Egalité et Réconciliation
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Athènes, Paris et la souveraineté

(Ce texte est destiné à être publié en russe dans une revue de sciences politiques)

La souveraineté est aujourd’hui une question centrale. Elle est la question décisive du moment historique que nous vivons. Elle détermine ainsi les choix politiques, mais aussi la compréhension des crises que nous vivons. Elle occupe cette place centrale pour deux raisons convergentes.

D’une part, la souveraineté est nécessaire à l’action politique, à ce passage du « je » au « nous » de l’action collective, et cette dernière est une impérieuse nécessité face aux crises, tant économiques et sociales que politiques et culturelles que nous traversons. Mais, la souveraineté est aussi fondamentale à la distinction entre le légitime et le légal. Or, cette distinction est constamment remise en cause par la logique des institutions qui régissent notre système politique.

Nous vivons dans des régimes et des systèmes politiques où le « comment » a pris la place du « pourquoi ». Cela correspond à une prise de pouvoir du « technique » sur le « politique ». Une partie des crises dont il été fait mention en découle. Si nous voulons pouvoir reposer la question du « pourquoi », et par cela comprendre qu’il y a une multiplicité de « comment » possibles, alors la souveraineté est indispensable. Mais, si légitimité et légalité ne se comprennent qu’à l’aune de la souveraineté, il faut alors admettre que la laïcité, au sens du renvoi des croyances non testables à la sphère du privé, s’avère tout autant nécessaire pour la construction du Bien Commun, ce « Res Publica » dont le mot République est issu.

1. Les deux mois de janvier.

S’il faut s’en convaincre, deux événements survenus en janvier 2015 nous le confirment, l’un indirectement et l’autre directement. Le premier de ces événements est constitué par les assassinats du 7 et du 9 janviers 2015 à Paris. Ces assassinat nous ont confronté à cette cruelle vérité : la République peut se défaire.

Charlie ou la République se meurt.

Ce que ces crimes atroces ont révélé, et avec eux le débat provoqué par le slogan « je suis Charlie » [1], c’est bien la montée d’un sentiment communautaire. Or, ce sentiment est aux antipodes de la République. Il met en cause la légitimité de nos institutions et de nos pouvoirs.

Ironie cruelle, ce drame est survenu pratiquement dix ans après le référendum de 2005. Que l’on se souvienne : les Français avaient refusé par une large majorité le projet de traité constitutionnel européen qui leur était proposé. Pourtant, la classe politique, unie sur ce point au-delà de ses divergences, de la droite ex-gaulliste au parti dit socialiste, s’empressa pour concocter un nouveau traité, fort similaire à celui qui avait été refusé. Ce Traité de Lisbonne fut alors adopté par le « congrès », archaïsme de la IIIème et de la IVème République, à la légitimité – justement – bien plus faible que celle d’un référendum. Ce scandale, et il est immense, signe le début d’un délitement de l’Etat que ne saurait masquer les rodomontades des uns, la bonhommie finasse des autres, ou les coups de mentons des troisièmes. Il fut, et reste, une atteinte majeure à la souveraineté de la Nation, c’est à dire à la souveraineté du peuple.

Mais il y a plus, et pire. Les crimes de janvier 2015 ont aussi remis en cause l’un des principes fondateurs de la République et de la démocratie. En cherchant à imposer un « délit de blasphème », en tuant des personnes du fait de leur religion (ou de son absence), c’est notre idée de la République, de cette « chose commune » ou Res Publica, que l’on tue. En réalité il y a un lien entre tout cela [2]. Quand on porte atteinte à la souveraineté du peuple, on porte atteinte à la légitimité des institutions et l’on affaiblit la légalité, c’est-à-dire la force de la loi.

La mise en cause, sournoise ou directe, de la souveraineté du peuple ouvre aussi toute grande la porte à sa dissolution et à sa reconstitution sous la forme de communautés, que ces dernières soient religieuses ou ethniques. Il ne peut y avoir de peuple, c’est à dire de base à construction politique de la souveraineté populaire, que par la laïcité et ce principe fondamental, inclut d’ailleurs dans notre Constitution, que la République ne reconnaît nulle religion et nulle race. Ainsi sommes nous confrontés à un défi absolu : la République ou la guerre de tous contre tous.

