du nombre des demandeurs d’emploi couvre en réalité les catégories A + B + D, et l’on peut considérer que la catégorie B+D correspond à un chômage masqué statistiquement. Il convient alors de regarder comment ont évolués les accroissements.
[...]
Une première conclusion que l’on peut tirer de ces chiffres est qu’il n’y a pas de mouvement significatif d’accroissement des reprises d’emploi. Il faut bien entendu le déplorer. La variation des reprises d’emplois (+500) n’explique pas la baisse du nombre des demandeurs d’emplois. La hausse des entrées en stage a pu jouer à la marge. Et l’on sera le dernier à le regretter. Une entrée en stage peut, par la suite, déboucher sur un emploi. Mais, il faut constater que cette hausse est faible (+1800). Elle n’explique pas la totalité de la baisse des demandeurs d’emplois.
Ce sont biens les « motifs administratifs » (radiation et défaut d’actualisation) qui expliquent la quasi-totalité de la baisse des demandeurs d’emplois. Un observateur objectif aurait dû le constater et mettre en doute les communiqués triomphalistes des ministres. Ce même observateur objectif aurait pu poser la question du pourquoi de cette montée des baisses administratives du nombre des demandeurs d’emploi, et faire le lien avec le projet, de moins en moins déguisé, du Président François Hollande de se représenter…
Bref, la publication des statistiques des demandeurs d’emplois a été une nouvelle fois l’occasion d’une énorme manipulation politique. Mais elle a aussi été l’occasion de constater que nombre de journalistes font désormais de la propagande et nullement de l’information !
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