Lire la suite de l’article sur russeurope.hypotheses.org

Notes

[1] Todd E., Qui est Charlie ? Sociologie d’une crise religieuse, Paris, Le Seuil, 2015.

[2] «  La genèse de la laïcité » in Blandine Kriegel, La politique de la raison, Paris, Payot, 1994.

Voir aussi, sur E&R :

Sur les sujets abordes dans l’article de M. Sapir
chez Kontre Kulture :

Militer pour préserver l’unité de la France
avec Dieudonné et Alain Soral :

 
 






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16 Commentaires

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  • #1174601
    Le 1er mai 2015 à 15:36 par dixi
    Athènes, Paris et la souveraineté

    Putain !!! c’est facile à comprendre ,un pays ne fonctionne que lorsqu’il a sa monnaie,ses frontières,ses lois, son industrie, et un gouvernement qui se bat pour son peuple et pour sa souveraineté point. Le reste c’est de la destruction ,de la division .

     

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  • #1174676
    Le 1er mai 2015 à 16:58 par Paganhate
    Athènes, Paris et la souveraineté

    Il n’y a qu’une révolution PHYSIQUE qui nous sortira de tout ça.

     

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    • #1175033
      Le Mai 2015 à 22:38 par bernie
      Athènes, Paris et la souveraineté

      Bonjour,

      C’est une révolution physique et mentale. Laissons la révolution armée.
      L’arme tue, coûte très chère au peuple et n’apporte rien. La revolution physique et mentale ne peut se faire collectivement. C’est à chacun de nous à réfléchir pour avancer respectueusement et utilement.

       
  • #1174760
    Le 1er mai 2015 à 18:18 par Ajax
    Athènes, Paris et la souveraineté

    Un rebelle impertinent pertinent ce Monsieur Sapir ;-) : ses démonstrations forts longues examinent tous les aspects d’une problématique dont je relis au moins deux fois certaines parties pour bien comprendre certaines données économiques avancées qui me semblent étrangères car n’ayant pas cette formation initiale.

     

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  • #1174902
    Le 1er mai 2015 à 20:15 par Eric
    Athènes, Paris et la souveraineté

    M. Sapir prétend être le chantre de la souveraineté et de la démocratie alors même qu’il dénature le sens de ces deux concepts. Pour lui, le peuple est souverain lorsqu’il est représenté par des oligarques. S’il débattait avec Etienne Chouard, il subirait une cuisante humiliation. M. Sapir, comme tous les républicains, déteste la démocratie qu’il prétend exalter. C’est pourquoi il censure sur son blog tous mes commentaires pro-démocratie.

     

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    • #1175387
      Le Mai 2015 à 14:05 par SC31
      Athènes, Paris et la souveraineté

      C’est exactement la réflexion que je me suis faite. S’il débattait avec Chouard, Sapir serait rapidement ridiculisé. La chose commune (République) de Sapir contre la vraie démocratie par tirage au sort, qui a déjà fait ses preuves pendant 200 ans, promue par Etienne Chouard.
      La constitution n’organise aucun contre-pouvoir, le peuple n’est pas protégé. La constitution est l’organisation de l’impuissance politique du peuple. Pourquoi Sapir feint-il de l’oublier ?

       
    • #1175570
      Le Mai 2015 à 18:33 par Isamovic
      Athènes, Paris et la souveraineté

      "La chose commune (République) de Sapir contre la vraie démocratie par tirage au sort, qui a déjà fait ses preuves pendant 200 ans, promue par Etienne Chouard."

      Athènes, c’était 80000 habitants dont la moitié qui n’étaient pas citoyens. Un système appliqué à seulement 40 000 personnes, je n’appelle pas ça "faire ses preuves".
      D’autant que ce qui faisait la force du système athénien, ce n’était pas ce tirage au sort que vous appelez de vos vœux mais plutôt le mécanisme de reddition qui permettait un contrôle a posteriori très strict portant sur l’exercice des charges publiques confiées à l’individu.
      La démocratie directe est un joli concept ; seulement, c’est un modèle qui n’est viable qu’à l’échelle de la cité (soit de la commune pour nous)

       
  • #1175016
    Le 1er mai 2015 à 22:12 par itohan
    Athènes, Paris et la souveraineté

    Bruxelles envoie à Athènes des milliards d’euros à la condition qu’il y ait 50% de retro commissions , le reste devant être partagé entre politiciens hellenes

     

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  • #1175251
    Le 2 mai 2015 à 10:11 par bernie
    Athènes, Paris et la souveraineté

    bonjour,

    ce qui est doublement inquiétant c’est cette guerre nucléaire annoncée.
    Les américains auraient fabriqué des têtes d’ogives nucléaires. Et ces rafales qui se vendent comme des petits pains en France.
    Et puis il y a la Corée du Nord avec cette arme
    Et nos voisins les Russes, qu’en pensent ils ?
    Nos chers petits enfants vont être mis à rude épreuve.

     

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  • #1175440
    Le 2 mai 2015 à 15:04 par fred89
    Athènes, Paris et la souveraineté

    Cela fait longtemps que le combat à mener n’est plus celui de la gauche contre la droite, du libéralisme contre l’étatisme, du christianisme contre l’islam ou je ne sais trop quoi encore, mais bel et bien celui de la Nation contre l’Union Européenne.
    Tant que nous n’aurons pas retrouvé notre liberté d’action que seule la souveraineté du pays et donc de son peuple, nous garantit, nos votes et nos combats ne serviront à rien.
    Si la majorité du peuple n’est pas prête à mettre de côté ses opinions personnelles, ses croyances, ses aversions pour l’autre, afin de s’unir et mettre à bas l’oligarchie de Bruxelles, nous allons droit vers la fin de la société occidentale, au mieux par l’effondrement économique, au pire par la guerre.

     

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  • #1175469
    Le 2 mai 2015 à 15:58 par la pythie
    Athènes, Paris et la souveraineté

    Je lis régulièrement les rubriques de monsieur Sapir, mais je suis souvent déçu : ce monsieur, sûrement compétent dans son domaine, oublie que l’économie dicte sa loi aux états - dès lors, la démocratie, telle qu’il l’entend, est un voeu pieux ! Depuis la fin des années 60, la finance a pris les rênes du pouvoir, et cela monsieur Sapir fait mine de l’ignorer -comme son ami, pierre- yves Rougeyron, il croit que les politiques ont encore quelque pouvoir... quand ils ne sont plus que les femmes de ménage de la Finance mondiale.

     

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    • #1175474
      Le Mai 2015 à 16:04 par Titus
      Athènes, Paris et la souveraineté

      C’est totalement faux. Le politique a toujours le pouvoir sur l’économie et la finance. Le problème est que le politique choisit de céder à la finance. Mais il pourrait faire le choix opposé, s’il en avait le courage et la volonté. Ça c’est déjà vu dans l’histoire (règnes de Philippe Le Bel ou de Saint Louis par exemple).

       
    • #1175575
      Le Mai 2015 à 18:35 par SC31
      Athènes, Paris et la souveraineté

      @Titus : comment voulez-vous que les politiques fassent front face aux Banques, alors que ce sont celles-ci qui financent leurs coûteuses campagnes politiques ?
      Comment alors les partis politiques pourraient lutter contre les Hedge Funds qui ont plombé la Grèce grâce aux délits d’initié de Goldman Sachs, et qui s’attaquent aujourd’hui à d’autres pays européens ?
      Je crois les partis politiques incapables de réguler la Finance, le système est vérolé. Or, c’est notre priorité première. C’est pourquoi Chouard est pour moi le seul dissident digne de ce nom, le seul à voir clair dans la source de nos maux .

       
  • #1175907
    Le 3 mai 2015 à 11:08 par bernie
    Athènes, Paris et la souveraineté

    notre Ministre de la fonction publique et de la décentralisation a institué la fin progressive de l’indemnité compensatoire. Est ce que les tous petits fonctionnaires sont responsables des politiques de santé forts cooûteuses

     

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  • #1178885
    Le 6 mai 2015 à 15:20 par eric basillais
    Athènes, Paris et la souveraineté

    M. SAPIR opère sous nos yeux une métamorphose d’économiste-expert en philosophe politique.
    mais nous n’oublierons jamais que le discours économiste a été pendant des décennies la justification aux politiques pro-européennes (à partir de 1983 et le tournant Fabiusio-Attalien de Mittérand) puis l’institutionnalisation des politiques euro-atlantistes aujourd’hui.

    Il parle de LAICITE :
    1/ il aurait dû alerter sous Giscard déjà du danger de l’hétérogénéité religieuse pour la souveraineté, ce qui fut exactement le sens des guerres de religion qui ont aboutit au concept "de remplacement" de la Souveraineté par la LAICITE. Il s’en garde bien. Puissent les Russes voir clair dans son jeu !
    2/ L’idéologie dépasse de très loin la seule Weltanschaung (vision du monde) religieuse et comprend autant de "philosophies", à commencer par le Marxisme que les Russes connaissent bien... mais aussi le Rationalisme, le Matérialisme, le Mécanisme et ...l’ECONOMISME !
    Autrement dit c’est un adepte d’une chapelle extrêmiste du Pythagorisme ( Religion des Nombres) qui vient nous donner des leçons de Laicité. On apprécierait l’humour si on ne vivait pas les conséquences de cette idéologie là.

    Le mieux que Sapir puisse faire est de débarrasser le plancher et ne pas contaminer les Russes dont la Souveraineté est en cours de reconstruction et dont nous devons, à cause de cela, de l’autre côté du nouveau mur du Dombass, prendre modèle.

    Il est extrêmement intéressant que Poutine se distingue comme un Chrétien Orthodoxe tout en instaurant les relations idoines avec les leaders d’autres religions, parce que la Weltanschaung (vision du monde) Chrétienne est parfaitement comprise de la majorité écrasante des Russes et même au delà, dans le monde Musulman ( Cheik Hossein par exemple).

    La question de la Monnaie ( Jésus / Issa ), en particulier, et de l’Harmonie entre les Nations (Aristote) y est contenue toute entière.

    Il ne faut pas avoir peur des débats et on a l’impression d’une mauvaise blague de M. SAPIR.
    Faites gaffe les Russes !

    Je soutiens par ailleurs la Souveraineté portée par un ASSELINEAU et la Démocratie auto-constitutive et par tirage aux sort des mandatés, d’inspiration Grecque ( eh oui M. SAPIR !) portée par un CHOUARD.

    ERIC BASILLAIS

     

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    • #1183478
      Le Mai 2015 à 19:30 par Mauvais karma
      Athènes, Paris et la souveraineté

      Merci pour ce commentaire , vous m’épargnez bien de la peine car je comptais abonder dans votre sens. La laïcité est une imposture , un mot devenu creux pour civiliser l’indigène enturbanné. Combien nos représentants sont faibles et donc nécessairement apeurés et violents. L’Education Nationale constitue son armée , sa milice de laïcards aux ordres chargée d’inculquer par l’idéologie la religion civile. Amusant que Sapir abonde dans le sens d’une manifestation de la souveraineté , c’est en réalité un aveu d’impuissance. Je doute que les Russes comprennent le sens du mot laïcité, le multicultarisme est plutôt toléré en Russie tant que les minorités restent discrètes quant aux valeurs qu’elles chérissent , surtout si ces valeurs sont l’appât du gain , la logique de la prédation ou une religion exogène. Sapir aurait dû nous parler du "vivre ensemble" , ça distrait aussi. Dommage , le diagnostic du début , la nécessaire réflexion sur le légal (la loi écrite par l’Etat) et le légitime (l’idéal de justice qui doit servir d’étalon au droit , c’est-à-dire la loi naturelle avec toutes les précisions qu’il faudrait longuement faire) méritait un tout autre développement.
      Courage monsieur Sapir ça n’est pas grave , encore un effort pour philosopher , vous étiez sur le point d’énoncer un semblant de vérité...